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 NAPOLEON ET LES FEMMES

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MORGANE
Jean2
JEAN
MARCO
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epistophélès

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MessageSujet: L'APRES NAPOLEON ...   NAPOLEON  ET LES FEMMES - Page 20 EmptyVen 25 Jan - 18:24

Ce billet fut immédiatement transmis à Soult, qui en fit insérer le texte dans le Moniteur du 26 février.
En apprenant que la duchesse de Berry, l'"ange pur de la restauration des Bourbons", la "Marie Stuart vendéenne", attendait un enfant dans sa prison, les légitimistes furent atterrés. La plupart déclarèrent qu'il s'agissait là d'une ignoble fable inventée par le gouvernement pour discréditer la"régente".
Les orléanistes, eux, se demandaient simplement qui était le père.
Etait-ce Guibourg ? Rosambo, qui avait été l'intime compagnon durant l'exil et l'épopée vendéenne ? Charette ? Bourmont ? Ou même Deutz, comme le croyait Bugeaud ? Les noms les plus invraisemblables étaient avancés.
Enfin, le 10 mai, la duchesse mit au monde une petite fille que l'on nomma Anne-Marie-Rosalie.
Aussitôt, le Dr Deneux prit la parole :

"Je viens d'accoucher Mme la duchesse de Berry, épouse en légitime mariage du comte Hector Lucchesi-Palli, prince de Campo-Franco, gentilhomme de la chambre du roi des Deux-Siciles, domicilié à Palerme."

Lorsque le nom du père fut publié, toute la France orléaniste éclata de rire :

- Voilà donc le mari que la duchesse s'est trouvé ! disait-on. On ne peut imaginer une farce plus grossière ! Quand donc se seraient-ils mariés ? Et comment cet Italien aurait-il rencontré Marie-Caroline en août 1832, alors qu'elle était enfermée dans sa mansarde de Nantes ?

Les légitimistes, obligés d'admettre les faits, répliquaient :


" - Soit, elle a accouché, mais son mari est connu et d'excellente famille. Les Campo-Franco descendent, en effet, de l'un des douze barons normands qui, avec Tancrède, conquirent la Sicile au retour de la Terre sainte. La duchesse a épousé secrètement, le comte Hector en 1831, et il est venu de Hollande la retrouver non mons secrètement à Nantes."

Tout cela semblait rocambolesque.
En fait, personne ne savait rien. Et la France entière se posait la même question : qui était le père de la petite Anne-Marie-Rosalie ? ...


Pour les légitimistes, le père ne pouvait être bien entendu, que Lucchesi-Palli. Pourtant, le récit de Marie-Caroline les embarrassait un peu. Ils craignaient que les orléanistes n'apprissent, par les habitants de La Haye, que le comte n'avait pas quitté la Hollande un seul jour au mois d'août 1832...
Alors, ils donnèrent une seconde explication de la rencontre des deux "époux" :

- Encore troublée par les émotions dues à sa maternité, déclarèrent-ils, la princesse s'était embrouillée dans ses propos et nous avions cru comprendre que son mari était venu à Nantes. La réalité est autre. C'est elle qui, sous un déguisement de paysanne vendéenne, se rendit en Hollande au mois d'aôut. Naturellement, son voyage fut des plus secrets et personne à La Haye n'en fut informé. Elle demeura d'ailleurs peu de jours près du comte Lucchesi et revint discrètement dans sa mansarde.


Cette explication, disons-le tout de suite, est refusée aujourd'hui par tous les historiens. Ecoutons Marc-André Fabre :

"Les légitimistes voulaient que Anne-Marie-Rosalie fût une enfant de la Hollande où Marie-Caroline, quittant pour quelques jours sa retraite, aurait été, déguisée en paysanne, retrouver le comte Lucchesi-Palli, pour revenir ensuite chez ses amies nantaises. Ils produisirent, plus tard, à l'appui de cette thèse audacieuse, deux lettres découvertes par le vicomte de Reiset : "sous un monceau de vieux papiers", après la mort de la duchesse. L'une est du comte Lucchesi. Il déclare : Votre course rapide, qui vous a exposée à tant de dangers, a été pour moi un tourment de plus, bien que je lui doive le bonheur de vous avoir revue.. L'autre est de la duchesse. Elle se termine ainsi : Les conséquences de ma course rapide m'obligent à dévoiler sous peu notre union."
"Mais ces lettres, qui sont datées de la captivité de Blaye, furent manifestement écrites pour les besoins de la cause, tout comme fut rédigé, vers la même époque, l'acte antidaté du mariage célébré par le P. Rosaven. Parmi les papiers saisis dans la mansarde de Nantes et déposés aux Archives nationales figure une nomenclature détaillée des lettres reçues et envoyées par la duchesse du 23 juin au 18 septembre. Presque tous les jours de cette période y figurent, à l'exception, cà et là, de deux ou trois. Durant ce laps de temps, Marie-Caroline n'a donc pas quitté son refuge nantais."

Pour expliquer la présence des papiers saisis, les légitimistes déclarèrent que la duchesse avait, "avant son départ pour la Hollande, laissé à ses fidèles des lettres antidatées, de manière que, si son asile était découvert, rien ne pût révéler son voyage qui pouvait donner lieu à des interprétations nuisibles aux intérêts de Henri V."

Comme le dit un des biographes de Marie-Caroline : "Les ennemis du pouvoir avaient réponse à tout, et ldes épisodes de romans, dignes de Xavier de Montépin, étaient inventés pour sauver l'honneur de la duchesse
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MessageSujet: L'APRES NAPOLEON ...   NAPOLEON  ET LES FEMMES - Page 20 EmptyVen 25 Jan - 18:47

Les orléanistes, naturellement, ne croyaient pas un mot de l'explication donnée par les légitimistes. Ils firent effectuer une enquête par quelques personnes bien placées chez leurs adversaires politiques et parvinrent à réunir suffisamment d'éléments pour bâtir une thèse qui est, aujourd'hui, presque unanimement acceptée par les historiens. La voici, telle que nous la présente J. Lucas-Dubreton :

"Au début de 1833, il est de toute nécessité de trouver un mari. Les carlistes se mettent à l'oeuvre ; en tête, Mme du Cayla, l'ancienne favorite de Louis XVIII, qui, avec des restes de beauté, possède une véritable génie d'intrigue. A La Haye, où elle habite, elle presse d'abord M. de Ruffo, ambassadeur de Naples, qui se trouve là de passage, mais quand celui-ci comprend de quoi il s'agit, il prend peur et s'enfuit.
"Alors, elle se retourne vers le comte Hector Lucchesi qui, à son tour, fait mine de ne point entendre. Rochechouart, légitimiste incorrigible, joint ses efforts à ceux de la dame, engage Lucchesi à "épouser la duchesse pour sauver son honneur", il ne réponds pas à ses ouvertures. Cependant, le temps passe ; la prisonnière ne peut attendre indéfiniment qu'on lui découvre un mari,. Alors, le financier Ouvrard paraît, avec des arguments sans réplique. Lucchesi reçut-il cent mille écus ? un million ? On l'ignore ; mais il consent à endosser l'honneur de la paternité ; et, sans tarder, on fait fabriquer, dans un petit village d'Italie, un certificat de mariage qu'on date de juillet 1831."

La thèse des orléanistes devait être, plus tard, en partie confirmée par le Dr Menière qui, après le retour de Marie-Caroline à Palerme, écrivit, d'Italie, au ministre de l'Intérieur, cette lettre datée du 30 juillet 1833 :

Il n'a jamais existé aucune relation un peu intime entre le jeune Hector et Mme la duchesse de Berry. Le comte n'a pas plus de vingt-huit ans, est ambitieux, exalté, mais homme d'honneur et incapable de céder à des considérations d'argent.
Dévoué au parti légitimiste, il n'a pas hésité à payer de sa personne dans cette grande occasion.
Il avait eu plusieurs entrevues, à Massa, avec la duchesse qui l'envoya à Paris pour y porter des dépêches au chef du parti henriquinquiste, mais il n'est point allé en Vendée, pas plus que la princesse n'est allée à La Haye, quoique, depuis son retour de Hollande, le comte ait cherché plusieurs fois à répandre ce bruit.
On m'a prouvé la fausseté de ces deux histoires, trop, évidemment, inventées après coup. C'est en Hollande que le jeune comte a reçu avis des vues que l'on avait sur lui. Il a dût emprunter six mille francs pour faire le voyage ; et ce n'est qu'en Italie qu'il a trouvé ses instructions définitives...
Le comte est resté ici incognito et les quelques rares personnes qui' l'ont vu l'ont trouvé fort triste. Depuis qu'il est à Palerme, tout le monde a fait la même remarque. Le jeune comte n'a pas eu la force de jouer son rôle jusqu'au bout ; sa paternité lui pèse et la duchesse avait même résolu d'éloigner l'enfant. J'ai été appelé deux fois auprès de la princesse et je l'ai trouvée fort changée. Elle affiche une gaieté qui ne m'a pas paru naturelle. Si on ne croit pas au mariage, on croit bien moins encore à la paternité du comte Hector, mais on pense qu'en homme dévoué et romanesque, il a consenti à couvrir de son nom un accident qui arrivait si mal à propos. On pense aussi qu'en homme ambitieux et crédule, il n'est pas trop fâché, au fond, de se trouver attaché aussi intimement à la fortune d'une princesse qui, suivant ses idées, est destinée à voir une nouvelle Restauration
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MessageSujet: L'APRES NAPOLEON ...   NAPOLEON  ET LES FEMMES - Page 20 EmptyLun 28 Jan - 19:57

Enfin, il existe un document capital qui ruine définitivement la thèse du mariage secret. C'est la copie, de la main de Mme Cayla, d'une lettre de Marie-Caroline, adressée de Blaye à Olivier Bourmont, et parvenue à La Haye le 12 avril 1833, soit deux mois avant l'accouchement. Cette lettre, qui devait être chiffrée, est ainsi conçue :

Je serai reconnaissante toute ma vie, mon cher Olivier, de la manière dont vous avez interprété auprès de moi les sentiments du comte Hector ; je lui écris moi-même combien je suis touchée de sa proposition que j'accepte avec la plus vive reconnaissance ; mon occupation sera de faire son bonheur.
Je pense qu'il est important qu'avec la plus grande prudence et le plus prompt empressement et secret il se rende à Naples pour enregistrer l'acte de mariage et qu'il y reste pour m'attendre. Je me réserve, bien entendu, d'assurer le sort d'Hector pour contrat, lorsque je serai en Italie, et que j'aurai connaissance détaillée de mes propres affaires. Je profiterai de l'autorisation si délicate qu'il me donne de le désigner, s'il y a urgence. Je réponds qu'il n'y aura aucune réclamation quelconque. Ma lettre au comte L.... fait foi de mon entier consentement à l'accepter pour époux. Je lui demande par vous, seulement, le secret le plus absolu, excepté pour son père, s'il le croit nécessaire. Il est bien entendu que, pour le roi de Naples, sa famille et la mienne, le mariage s'est conclu pendant mon séjour en Italie ; mais si faire se peut, ils ne doivent le savoir que lorsque je serai rendue à la liberté.
S'il est utile de convenir d'une course légère en Hollande, elle n'a pu avoir lieu que du 15 août au 15 septembre. Je n'ai pas besoin de vous assurer de ma sincère amitié, et combien je suis touchée de cette nouvelle preuve d'attachement.


(Cette lettre appartient au prince de Beauveau)
.


Le comte de Lucchesi-Palli n'était donc qu'un homme de paille ? Mais alors, qui était le père d'Anne-Marie-Rosalie ?
Les contemporains, eux-mêmes, renoncèrent bientôt à chercher.

- La duchesse, disaient-ils découragés, n'en est d'ailleurs pas à sa première faiblesse. Vous souvenez-vous de ses retraites subites autrefois, à Rosny, à Bath ? Cela donnait déjà à penser. Après l'enfant d'Angleterre, l'enfant de Vendée. En vérité, cette Napolitaine comte la chasteté pour rien.

Alors ?
La plupart des historiens actuels pensent que le père de "l'enfant de Blaye" était le jeune et séduisant avocat nantais Guibourg, qui passait de longues soirées en tête à tête avec Marie-Caroline dans la mansarde de la rue Haute-du-Château.
Mais ce n'est là qu'une hypothèse qu'aucun document ne vient confirmer.
Aussi, par prudence, nous rangerons-nous à l'avis de la comtesse de Boigne, qui écrit dans ses mémoires :
"Je ne sais si le nom du véritable père demeurera un mystère pour l'histoire ; quant à moi, je l'ignore. Faut-il en conclure, ainsi que Chateaubriand me répondait, un jour où je l'interrogeais à ce sujet :
" - Comment voulez-vous qu'on le dise, elle-même ne le sait pas..."


(La comtesse de Boigne nous dit également que la petite Anne-Marie-Rosalie fut déposée "chez un agent d'affaires comme un paquet incommode et compromettant". La pauvre enfant n'y demeura pas longtemps. Elle mourut pendant l'hiver 1833...)
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MessageSujet: L'APRES NAPOLEON ...   NAPOLEON  ET LES FEMMES - Page 20 EmptyLun 28 Jan - 20:36

M. THIERS EPOUSE ELISE DOSNE LA FILLE DE SA MAÎTRESSE




Comment donc ne pas aimer
Ce qui fut confectionné
Par la femme que l'on aime ?

L'AMOUR ET LA CUISINE.
(Chanson du XVIIIè siècle)



APRES l'arrestation de la duchesse de Berry, Adolphe Thiers courut chez Mme Dosne pour lui annoncer sa victoire.
Dès les premiers mots qu'il prononça, l'épouse du receveur des Finances poussa un gros soupir et commença à se déshabiller. Elle était si émotive, en effet, qu'elle ne pouvait recevoir une bonne nouvelle "sans éprouver immédiatement une démangeaison vénérienne".
D'un geste vif, elle entraîna Thiers sur son lit, le dévêtit avec une dextérité d'écosseuse de pois et, selon le mot charmant d'un chroniqueur du temps "le convia à s'ébattre sur sa pelouse" ...

Le petit Adolphe, que son triomphe mettait en verve, y grimpa aussitôt et s'y livra à mille gamineries qui eussent amusé un public, si ce genre de choses ne s'effectuait pas en cachette, comme une mauvaise action.
Lorsque leurs ébats furent terminés, Mme Dosne et son petit "grand homme" eurent une longue et tendre conversation.

- Il ne faut pas perdre le bénéfice de ta victoire, dit Sophie. La chance t'a permis de commencer ta carrière de ministre par un coup d'éclat, profite de ce que les hommes du gouvernement t'applaudissent encore pour sortir par la grande porte.
Thiers, du fond de l'oreiller où il reprenait des forces, murmura :
- Après quoi, j'attends qu'ils m'offrent un portefeuille plus important ?
- Tu m'as parfaitement comprise. Mais fais attention. Il te faut le Commerce et les Travaux publics. De ce double portefeuille dépendent les Archives du royaume, les Beaux-Arts, les Théâtre et l'Opéra. Tu auras donc en main toutes les ficelles qui ouvrent les portes de l'Académie française..
.

Adolphe vit tout de suite de quelle façon tirer la chevillette pour que la bobinette chût. Il se leva et, complètement nu, marcha de long en large dans la chambre en faisant, à haute voix, des projets de grands travaux :

- Je vais achever l'Arc de triomphe et restaurer les monuments de Paris qui sont vieux et sales : la Madeleine, le Panthéon, le Collège de France, la colonne Vendôme, les Beaux-Arts, le Muséum, le Palais-Bourbon ...

Mme Dosne sourit :

- Et mon Adolphe sera académicien ...

Cette perspective éblouit Adolphe Thiers. Sans rien dire, il regrimpa sur le lit et ne tarda pas à trouver un endroit où cacher son émotion...

Quelques mois plus tard, le petit Marseillais devait suivre, point par point, le programme de sa maîtresse.
Le 31 décembre 1832, il recevait les portefeuilles du Commerce et des Travaux publics, faisait immédiatement gratter tous les monuments de Paris, s'occupait de la mise en place de l'obélisque et commandait une statue de Napoléon.
Cette dernière initiative lui valut quelques quolibets :

"Tâchez de ne pas rire, écrivait un chroniqueur, le [i]Moniteur
nous l'annonce officiellement, on a coulé la qtatue de Bonaparte et M. Thiers présidait cette intéressante opération. Vous figurez-vous la statue de Napoléon fondue sous les auspices du nain officiel, qu'il aurait caché dans une de ses bottes ? Pour la statue de M. Thiers, nous ne lui voyons pas d'autre place que la colonne Vendôme elle-même ; il pourra largement tenir entre les jambes de Napoléon..."

Mais le "nain officiel" laissait ricaner les journalistes et suivait son plan. Au printemps 1833, après avoir commandé à Etex, Rude et Cortot les groupes destinés à orner l'Arc de triomphe, il posa sa candidature à l'Académie.
Malgré son jeune âge - il n'avait que trente-six ans - il fut élu par dix-sept voix contre six à Charles Nodier et deux bulletins blancs...
Cette fois le petit Marseillais pensa qu'il était vraiment "quelqu'un".
Alors Mme Dosne le prit sur ses genoux et lui dit :

- Adolphe, tu peux avoir maintenant toutes les ambitions. Mais il faut changer ta vie. Un grand homme politique ne peut pas être célibataire. Il doit recevoir, donner des fêtes, des bals. Il lui faut une compagne. Il lui faut une maîtresse de maison. Il lui faut une femme...
Thiers prit la main de Sophie.

- Non, dit doucement Mme Dosne, moi, je ne peux pas quitter M. Dosne. Mais je vais te proposer une femme qui ne nous séparera pas. Veux-tu épouser Elise ?

Elise était la fille aîné de Mme Dosne. Elle n'avait que quinze ans et Adolphe la considérait encore comme une enfant. Mme de Dino (ex-maîtresse de Thiers) nous la décrit ainsi : "Elle a de belles couleurs, de beaux cheveux, de jolis membres bien attachés, de grands yeux qui ne disent rien encore, la bouche désagréable, le sourire sans grâce et le front saillant... Elle a l'air boudeur et n'a aucune prévenance..."

Voyant hésiter son amant, Sophie insista :

- Elle est douce, obéissante. Elle m'aime beaucoup. Elle sera fière d'être ta femme. Elle nous laissera nous aimer en paix. Tu n'as à craindre d'elle ni les larmes, ni les scènes. Pour nous rien ne sera changé...

Thiers finit par accepter et, le 6 novembre 1833, le Constitutionnel publiait cet entrefilet :

"Hier, Mlle Dosne, fille du Receveur général des Finances de Lille a atteint sa quinzième année, et c'est hier qu'a eu lieu la cérémonie de ses fiançailles avec M. Thiers. Mlle Dosne est, dit-on, fort petite, fort jolie, et surtout fort riche ; on parle de deux millions."

Cette nouvelle fit l'effet d'une bombe à Paris.
Que le ministre-académicien osât épouser la fille de sa maîtresse stupéfiait les moins prudes.
Aux Tuileries, la reine Marie-Amélie fut horrifiée :

- C'est une tache sur notre règne, dit-elle.

Louis-Philippe tenta de la calmer :

- M. Thiers est un ambitieux à qui tous les moyens sont bons pour arriver. Laissons-le faire.
Ses excès montreront ses limites
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MessageSujet: L'APRES NAPOLEON ...   NAPOLEON  ET LES FEMMES - Page 20 EmptyJeu 31 Jan - 13:08

Le mariage eut lieu discrètement, le 7 novembre, à minuit, à la mairie du 11è arrondissement.
Après quoi, les nouveaux époux se rendirent à l'église Saint-Jean, faubourg Montmartre, où le curé les bénit.
A une heure du matin, Adolphe et Elise, accompagnés de Mme Dosne, qui les embrassa tendrement tous les deux, allèrent se coucher au ministère.
Galant, Thiers se conduisit avec la petite Dosne comme s'il se fût agi de sa belle-maman...
Le lendemain, en apprenant que le mariage avait été célébré à l'église, la reine fut rassérénée.

- Allons, dit-elle, ce M. Thiers a tout de même de la religion.

Elle ignorait que le ministre, connaissant les besoins du curé de Saint-Jean, avait troqué son billet de confession contre un calorifère...
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MessageSujet: L'APRES NAPOLEON ...   NAPOLEON  ET LES FEMMES - Page 20 EmptyJeu 31 Jan - 13:40

FANNY ELSSLER FUT-ELLE LA MAÎTRESSE DE L'AIGLON ?


C'était un corps plein de désirs qui dansait. - GRILLPARZER -



AU mois de juin 1834, les Parisiens qui étaient encore bouleversés par les atroces massacres de la rue Transnonain, (le 14 avril 1834, le Comité des Droits de l'Homme de Paris décida de se soulever pour soutenir l'insurrection républicaine de Lyon. Des barricades s'élevèrent dans le Marais - quartier de Paris -. La répression fut terrible, principalement rue Transnonain où tous les habitants de la maison portant le n°12, d'où était parti un coup de fusil, furent massacrés par les soldats.) oublièrent, un moment, l'agitation politique pour s'intéresser à une danseuse.
Cette danseuse était la célèbre Fanny Elssler, que le Dr Véron, directeur de l'Opéra, avait fait venir en France pour la présenter au public parisien.
Les petits journaux publiaient des descriptions enthousiastes de la jeune femme et tout Paris sut bientôt qu'elle possédait les "plus jolies jambes du monde, des genoux irréprochables, des bras ravissants, une poitrine de déesse et la grâce virginale de Diane elle-même".


Cet ensemble de qualités eût été suffisant pour faire rêver tous les hommes, du maréchal Soult au dernier des calicots. Mais les Parisiens, déjà fort émus, allaient recevoir un choc dont certains de leurs descendants ne sont pas encore tout à fait remis.
Le 2 juin, un journaliste nommé Charles Maurice, qui dirigeait le Courrier des Théâtres, publia sur Fanny un artice qui se terminait ainsi :


"Quand cette artiste était au théâtre de Vienne, on voulait savoir qu'elle intéressait un prince bien cher à la nation française, et moissonné à la fleur de l'âge pour le désespoir de notre époque. Fondé ou non, ce bruit est entièrement de nature à exciter la bienveillance, à piquer la curiosité en faveur de Mlle Elssler (sic).
Dût-on n'y trouver qu'un prétexte à de doux souvenirs, qu'une pensée liée à tant d'espérances si cruellement déçues, qu'une occasion (bien détournée sans doute) de témoigner les sentiments que gardent à d'illustres cendres des hommes sauvés du torrent de l'apostasie, on saisira l'occasion pour aller voir, applaudir et méditer."


Immédiatement, dans les salons, les bureaux, les boutiques, les gens s'interrogèrent. Etait-ce possible ? Cette jeune femme avait-elle été la maîtresse de l'Aiglon, mort deux ans plus tôt ?
Pouvait-on imaginer que ses mains fines avaient caressé les boucles blondes du fils de l'Empereur ?
Quelques jours plus tard, un article de Jules Janin, paru dans le grave (sérieux) Journal des Débats, vint convaincre les plus sceptiques.

"Il y avait, à Vienne, il n'y a pas longtemps, écrivait-il, un parc entourant une demeure royale où se glissait, le soir, une jeune femme que le duc de Reichstadt, penché à sa fenêtre, entendait venir de loin.
"Cette jeune femme a été le premier et le dernier sourire du fils de l'Empereur.
"Fanny Elssler a quitté l'Autriche. Elle n'avait plus rien à y faire. Elle ne pouvait plus y danser après que s'étaient fermés deux yeux si brillants et si vifs qui la regardaient avec amour. Maintenant que la loge du jeune prince est vide, Fanny n'a plus rien à faire à Vienne.
A présent, elle appartient à son beau royaume de France et à ses loyaux et enthousiastes sujets de sa bonne ville de Paris."

La danseuse devenait une souveraine que le brave peuple parisien, demeuré bonapartiste, était prêt à acclamer aux cris de "Vive l'Empereur !" et de "A bas Louis-Philippe !".
Naturellement, lorsque Fanny débuta à l'Opéra, le 15 septembre dans la Tempête, elle remporta un triomphe. Et pendant des mois, des milliers de spectateurs vinrent de toutes les provinces de France pour applaudir "celle qu'avait aimée le roi de Rome..."

Malheureusement, en 1835, bonapartistes et admirateurs de Fanny reçurent, selon le mot amusant d'un mémorialiste, "une douche glaciale sur leur pamoison". Un rédacteur de la Gazette des Théâtres fit paraître l'article suivant, qui démentait formellement les affirmations de Charles Maurice et de Jules Janin :

"On a dit et on a répété qu'un jeune prince, né sur les marches du plus beau trône de l'Europe et qu'une maladie de consomption (tuberculose) a ravi, il y a trois ans, à bien des sympathies, on a dit que ce prince, épris d'une passion violente pour Mlle Fanny Elssler, était mort en répétant le nom de la belle danseuse allemande. On a dit bien d'autres choses que je ne rappellerai pas. Mais la vérité demande ici une petite place contre les suppositions des historiens auxquels je réponds. Je tiens, d'un grand amateur de l'Opéra de Vienne, d'un fidèle et fervent admirateur des soeurs Elssler, que jamais le fils de Napoléon (puisqu'il faut le nommer) n'a vu, ni au théâtre ni ailleurs, l'artiste pour laquelle on lui a prêté de si tendres sentiments. Qu'on essaie de me réfuter, si l'on peut. J'ai mon Viennois sous la main, prêt à soutenir un démenti dont je ne suis que l'écho."

Où était la vérité ?
C'est ce que nous allons essayer de découvrir.
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MessageSujet: L'APRES NAPOLEON ...   NAPOLEON  ET LES FEMMES - Page 20 EmptyJeu 31 Jan - 13:57

D'abord, qui était Fanny Elssler ?
Une jeune Allemande de vingt-quatre ans dont le père, né en Silésie, avait été valet chez Haydn (le brave homme portait un véritable culte à son maître. Lorsque celui-ci était absent, Elssler prenait un brûle-parfum et passait des heures à encenser le portrait du musicien).
Après une éducation artistique particulièrement surveillée, elle avait débuté au Koernther-Thor où le public s'était engoué pour sa grâce et sa beauté. Bientôt, un riche et puissant personnage, le chevalier de Gentz, de quarante-quatre ans son aîné, l'avait remarquée et était devenu son amant.
Par lui, Fanny avait connu Metternich et fréquenté le comte de Prokesch-Osten, ami intime et inséparable de l'Aiglon...
Après la mort de son protecteur, survenue en 1832, elle était devenue la maîtresse d'un danseur berlinois. Depuis qu'elle vivait à Paris, elle se montrait d'une sagesse exemplaire, n'ayant jamais plus de trois amants à la fois, ce qui, pour une danseuse équivalait alors à la chasteté monastique.
L'Opéra avait, en effet, la réputation d'abriter un troupeau d'ardentes pécheresses, de gourgandines et de courtisanes éhontées.
L'une d'elles, Pauline Duvernay, ayant un jour refusé les cent mille francs que lui offrait un grand seigneur russe, tout le corps de ballet fut scandalisé.

- Tu ne seras jamais une grande danseuse ! lui disait-on.


Elle se réhabilita d'une curieuse façon. Quelque temps après, un jeune secrétaire d'ambassade étant venu lui offrir sa vie, elle se contenta de répondre doucement :

- Ce sont des mots, monsieur. Je suis sûre que si je vous priais de me donner une de vos dents, vous me la refuseriez.

Le jeune homme courut chez un dentiste, revint avec une dent, et pour lui prouver qu'il ne l'avait pas achetée d'occasion, montra sa mâchoire.

- Ah ! mon Dieu ! s'écria la ballerine, vous vous êtes trompé. C'est celle du dessous que je voulais.

Le malheureux eut une syncope.

Fanny Elssler n'était pas de cette race de danseuses. Elle n'était point vénale. En outre, elle se différenciait de ses camarades par un langage châtié, dont elle avait pris le goût au contact du chevalier de Gentz, et bien des journalistes étaient étonnés de ses connaissances.
Elle avait même de l'orthographe, ce qui était stupéfiant à une époque où une ballerine écrivait à son amant ce mot resté célèbre :

"Notre anfan ai maure (mort). Vien de bonheur (bonne heure). Le mien ai de te voire."

Non, certes, Fanny Elssler n'était pas une danseuse comme les autres.
Mais fut-elle la maîtresse de l'Aiglon ?..
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MessageSujet: L'APRES NAPOLEON ...   NAPOLEON  ET LES FEMMES - Page 20 EmptyJeu 31 Jan - 15:57

Les historiens qui croient à cette liaison rappellent tout d'abord que le duc de Reichstadt était beaucoup plus libre à Schönbrunn qu'on ne le prétend généralement. Ils le montrent fréquentant les bals et citent ce texte du comte Prokesch-Osten, son ami intime :

"Il me raconta un jour que, la nuite précédente, lui et le comte Maurice Esterhazy, dont la société (la fréquentation) enjouée le distrayait, s'étaient rendus, masqués, au bal de la Redoute et que, là, ils avaient suivi la comtesse X ...(comtesse Naudine Caroly, née princesse Kaunitz). jusqu'à sa demeure où ils avaient trouvé une nombreuse société également en train de danser ; que les deux masques, connus seulement de la maîtresse de maison, étaient demeurés pour tous les invités une énigme indéchiffrable. Le duc ne s'était pas dissimulé qu'il avait commis un acte d''étourderie ; mais il n'avait pu résister à l'attrait de faire quelque chose qu'à la Cour on le crut incapable d'oser et d'exécuter.
Heureusement rien ne transpira de cette affaire, ainsi que j'ai pu m'en convaincre plus tard, bien qu'alors cela me parut impossible."


Cette liberté, qui permettait au jeune duc de s'échapper du palais et de courir le guilledou, peut paraître étrange. Certains historiens y voient l'un des éléments principaux d'un plan machiavélique formé par Metternich. D'après eux, le ministre autrichien, connaissant la santé délicate du prince, aurait poussé celui-ci à faire la fête pour hâter sa fin. Un témoignage de cette vie dissolue nous est donné par un contemporain :

"Il recherchait avec avidité les plaisirs bruyants du bal, se laissait entraîner pendant des nuits entières aux tourbillonnements d'une valse plus fatigante que voluptueuse, car, abandonnant les danses allemandes, c'était aux bonds sautillants de la galope anglaise ou à la rapidité des figures françaises qu'il donnait la préférence ; et ce n'était pas sans surprise qu'on voyait ce jeune homme, autrefois si grave, si occupé de travaux paisibles et sérieux, rentrer le matin, pâle et harassé, après avoir passé une nuit de fatigues et d'épuisement au bal."

Metternich, constatant que les fêtes et les nuits blanches ne donnaient pas de résultats assez rapides, aurait alors poussé l'Aiglon à commettre les pires excès sensuels. Des hommes comme le comte Esterhazy et Gustave de Neipperg, propre fils du mari de Marie-Louise, se seraient faits entremetteurs, procurant au duc des jeunes femmes faciles, hardies au jeu de l'amour et d'un commerce exténuant.
Là encore, Metternich aurait réussi, s'il faut en croire l'auteur de l'Histoire de Napoléon II
:

"Comme si le duc eût voulu s'adonner à la fois à tous les genres d'excès et tenir contre sa propre existence une gageure homicide, il ouvrit son coeur à des impressions qui auraient pu devenir pour la source de consolations douces et tendres, mais, qui, n'étant que le résultat de passions fougueuses, sans discernement et sans but, hâtèrent la ruine totale de ce corps usé si jeune par des fatigues physiques et morales poussées au-delà des forces humaines."

Quelle que soit la part de responsabilité de Metternich, il faut bien reconnaître que l'Aiglon eut, à Vienne, quelques aventures féminines. On connaît, outre la comtesse de Kaunitz, l'archiduchesse Frédérique-Sophie et même une cantatrice, Mlle Pêche.
Or, disent nos historiens, si l'Aiglon a pu devenir l'amant d'une chanteuse, pourquoi vouloir refuser qu'il le fût d'une ballerine ? Et, s'appuyant sur le fait que Fanny Elssler, par l'intermédiaire de son amant, le baron de Gentz, fréquentait Metternich, et qu'en outre le meilleur ami du jeune duc, le comte de Prokesch-Osten, possédait une chambre chez la danseuse, ils concluent que Fanny, choisie par le gouvernement autrichien pour "aider à débarrasser l'Europe d'un héritier encombrant", aurait bien été la maîtresse de l'Aiglon...


Les adversaires de cette thèse - ou antifannystes - ne vont pas chercher leurs arguments dans des racontars de chambrières viennoises. Ils se contentent de fournir deux témoignages formels et indiscutables : le premier émane du comte de Prokesch-Osten. Napoléon III lui ayant demandé un jour la vérité sur l'affaire qui nous occupe, le jeune Viennois écrivit à un ami :

Je lui démontrerai la fausseté des prétendus rapports du duc avec Fanny Elssler.

Dans ses Mémoires, il devait ajouter :

"Ce qui avait donné naissance à ces commérages, c'est qu'on avait quelquefois vu le chasseur (du duc) entrer dans la maison où demeurait Fanny Elssler ; mais le chasseur y venait parce que M. de Gentz et moi nous avions chez la danseuse une chambre qui nous servait de cabinet de travail ou de lecture que ce domestique, certain de m'y trouver le plus souvent, m'y apportait les courtes missives du duc, ou venait me prier de passer chez lui."
Le second est de M. de Mirbel. Dans une lettre à une cousine il écrit :

]i]Mlle Fanny Elssler est une célèbre danseuse et une fort bonne personne dont Mme de Mirbel vient de faire le portrait. Elle passe pour avoir charmé les dernières années du fils de Napoléon, mais elle assure qu'il n'en est rien. On doit l'en croire...[/i]

Une question, dès lors, se pose : pourquoi Fanny Elssler attendit-elle si longtemps pour nier ses relations avec l'Aiglon ? Il lui était facile, en juin 1834, d'envoyer un démenti à Charles Maurice et à Jules Janin - et d'en exiger la publication dans leurs journaux respectifs. Elle n'en fit rien. Bien mieux, elle demeura en excellents termes avec le premier de ces journalistes. Elle lui adressa même un billet fort amical, qui pourrait bien contenir la solution de toute cette affaire :

Veuillez, nous vous en prions, Monsieur, nous protéger comme vous l'avez fait jusqu'à présent.
Vous êtes si bon ! Vous rendez les artistes heureux par votre bienveillance. Vous trouverez toujours les deux soeurs toutes dévouées.

11 août 1835 Fanny et Thérèse Elssler

Qu'avait donc fait Charles Maurice pour que les soeurs Elssler le considérassent comme un "protecteur bienveillant ?" Qu'avait-il écrit qui pût lui valoir tant d'amabilité et de reconnaissance de la part de ces deux artistes ? N'aurait-il pas tout simplement inventé le roman de Fanny et de l'Aiglon dans un but publicitaire, à la façon de notre grande presse à scandale ? La chose est fort possible et le fait que Jules Janin lui ait emboîté le pas n'infirme en aucune façon notre hypothèse.
Nous voyons tous les jours des journaux, voulant paraître bien renseignés, surenchérir à une information inventée de toutes pièces par un confrère...

La liaison de Fanny et du fils de Napoléon serait donc une légende créée par un journaliste à l'imagination fertile.
Mais cette légende était trop belle pour disparaître à la suite d'un démenti. Le bon peuple qui a du goût pour les contes de fées continua de croire aux amours secrètes et passionnées de la plus exquise ballerine de l'époque avec le plus beau prince de tous les temps.
Une aventure assez curieuse devait en apporter la preuve à Fanny.
Un jour, un jeune Anglais vint lui proposer une fortune si elle acceptait d'être aimée de lui. La danseuse, nous l'avons dit, n'était point vénale.
Elle refusa. L'Anglais tripla son offre. A partir d'un certain chiffre, la chose est bien connue, les femmes n'ont plus l'impression de se vendre. La somme devient un hommage rendu à leur beauté.
Fanny consentit donc à accorder ses faveus. Elle se déshabilla, se glissa dans le lit et attendit.
L'Anglais, qui était resté vêtu, enleva alors, d'un geste brusque, les couvertures, ajusta son monocle et considéra longuement l'exquise nudité de la ballerine.
Après quoi, il ramena les couvertures, retira son monocle et dit :


- Merci ! A présent j'avais viou le tiombeau du diouc de Reichstadt ! ...

Puis il sortit de chez Fanny après avoir laissé un portefeuille bien garni sur la cheminée...
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MessageSujet: L'APRES NAPOLEON ...   NAPOLEON  ET LES FEMMES - Page 20 EmptyJeu 31 Jan - 16:08

A PARME, MARIE-LOUISE MENAIT UNE VIE DISSOLUE


Sa vie force le biographe à s'abaisser dans les détails d'une chronique où les scandales vont jusqu'à la honte ... - LE PORTEFEUILLE - (Revue diplomatique - 1848.)


UN soir de 1821, une scène amusante se déroula à l'ambassade d'Angleterre. Un prélat se présenta, caccompagné de deux jeunes officiers. L'huissier vint à la rencontre :

- Qui dois-je annoncer, monseigneur ?

La réponse fut nette :

- Annoncez l'évêque d'Amiens et ses fils.

Voyant que les laquais qui faisaient la haie dans le vestibule ouvraient de grands yeux et que l'hissier devenait cramoisi, le prélat craignit d'être un objet de scandale. Il reprit en souriant :

- Annoncez alors l'évêque d'Amiens et les neveux de son frère.

Ce qui fut fait à la satisfaction générale des âmes simples.
Razz

Cet évêque plein de verve n'était pas, il faut le reconnaître, un ecclésiastique du modèle courant.
Il avait été successivement officier de mousquetaires, pendant la guerre de Sept ans, capitaine de hussards, ambassadeur de France à Venise et aumônier de la duchesse de Berry. Mais son plus extraordinaire titre de gloire devait être un jour celui de "beau-père de l'ex-impératrice Marie-Louise"...

De quelle façon ?
C'est ce que nous allons voir.
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MessageSujet: L'APRES NAPOLEON ...   NAPOLEON  ET LES FEMMES - Page 20 EmptyVen 1 Fév - 16:46

Mgr de Bombelles, évêque d'Amiens, n'était entré dans les ordres qu'à l'âge de soixante-cinq ans, après la mort de sa femme, Angélique de Mackau. Il avait trois fils. Le premier était ministre d'Autriche en Toscane, le second gouverneur de l'empereur François-Joseph, et le troisième lieutenant-colonel de l'armée autrichienne.
C'est ce dernier, prénommé Charles, qui devait un jour épouser secrètement l'ex-impératrice des Français.
Marie-Louise était veuve depuis 1829. Le général de Niepperg, son mari, n'avait pu, disaient les mauvaises langues, résister à l'ennui qui se dégageait de la conversation de la duchesse de Parme. D'autres soutenaient que le pauvre général était mort d'épuisement en essayant de satisfaire les désirs sans cesse renouvelés de sa trop exubérante épouse.

Les informations que nous avons pu recueillir dans les chroniques et les mémoires du temps nous permettent de penser que cette dernière explication est sans doute la bonne. Marie-Louise, en effet, était tourmentée, à cette époque, par une chaleur vénérienne qui la poussait à rechercher "dix à quinze fois par jour (mazette ! Razz ) et dans les endroits les moins faits pour que la nature s'abandonne, cette fraîcheur que procurent les assauts fougueux d'un amant dans l'intimité d'une dame". ( Charles VERDIER, Maire-Louise amoureuse.)

Au cours de ses promenades dans la campagne, il arrivait à Marie-Louise de ressentir soudain l'"aiguillon de l'amour". Elle quittait alors le groupe de ses familiers et partait à la recherche d'une aventure agreste.
L'auteur de la Chronique scandaleuse de la Restauration nous conte à ce propos une anecdote savoureuse : un jour que la petite cour parmesane traversait une forêt, la duchesse dont les narines palpitaient depuis quelques instants fit arrêter sa voiture et dit :

- Continuez, je vais faire quelques pas. Je vous retrouverai au carrefour.


Elle prit un sentier et déboucha sur une clairière où un jeune bûcheron coupait du bois.
Marie-Louise s'approcha de lui et, avec cette belle désinvolture des grands, lui demanda de l'accompagner derrière un buisson.
Le jeune homme qui n'avait jamais imaginé qu'une aussi belle dame pût lui adresser la parole, demeura fiché près de son tas de bois sans comprendre ce que la duchesse désirait de lui.

- Allons, viens, lui dit Marie-Louise.


Et, prenant le bûcheron par la main, elle le mena sur un lit de mousse, s'étendit et, d'un geste brusque, retroussa ses jupes "jusqu'au-dessus de l'endroit qu'avait tant aimé Sa Majesté l'Empereur".
Ce spectacle inattendu acheva de bouleverser le bûcheron. Il se mit à faire des signes de croix et à marmonner des prières, croyant être l'objet d'une apparition maligne. Razz
Agacée, Marie-Louise le saisit par la jambe et le fit tomber à côté d'elle.

- Viens donc, imbécile !


Cette fois, le jeune garçon fut certain d'avoir affaire à une de ces fées malfaisantes et lubriques qui venaient, suivant la croyance populaire, hanter les forêts pour tenter de s'accoupler avec les hommes.
Libérant sa jambe d'un coup sec, il détala comme un fou, gagna la cabane familiale et raconta en tremblant de peur le danger auquel il venait d'échapper
Son père et cinq autres bûcherons étaient en train de couper un énorme chêne. Ils s'arrêtèrent, hochèrent la tête, posèrent leurs cognées (haches) et, s'étant fait indiquer l'endroit exact de l'apparition, ils s'y rendirent d'un pas vif.

En chemin, ils rencontrèrent Marie-Louise qui, les yeux hagards, cherchait à mettre la main sur un autre bûcheron. En voyant venir vers elle ces six hommes aux bras velus, elle poussa un petit cri de plaisir et se laissa tomber sur l'herbe.
Alors, les bûcherons, qui ne croyaient plus depuis longtemps aux fées lubriques lol! , se placèrent en file à la façon de ces braves gens qui, pendant les périodes de disette, attendent leur tour chez l'épicier et, l'un après l'autre vinrent apporter le meilleur d'eux-mêmes à l'ex-impératrice.

Pendant ce temps, le jeune homme, effrayé à la pensée du danger que courait son père, était parti en hurlant du côté du carrefour où attendait la suite de Marie-Louise.
M. de Marchal, commissaire impérial envoyé par Vienne après la révolte parmesane de 1831, descendit de sa voiture et appela l'adolescent.

- Que se passe-t-il ?
- Il y a une méchante fée qui a voulu m'entraîner dans le péché (écroulée de rire). Et maintenant, j'ai peur qu'elle fasse du mal à mon mère et à ses amis qui sont allés courageusement la chasser de la forêt.
"Ce fut le tour de M. de Marchal de hocher la tête, nous dit l'auteur de la Chronique. Il demanda comment était vêtue la "fée" et, l'ayant appris, il pria le jeune homme de rentrer chez lui."

Les membres de la Cour qui connaissaient leur souveraine attendaient la fin de l'aventure en ricanant.


- Demeurez ici, leur dit sévèrement M. de Marchal. Je vais voir à quoi riment ces racontars et surtout si S.A. Mme la Duchesse n'est point en péril...

Quelques instants plus tard, il surgissait auprès de Marie-Louise qui était en train de consommer son dernier bûcheron.
Les autres, assis benoîtement sur des bûches, attendaient que leur camarade eût terminé.
En voyant apparaître M. de Marchal, ils furent pris de crainte et s'enfuirent, laissant le sixième "oeuvrer sans se douter qu'il avait un témoin".
Lorsqu'il eut achevé sa besogne, le pauvre aperçut le commissaire impérial et, "tout mal reboutonné qu'il était, il s'en fut en courant vers sa cabane".
Alors, Marie-Louise ouvrit les yeux et vit M. de Marchal.

- Comment ? Vous aussi ? Razz dit-elle avec un sourire aimable. Je ne l'espérais plus de votre part.

Mais le commissaire impérial, feignant de n'avoir rien vu ni rien compris, dit simplement :

- J'espère que Votre Majesté n'a pas pris froid en commettant l'imprudence de se reposer quelques instants dans l'herbe.
Marie- Louise se releva sans répondre et regagna sa voiture.
Quelques jour plus tard, M. de Marchal, dont la situation devenait intenable à la Cour ducale, demandait son rappel à Vienne.
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MessageSujet: L'APRES NAPOLEON ...   NAPOLEON  ET LES FEMMES - Page 20 EmptySam 2 Fév - 16:38

C'est alors que Metternich envoya à Parme le comte Charles de Bombelles.
Marie-Louise l'accueillit avec un sourire narquois.

Le comte de Bombelles que je craignais m'enchante autant que je puisse en juger en si peu de temps - écrit-elle à sa fidèle Victoire - [i]Il réunit tout ce qu'on peut désirer, fermeté et douceur dans les manières, en même temps c'est un homme si vertueux, c'est une vraie trouvaille
.

Mais bientôt, Marie-Louise résolut de faire entrer ce digne personnage dans son lit et de le convertir aux plaisirs de la courtepointe. Elle le reçut dès lors dans des déshabillés transparents "qui ne laissaient rien ignorer, nous dit M. de Grotz, du ventre qui avait porté le roi de Rome, de la gorge qui avait palpité à la chute de Paris et la croupe dont rêvait Napoléon à Saint-Hélène".
La duchesse ayant réussi dans son entreprise, le nouveau grand maître de la Cour de Parme vint régulièrement passer ses nuits auprès d'elle.
Le 17 février 1834, enfin, il l'épousait secrètement.
Le pauvre comte allait avoir, chaque nuit, une rude tâche à accomplir. Sans doute le devinait-il, car M. de Grotz affirme que le nouvel époux aurait confié à un ami :

- Il me faut honorer chaque nuit la veuve de Napoléon, la veuve de Neipperg, la fille de l'Empereur, l'archiduchesse d'Autriche, l'ex-impératrice des Français, la duchesse de Parme et enfin ma femme.

Ce qui, on en conviendra, était beaucoup pour un seul homme.

Malgré les ressources d'un tempérament auquel l'Histoire devait, un jour, rendre hommage, M. de Bombelles ne tarda pas à sembler nettement insuffisant à Marie-Louise.
Dès le matin, nous dit-on, alors que ce pauvre comte, exténué par sa nuit, dormait encore d'un sommeil lourd de tâcheron, l'ex-impératrice, l'oeil chaud et la lèvre humide, courait dans les couloirs à la recherche d'un bel officier...
Quand elle l'avait trouvé, elle l'entraînait dans une chambre écartée, et là, esclave des chromosomes impériaux d'Autriche, elle se faisait, suivant l'expression du temps, "reluire la péninsule"...

Naturellement, ces débordements ne tardèrent pas à être soupçonnés par M. de Bombelles qui chercha un moyen de calmer sa trop ardente épouse.
Un petit voyage à Ischl, en Autriche, lui parut salutaire.

- Vous irez prendre les eaux, dit-il à la duchesse. Je vous vois fatiguée, je crois que la cure vous fera grand bien.

Il lui conseilla, en outre, de boire ne abondance du petit lait de chèvre, ce breuvage passant alors pour un puissant sédatif propre à éteindre les démangeaisons amoureuses et les chaleurs déshonnêtes.
De plus, voulant être tout à fait tranquille, il prit prétexte "du danger que courait Marie-Louise au moment où les Carbonari menaçaient de mettre l'Europe à feu et à sang", pour décider qu'une garde se tiendrait en permanence "pendant tout le voyage et durant tout le séjour à Ischl", devant la chambre de la duchesse de Parme.
Enfin, M. de Bombelle fit recommander aux hommes qui allaient veiller à tour de rôle sur la vertu de sa femme "de ne laisser pénétrer aucun homme dans la chambre de la duchesse sous peine de prison."

Quelques jours plus tard, Marie-Louise, ayant posé un baiser chaste sur les lèvres de son mari, monta dans une berline et partit pour l'Autriche.
Le soir, elle fit halte dans une auberge et un garde, suivant les ordres reçus, vint s'installer devant sa porte.
Vers minuit, alors que ce brave garçon - un Tyrolien de vingt ans - somnolait, le nez sur son fusil, un léger bruit le fit sursauter. Il se retourna et vit avec stupéfaction, dans l'encadrement de la porte, Marie-Louise en chemise de nuit, qui, un doigt sur la bouche, lui faisait signe d'entrer.
Peu attiré par cette quinquagénaire légèrement fanée, le jeune Tyrolien hésitait à obéir.
- Viens, tu ne le regretteras pas, murmura la duchesse.
Pensant qu'il ne fallait rien négliger qui pût aider à sa carrière, le garde entra dans la chambre et fi courageusement ce qu'on lui demandait.
Une demi-heure plus tard, il ressortit fort essoufflé et alla chercher celui de ses camarades qui devait lui succéder devant la porte de la duchesse.

Naturellement, nous dit l'auteur de la Chronique scandaleuse, le second garde fut bientôt convié à continuer l'ouvrage commencé par son compagnon d'armes. Et le même manège se renouvela cinq fois jusqu'au matin, car il y avait cinq gardes..."
Le lendemain soir, les militaires, dont la rude virilité avait été fort appréciée, furent de nouveau - si j'ose dire - sur la brèche.
Dès le troisième soir, chacun avait ses habitudes, ses spécialités,et son surnom.
Aussi le séjour à Ischl fut-il un enchantement pour Marie-Louise. Comblée au-delà de toute espérance, elle ne cessait de bénir le Ciel de lui avoir donné un mari aussi attentionné.


Sa journée était admirablement réglée. Après une nuit en cinq actes, elle allait, fraîche et dispose, entendre la messe, puis elle prenait les eaux.
L'après-midi, elle se reposait un peu, faisait une promenade et écoutait de la musique. Le soir, enfin, elle allait, avant le dîner, boire un grand bol de lait de chèvre, sachant bien, par expérience, que ce breuvage n'avait sur elle aucun effet pernicieux...
Lorsqu'il vit rentrer Marie-Louise, calme, détendue, virginale, M. de Bombelles pensa qu'il avait eu bien raison de l'envoyer prendre les eaux d'Ischl.
Et, rassuré, il partit pour Tabiano où il projetait de créer une station balnéaire.

Demeurée seule, la duchesse chercha aussitôt à occuper ses loisirs d'une façon coupable.
Il y avait justement, à Parme, un jeune ténor français dont les dames disaient grand bien. Il s'appelait Jules Lecomte. C'était un bohème sympathique de trente ans, qui avait été successivement lieutenant de vaisseau, journaliste et romancier. En 1837, un incident était venu interrompre sa carrière de littérateur mondain. Poursuivi par la justice pour avoir signé une traite d'un nom d'emprunt, il avait dû s'expatrier rapidement. Réfugié à Liège, sans un sou, il s'était mis à chanter pour gagner sa vie. Doué d'une assez jolie voix de ténor, il avait rapidement conquis une belle notoriété. Quittant Liège, il s'était alors rendu à Munich, à Vienne, à Venise et, finalement, à Parme où il avait enthousiasmé les jolies Parmesanes.
Marie-Louise, fort alléchée par la réputation galante de Jules Lecomte, alla l'entendre un soir et en ressentit un vif trouble. "Tout aussitôt, écrit Max Billard, l'archiduchesse marqua l'élégant chanteur sur le carnet de ses désirs..."
"Elle le fit venir à la Cour, ajoute-t-il, l'obligea à chanter pour elle seule, doux et rude servage, car Marie-Louise avait du sang de Lucrèce Borgia."
Et quelques semaines plus tard, M. Souverain, éditeur parisien qui publiait les oeuvres de Jules Lecomte, reçut de son auteur en fuite l'admirable lettre suivante :


Oui, mon cher Souverain, votre nom fut bien dans cette affaire. - Je succède à Napoléon, vous ne vous en apercevez pas aux Tuileries, mais je m'en aperçois à Parme. J'ai chanté devant Marie-Louise ; elle m'a retenu à souper. Le souper dura toutes la nuit. Quand je me suis réveillé le matin, j'ai pu me figurer que j'étais l'empereur.
Ne soyez pas trop fier de votre romancier maritime. Si j'ai été à l'Abordage (titre d'un roman de Jules Lecomte) c'est comme ténor et non comme romancier. Cupidon dit : "Il faut avoir deux cordes à son arc..."


Pendant toute l'absence de M. de Bombelles, Jules Lecomte passa ses journées et ses nuits au palais ducal. Les chambellans lui parlaient à la troisième personne, affectant de s'adresser à un personnage titré :

- Monsieur "le comte" veut-il déjeuner ?
- Monsieur "le comte" veut-il un cheval ?

Finalement le ténor rentra à Paris en 1847 et se fit réhabiliter.
Cette aventure, qui causa le scandale que l'on devine à la Cour de Parme, fut la dernière qui compta dans la vie amoureuse de Marie-Louise.
L'ex-impératrice mourut le 18 décembre 1847 et si l'on ne grava pas sur sa tombe cette épitaphe proposée par Arsène Houssaye : "Ci-gît qui a commencé par un empereur et qui a fini par un ténor...", c'est que ce genre de chose ne s'écrit pas sur les plaques funéraires...

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MessageSujet: L'APRES NAPOLEON ...   NAPOLEON  ET LES FEMMES - Page 20 EmptyLun 4 Fév - 18:39

PARIS TOMBE AMOUREUX DE LA MAÎTRESSE DE FIESCHI



Tout Paris pour Nina avait les yeux du traître... - ALPHONSE KARR -



DEPUIS son mariage, M. Thiers vivait - dans une intimité qui faisait jaser - avec sa femme et sa belle-mère. Ils habitaient tous trois - M. Dosne avait sagement regagné, à Lille, sa recette générale des Finances - l'hôtel de la place Saint-Georges dont le petit Marseillais était devenu propriétaire. Les braves gens du quartier ne s gênaient pas pour plaisanter gaillardement sur cet étrange trio.
Dans un petit pamphlet paru en 1848, un auteur qui signe Hilaire Lajoie se fait l'écho des propos qui étaient alors tenus sur le futur libéraeur du territoire. Il fait parler deux habitantes de la rue Bréda. Ecoutons-les :

"Les deux personnages sont sur le pas de leurs portes :


- Regardez donc, madame Pattard, voilà le "petit" qui rentre chez lui. On ne l'aperçoit seulement pas dans sa voiture. Il a le nez à la hauteur de la vitre.
- On se demande, madame Fricoteaux, comment un homme pareil peut donner leur content à deux femmes en même temps...
- Ecoutez donc, on m'a dit qu'il couche de neuf heures à minuit avec sa belle-mère et de minuit à six heures avec sa femme... V'là les moeurs d'aujourd'hui...
- Moi, on m'a dit qu'ils dormaient tous les trois dans le même lit, et que tout se mélangeait comme dans une basse-cour...
- C'est-t-y Dieu possible ... Le pauvre petit, il doit lui arriver d'être étouffé sous ses deux femmes... C'est que Mme Dosne, retirez-lui son corset, elle doit tenir de la place dans un lit ...
- Heureusement que Mme Thiers à la corpulence d'une enfant...
- Tout de même. Obliger une fille de quinze ans à participer à des cochonneries pareilles. C'est t'honteux.
- A mon avis, c'est la mère la plus coupable. Lui, le "petit" c'est un homme, il en profite. Les hommes, c'est tous des cochons. Mais la mère ...
- Où ! comme disait l'autre jour M. Leplat, l'épicier, la mère, elle aurait bien donné sa deuxième fille au "petit" pour ne pas être abandonnée.
- Sa deuxième fille ? La petite Félicie qu'a pas dix ans ? C'est z'horrible. Mais qu'est-ce qu'il a donc, ce "petit"-là ?

A ce moment, le portier, qui les écoutait depuis un moment sans rien dire, intervient :

- Il paraît qu'il aurait ...

Il murmure quelque chose à l'oreille des deux femmes qui se redressent, vivement intéressées.

- Oh ! ...

Le portier fait alors les gestes d'un homme qui voudrait indiquer la longueur et la frosseur d'un énorme rat. Les deux femmes sont éblouies.
Mme Pattard (les yeux brillants). - Eh bien, monsieur Dulard, vous nous en contez de belles...
Mme Fricoteaux (la lèvre humide) - Oh ! vous, alors, monsieur Dulard...

Elles rentrent précipitamment chez elles. Mais, dans l'après-midi, elles allèrent toutes deux - sans se concerter - à l'hôtel Saint-Georges, demander si M. Thiers n'avait pas besoin d'une femme de chambre."

Tout ce dialogue est, bien entendu, de l'auteur du pamphlet, mais il résume certainement avec assez de fidélité l'opinion courante des braves gens de l'époque. Nous en trouvons d'ailleurs la confirmation dans ce petit poème de Mme de Girardin qui circulait alors dans les salons du faubourg Saint-Germain :

Le père fut crédule et très honnêtement
La mère a marié sa fille à son amant,
Et l'enfant fut vendu sans trop de résistance.
Tous trois mènent en paix une grande existence,
Ils s'aiment à loisir et le monde enchanté
Bénit de leur union l'heureuse Trinité..
.


Mais les Parisiens allaient avoir bientôt des sujets de conversation beaucoup moins frivoles.
Le 28 juillet 1835, alors que, pour le cinquième anniversaire des Trois Glorieuses, il allait passer en revue la garde nationale, Louis-Philippe faillit être tué, sur le boulevard du Temple, par la machine infernale de Fieschi. L'attentat, qui fit seize victimes, dont le vieux maréchal Mortier, bouleversa les braves gens. Des groupes allèrent pousser des cris de mort autour de la prison où était détenu le régicide. On exigeait un châtiment d'une cruauté exceptionnelle. Certains journalistes réclamaient l'écartèlement.
Vint le procès, et tout changea par le miracle d'une présence féminine.
Joseph Fieschi, après avoir vécu longtemps avec une certaine Laurence Petit, qui avait été mariée à un fonctionnaire des douanes nommé Lassave, était devenu l'amant de la fille de sa maîtresse.
Cette demoiselle, une appétissante brune de dix-huit ans, avait une croupe bien dessinée, un sourire ravissant et une poitrine turbulente qui faisaient oublier qu'elle était borgne.
Lorsqu'elle apparu à la barre des témoins, toute la salle fut troublée.

"Elle portait une robe de taffetas vert échancrée, sous un élégant carrick écossais, un chapeau cabriolet aux longues brides, une écharpe de soie.
Les jeunes pairs se levèrent de leurs bancs pour la voir ; les plus âgés même se tournèrent vers la tribune où la jeune femme s'installait. Ce n'était plus la provinciale timide, épouvantée du drame dont elle se sentait un des acteurs involontaires, la malheureuse abandonnée, acculée au suicide, c'était une grande vedette de l'actualité."

Nina s'assit, promena un regard souverain sur l'assistance et répondit par un signe d'amitié au baiser que li envoya Fieschi...
Dès lors, le public sembla se désintéresser du principal acteur au profit de la jeune femme. Les journaux en firent une héroïne, un ange de pureté, l'incarnation même du devoir et de la vertu. On parla de son âme, "grande et belle", de sa peau blanche, de sa grâce gamine et de son élégance...
Bref, tout Paris pour Nina avait les yeux de Fieschi... On la chanta au coin des rues :

Il ne faut en des jours contraires
Avec tes charmes, tes attraits,
Que tes grâces simple, légères,
Du sort pour repousser les traits !

Nina courage,
Ris des méchants,
Après l'orage
Vient le beau temps !


Finalement, Fieschi fut guillotiné avec ses complices, le 20 février 1836, et les braves gens pleurèrent en pensant au chagrin que devait éprouver Nina...
Quelques jours plus tard, le propriétaire du café de la Renaissance, place de la Bourse, engagea la jeune femme comme caissière. Dès lors tout Paris défila dans l'établissement. Il fallut bientôt distribuer des tickets et organiser un service d'ordre tant la foule des admirateurs était grande. Finalement, le patron du café, en commerçant avisé, fit payer un franc le droit d'approcher l'idole des jeunes de 1836...
Et, les choses étant ce qu'elles sont, il fit fortune..
.
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MessageSujet: L'APRES NAPOLEON ...   NAPOLEON  ET LES FEMMES - Page 20 EmptyLun 4 Fév - 19:11

En février 1836, les Français apprirent un beau matin que le roi venait d'offrir la présidence du Conseil à Adolphe Thiers.
Le communiqué précisait que le nouveau chef du gouvernement, abandonnant son portefeuille de l'Intérieur, serait également ministre des Affaires étrangères.
La nouvelle stupéfia le faubourg Saint-Germain.
On se demanda pourquoi le petit Marseillais, qui s'était surtout fait connaître par des discours verbeux, une activité de policier et un goût prononcé pour les jeux parlementaires, avait réclamé ce poste clé de la haute politique.

- Sans doute, disaient gravement ceux qui voulaient paraître renseignés, a-t-il de secrets projet d'alliance...

D'autres allaient jusqu'à affirmer que M. Thiers avait exigé le portefeuille des Affaires étrangères pour imposer à l'Europe une conception révolutionnaire de la "cohabitation"...
Naturellement, tout le monde se trompait.


Les raisons qui avaient poussé le nouveau président à réclamer ce ministère étaient d'ordre purement domestique. Depuis longtemps, Mme Dosne se plaignait de la vulgarité des personnages que M. Thiers était obligé d'inviter à dîner au titre de ministre de l'Intérieur : parlementaires mal dégrossis, préfets d'une distinction douteuse, policiers, etc.

- Je ne veux plus de ces gens mal élevés dans mon salon, disait-elle. Il faut que tu aies un ministère plus distingué. Je veux recevoir ici des ambassadeurs, des diplomates, des aristocrates, et non plus de ces rustres qui salissent mes tapis, renversent leur café à table et vous postillonnent à la figure.

Aussi, lorsque Louis-Philippe avait offert la présidence du Conseil à Adolphe, Mme Dosne était-elle intervenue :

- Accepte, à une condition : que tu puisses prendre les Affaires étrangères !

Et c'est ainsi que, pour donner à une petite bourgeoise ambitieuse, la satisfaction de recevoir dans son salon des messieurs "ayant de belles manières", Adolphe occupa un fauteuil ministériel que les souverains étrangers considéraient comme l'un des plus importants d'Europe...


La joie de Mme Dosne, en apprenant que sa fille, M. Thiers et elle allaient pouvoir commander à des diplomates de la valeur de M. de Saint-Aulaire, notre ambassadeur à Vienne, fut immense, on le conçoit aisément.
Tout de suite, elle rêva de jouer un rôle capital.
Durant l'été de 1836, le destin sembla vouloir lui fournir l'occasion qu'elle cherchait.
Un soir, Thiers revint à l'hôtel Saint-Georges, porteur d'une grande nouvelle :

- Sophie ! cria-t-il, le roi veut marier le duc d'Orléans.

Mme Dosne commença par frémir d'aise à la pensée qu'elle était mise dans le secret des rois ; puis elle posa des questions. Le président du Conseil lui expliqua que Louis-Philippe, dans le but de se rapprocher des cours européennes qui demeuraient attachées aux Bourbons et le traitaient un peu en usurpateur, voulait au plus vite faire entrer son fils dans une famille de souverains "légitimes".
Aussitôt, Mme Dosne rêva d'imiter Mme de Pompadour qui avait aidé jadis à un rapprochement franco-autrichien.

- Il faut, dit-elle, marier le duc d'Orléans avec une archiduchesse d'Autriche. Quelle gloire pour toi si tu réussis cette alliance ! Les légitimistes te remercieront en pensant à Marie-Antoinette et les bonapartistes verront un hommage rendu à Marie-Louise.
Quelques jours plus tard, Thiers se mit en relation avec Metternich, crut comprendre que le ministre autrichien était favorable à un mariage franco-autrichien et annonça au roi que le duc d'Orléans n'avait qu'à se rendre à Vienne pour y demander la main de l'archiduchesse Thérèse, fille de l'archiduc Charles.


Ravi, le jeune duc, accompagné du duc de Nemours, partit pour la capitale autrichienne et, croyant l'affaire conclue, fit présenter sa demande en mariage.
Le pauvre devait subir ce jour-là le plus grand affront de sa vie, car Metternich, ayant écouté poliment notre ambassadeur, se contenta de lui répondre sur un ton amusé, mais catégorique :

- Non !

Le lendemain, la France était la risée de toutes les cours d'Europe, à cause d'une ancienne marchande de draps qui voulait jouer les éminences roses...
Cet échec fut terrible pour Mme Dosne qui faillit avoir une crise de nerfs. Il fut plus terrible encore pour Thiers qui dut démissionner le 25 août après avoir eu le pouvoir pendant six mois.


Le roi fit alors appel à Molé qui constitua un ministère avec Guizot comme principal collaborateur.
Le règne de Mme Dosne était fini pour un moment. Celui de la princesse de Lieven, maîtresse de Guizot, commençait.
Vexé, Thiers s'enferma dans son hôtel, et, pour se consoler, devint l'amant de sa belle-soeur, Félicie Dosne, tout en continuant à honorer son épouse et sa belle-mère.

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MessageSujet: L'APRES NAPOLEON ...   NAPOLEON  ET LES FEMMES - Page 20 EmptyJeu 7 Fév - 18:39

Situation assez compliquée qui inspira à un chansonnier de l'époque ces amusants couplets :

(Air : Compère Guilleri)

Il est un petit homme
Qu s'appell' Monsieur Thiers,
Carabière.
Il est haut comm' trois pommes,
Mais c'est un fier amant,
Cependant,
Puisque dans son lit
Trois femm's avec lui
Couch'nt, dit-on, chaque nuit.
Ah ! Monsieur Thiers (bis)
Quelle est donc votre moitié ?


La première est sa femme,
(Il pourrait êtr' son père,
Carabère)
La s'conde un' bien bell' dame,
Se trouve êtr' sauf erreur
Sa bell' -soeur.
Tous trois sont ravis
Quand ils sont au lit.
- Qell' bell' famille unie !
Ah ! Monsieur Thiers (bis)
Quelle est donc votre moitié ?
Mais celle qu'il préfère


- D'après ce que l'on dit,
Carabi -
C'est encore sa bell' mère
Quel gendre affectueux
Et fougueux !
Brave petit coeur,
Il fait le bonheur
D'un' mèr' et de deux soeurs.
Ah ! Monsieur Thiers (bis)
Quelle est donc votre moitié ?
" - Mais, direz-vous : Et l'père ?
Plaît-il à Monsieur Thiers
Carabière ?
Le chien et le p'tit frère
Ont-ils aussi l'honneur
Des faveurs
De ce chaud lapin ?"
Personn' n'en sait rien.
... Jusqu'à maint'nant du moins.
Ah ! Monsieur Thiers (bis)
Quelle est donc votre moitié ?


Le savait-il lui même ?

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MessageSujet: L'APRES NAPOLEON ...   NAPOLEON  ET LES FEMMES - Page 20 EmptyJeu 7 Fév - 19:02

Mme DOSNE VEUT "SA" GUERRE


Plus que les hommes, les femmes ont le goût de la propriété... - BALZAC -


LE 30 mai 1837, Mme Dosne, ayant formellement interdit à son gendre et à ses filles de se montrer dans Paris, s'alla coucher avec une grosse migraine.
Ce malaise n'était pas dû aux malignités d'un printemps trop tendre, ni à quelque frasque de M. Thiers, mais un mariage. Ce jour là, en effet, le duc d'Orléans épousait la princesse Hélène de Mecklembourg-Schwerin (quel nom compliqué, c'est tout juste si mes doigts arrivent à le lire... tongue ).
Tandis que les cloches de la capitale sonnaient à toute volée, l'édredon de Mme Dosne était agité par des sanglots convulsifs. Enfouie au fond de son oreiller, l'infortunée Sophie pleurait en pensant que tous ces carillons célébraient son échec.
Vers le soir, elle se fit servir une tasse de bouillon gras mêlé de vin rouge, s'en trouva ragaillardie et appela sa femme de chambre :

- Demandez à M. Thiers, à Mme Thiers et à Mlle Félicie de venir me voir.


Lorsque toute la tribu fut réunie au pied de son lit, Mme Dosne parla :

- Il ne faut pas rester plus longtemps à Paris. Nos adversaires seraient trop heureux de nous donner le spectacle de leur victoire. Nous allons partir faire un grand voyage en Italie. Vous, Adolphe, qui vous intéressez aux arts, vous pourrez visiter des musées, et vous, mes filles, vous vous instruirez...


Après quoi, elle congédia Mme Thiers et Félicie.
Lorsque les deux soeurs eurent disparu, Mme Dosne à qui l'idée de voir Naples et le Vésuve avait donné un picotement à l'endroit de sa vertu, se mit à ronronner en prononçant le prénom de M. Thiers.
Sans dire un mot, le petit Marseillais se déshabilla rapidement et bondit dans le lit. Quelques instants plus tard, il y montrait cette agitation frénétique qui caractérisait tous ses actes.
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MessageSujet: L'APRES NAPOLEON ...   NAPOLEON  ET LES FEMMES - Page 20 EmptyJeu 7 Fév - 19:33

La famille Thiers-Dosne vécut quatre mois fort agréables en Italie. Puis, elle alla passer un mois à Valençay, chez M. de Talleyrand et trois semaines en Belgique, après avoir fait un détour par Lille pour y embrasser M. Dosne. (Quelle délicate attention, c'est mimi tout plein... geek )

Il était juste que le brave homme eût, lui aussi, de temps en temps, le plaisir de tenir M. Thiers dans ses bras. .... Razz
Enfin, au début de 1838, le quatuor, ayant réintégré l'hôtel de la place Saint-Georges, commença à mener une lutte sans merci contre le gouvernement.
Cette lutte était dirigée, naturellement, par Mme Dosne qui rêvait de régner de nouveau sur la France. Sona ction était si peu cachée que les journalistes la prenaient à partie au même titre qu'un personnage politique officiel. Balzac lui-même écrivait dans la Revue Parisienne :


"La conspiration est menée à ciel ouvert, en plein jour, menée surtout par la "bonne" de M. Thiers. Comme je vous l'ai dit : dux femina facti... Vous ne sauriez croire jusqu'où a été poussée la ruse méridionale de ce dernier unit à la finesse de cette bourgeoise."

Etre appelée la "bonne" de M. Thiers ne fit point plaisir à Mme Dosne qui voua dès lors une haine féroce au romancier.
Elle fut encore plus furieuse lorsqu'elle apprit que la mère d'Adolphe - sans que les domestiques avaient l'ordre de ne laisser entrer à l'hôtel Saint-Georges - l'appelait "Madame la Coquine". On colportait d'ailleurs de nombreux mots prononcés par la vieille Mme Thiers. Délaissée, presque sans ressources, la malheureuse vivait dans un petit entresol misérable, à deux pas de l'habitation somptueuse de son fils. Un jour que quelqu'un parlait devant elle de l'intégrité de Thiers, elle éclata de rire :

- De l'intégrité, Adolphe ?... Ecoutez-moi bien : ceux qui le laisseraient monter derrière leur voiture, vous entendez, derrière, seraient sûrs de le voir bien vite prendre leur place à l'intérieur...


L'arrivisme forcené du petit Marseillais était, il faut bien le reconnaître, l'objet d'un mépris général. Un soir, Thiers, bombant le torse et se dressant sur ses minuscules bottines, dit à Armand Carrel :

- Je sais ce qui m'attend. Je mourrai d'un coup de couteau dans la rue ou sur l'échafaud.
- Vous, mon petit Thiers, vous ne mourrez jamais que d'un coup de pied dans le c..

Toutes ces histoires, complaisamment rapportées par la presse, exaspéraient Mme Dosne. Mais il en est une qui lui causa un début de jaunisse : un journal assura qu'au cours d'une orgie à Grandvaux, chez le comte de Vigier, M. Thiers, ayant ouvert la fenêtre, s'était amusé à montrer aux passants son derrière entre deux bougies...
Adolphe eut beau protester de son innocence, Mme Dosne - qui connaissait le goût de son amant pour l'exhibitionnisme - conserva dans son coeur un doute atroce
Mais Thiers et sa terrible égérie finirent par avoir raison de leurs adversaires. Après deux ans de lutte épique, le 1er mars 1840, Louis-Philippe rappela au pouvoir son "petit président"...
Immédiatement, celui-ci entra en rapport avec les grands leaders des partis. Tous lui tournèrent le dos. Finalement, il s'adressa à des parlementaires de second ordre et forma ce que les journalistes baptisèrent "un ministère de gens de maison".

Alphonse Karr - car le destin toujours ironique avait choisi comme adversaire attitré de M. Thiers, un polémiste nommé . Karr - publia dans son journal les commentaires suivants :

"Le 1er mars 1840, une ordonnance du roi, insérée au Moniteur, apprit à la France qu'elle était gouvernée par un nouveau ministère dont voici la composition :
"Présidence du Conseil et ministère des Affaires étrangères : M. Thiers.
"Ministère de la Guerre : M. Thiers, sous le nom de M. de Cubières.
"Ministère des Travaux publics :M. Thiers, sous le nom de M. Jaubert.
"Ministère des Finances : M. Thiers, sous le nom de M. Pelet de la Lozère.
"Ministère de la Marine : M. Thiers, sous le nom de M. Roussin.
"Ministère de l'Intérieur : M. Thiers, sous le nom de M. de Rémusat.
"Ministère de la Justice et des Cultes : M. Thiers, sous le nom de M. Vivien.
"Ministère du Commerce : M. Thiers, sous le pseudonyme ridicule de M. Gouin."
[i]
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MessageSujet: L'APRES NAPOLEON ...   NAPOLEON  ET LES FEMMES - Page 20 EmptyJeu 7 Fév - 19:45

Réinstallé dans son fauteuil présidentiel, Thiers se crut tout permis. Pour commencer, lui qui avait déjà trois femmes à satisfaire, il prit une maîtresse. Chaque semaine, à heure fixe, il allait passer un moment avec elle dans un petit appartement de la rue de Vaugirard. Naturellement, le roi ne tarda pas à être mis au courant de cette liaison par sa police personnelle ; et, un jour que M. Thiers était attendu aux Tuileries, Louis-Philippe dit en riant à M. de Maleville :

- Il est rue de Vaugirard, tel numéro. Allez donc l'arracher de là-bas.

Maleville sauta dans une voiture et se fit conduire à l'adresse indiquée. Là, fort embarrassé, car il ne connaissait pas le nom de la dame chez qui se trouvait le président du Conseil, il se mit à crier :

- Adolphe ! Adolphe !

Au troisième étage, une fenêtre s'entrouvrit et Thiers, complètement nu, se pencha :

- Je descends, dit-il.

Une demi heure plus tard, il se présentait aux Tuileries.


- M. le président du Conseil, vous êtes en retard, lui dit le roi..

M. Thiers baissa la tête :

- Je fais mes excuses à Votre Majesté, mais je me préparais.

Louis-Philippe éclata de rire :

- Alors, je regrette de vous avoir dérangé dans vos préparatifs !


Pendant des mois, l'expression "être dans ses préparatifs" désigna à Paris la plus savoureuse des occupations.
Tout le monde en usa, sauf Mme Dosne qui était d'un naturel pincé
.
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MessageSujet: L'APRES NAPOLEON ...   NAPOLEON  ET LES FEMMES - Page 20 EmptyJeu 7 Fév - 20:34

L'incident de la rue de Vaugirard ne fut point commenté à l'hôtel Saint-Georges.
"Mme Dosne, nous dit Didier Saintyves se contenta d'y faire une allusion habile afin que M. Thiers sût bien que l'on était instruit de son inconduite et que l'on fermait volontairement les yeux"

La chose se passa au cours d'un dîner auquel assistait un ancien officier de l'Empire qui ne tarissait pas sur les mérites et qualités de Napoléon. Mme Dosne en profita bientôt pour établir un parallèle entre le petit Corse et son petit Marseillais.

- Il avait l'éloquence naturelle des hommes du Midi, déclara l'ancien hussard.
- Comme M. Thiers, dit doucement Mme Dosne.
- Il avait un accent chantant !
Mme Dosne sourit :
- Comme M. Thiers !
- Il était d'une grande frugalité !
Mme Dosne fit un geste de la main :
- Comme M. Thiers !
- Il se faisait suivre partout d'un lit de sangles !
Mme Dosne cligna de l'oeil :
- Comme M. Thiers !
- Il adorait les chevaux !
Mme Dosne soupira :
- Comme M. Thiers !
Un peu agacé, le convive lança alors :
- Il avait une maîtresse ignorée, rue d'Haute-ville !
Alors Mme Dosne dit simplement :
- Est-ce loin de la rue de Vaugirard ?

M. Thiers, rouge comme une pivoine, manqua de s'étrangler et, lui qui, l'instant d'avant, eût désiré que le dialogue entre sa maîtresse et son invité ne s'arrêtât jamais, s'empressa de changer de conversation...
Mme Dosne ne fit point d'autres remarques, sachant bien en femme rusée, qu'elle venait, par une phrase, d'accroître sa puissance et son prestige.
Dès lors, subjuguant le petit Adolphe qui avait tant à se faire pardonner, Sophie tint complètement les rênes du gouvernement.

"Le pouvoir d cette femme est immense, écrit alors Balzac. En mainte occasion, Mme Dosne a fait revenir M. Thiers sur une décision. Aujourd'hui quand, après son dîner, il reçoit un ambassadeur et qu'il s'endort, elle reste à trois pas, le surveille et répond pour lui..."

Tous les matins, le président du Conseil se rendait dans la chambre de Mme Dosne avec des projets de discours, des brouillons de rapports, des dossiers confidentiels, des dépêches diplomatiques, et soumettait le tout à sa maîtresse.
La fille du marchand de draps donnait alors son avis, faisait biffer un mot, suggérait une réponse à un ambassadeur, rayait un nom sur une liste de nominations, ou modifiait le sens d'un discours.
Complètement soumis aux ordres de cette maîtresse femme, qui lui faisait refuser le soir ce qu'il avait promis le matin, Thiers ne tarda pas à mécontenter un nombre considérable de gens qui le tinrent pour une girouette ou un paltoquet.

Cette attitude légère faillit lui valoir un jour le coup de pieds au derrière que lui avait annoncé Armand Carrel.
Ecoutons le chevalier de Cussy :

"Losque le roi chargea M. Thiers de former son ministère, cet homme d'Etat vint, le soir même, causer de cette circonstance avec le général Jacqueminot et lui demander des conseils. Le général, qui connaît beaucoup M. Thiers, et dont le langage, rude mais sincère, est une conséquence de son caractère énergique et ardent, le détourna d'accepter cette mission ou, du moins, de ne point prendre, dans le ministère, la situation du président du Conseil et de ministre des Affaires étrangères. Il lui donna, pour motiver ces conseils, trois raisons majeures qu'il lui exposa ainsi :

"- A tort, j'en suis convaincu, et c'est pour cela que je suis votre ami, l'opinion publique vous a accusé de n'être pas sorti les mains nettes de votre poste de secrétaire d'Etat aux Finances sous le ministère Laffitte.Voilà la première raison ; passons à la seconde ...
" A tort ou a raison - c'est ce que je ne cherche pas à approfondir - l'opinion publique vous accuse encore d'avoir été et d'être toujours l'amant de votre belle-mère... Ne trouvez-vous pas que se sont là deux choses qui doivent nuire à votre dignité et qui vous empêchent d'être, auprès du corps diplomatique, l'homme pur qui doit être l'organe de la France envers les nations étrangères auxquelles, déjà, vos opinions politiques connues n'inspirent pas beaucoup de confiance ?
"Enfin, permettez-moi de vous le dire, au milieu de ces ambassadeurs, de ces envoyés de l'Europe appartenant tous à l'aristocratie nobiliaire de leur pays, il faudrait tau moins, vous "le Démocrate", avoir un extérieur digne, imposant austère. Or, en vérité, l'exiguïté de votre taille s'y oppose. Vous pouvez être un excellent ministre de l'Intérieur, mais vous ne sauriez être, convenablement et dans l'intérêt de notre patrie, un président du Conseil des ministres, ni un ministre des Affaires étrangères.
"Après quelques minutes de silence, M. Thiers dit au général qu'il se rendait à ces raisons, et, sans ajouter le moindre commentaire, il quitta le général vers deux heures du matin, lui disant qu'il ne refuserait pas au roi son concours, qu'il remplirait la mission que Sa Majesté lui avait donnée de former un nouveau ministère, mais qu'il n'y entrerait pas, ou du moins qu'il n'y serait - c'était bien convenu - ni président, ni ministre des Affaires étrangères..."

Le général Jacqueminot lui promit alors, sur sa demande, de se rendre chez lui vers sept heures du matin pour travailler ensemble à la composition du ministère en formation.


"Fidèle à sa parole, le général Jacqueminot était, en effet, chez M. Thiers à 7 heures du matin. Il trouva Mme Dosne dans le cabinet de son gendre, et celui-ci lui déclara aussitôt et à sa grande stupéfaction, que son ministère était composé et qu'il en ferait partie comme président du Conseil, chargé du portefeuille des Affaires étrangères.

" - Ce n'était pas la peine de me faire déranger aussi tôt, dit le général, après les promesses qu'il n'y a pas cinq heures vous m'avez faites et sur lesquelles vous m'avez quitté cette nuit, après quatre heures de conversation...

"Et là-dessus, le général Jacqueminot, fort en colère, prit son chapeau et sortit de l'appartement.


"Dans la Chambre des Députés, à la séance de ce jour, M. Thiers et le général Jacqueminot faisaient partie du même bureau. En arrivant au comité, le général trouva, déjà établi, M. Thiers, lequel eut l'air de ne pas remarquer l'entrée de son collègue. Le général dissimula son mécontentement, mais, à la fin de la séance, il dit :
" - Thiers, j'ai un mot à vous dire.
" Et ensemble, ils quittèrent la Chambre se dirigeant vers la place de la Concorde... Le général rompit le premier le silence qui durait depuis la sortie du Palais-Bourbon :
" - Ce matin, monsieur, dit-il à M. Thiers, j'ai eu lieu d'être étonné de votre légèreté en me laissant arriver chez vous, après ce dont nous étions convenus quelques heures auparavant, uniquement pour m'apprendre que vous agissiez tout autrement que vous ne vous étiez engagé avec moi à le faire. Je vous ai montré mon mécontentement en abandonnant la place à Mme votre belle-mère dont, en cette circonstance, vous avez écouté les avis mieux que les miens ; mais ce juste mécontentement que j'ai laissé percer n'autorisait nullement de votre part l'impolitesse dont vous vous êtes rendu coupable envers moi en ne me saluant pas quand je suis rentré dans le bureau et quand moi, monsieur, je vous faisais l'honneur de vous saluer. Et bien ! monsieur, je veux bien, cette fois-ci, me borner à un avis dont je vous engage à profiter. Je n'ai jamais toléré aucune impertinence envers moi. Si le roi, si un prince de la famille royale, si mon père, oui monsieur, si mon père affectait de ne pas répondre à mon salut, je ne le reverrais de ma vie ; mais toute autre personne - fût-ce vous, monsieur - qui agirait ainsi, je lui donnerais publiquement de mon pied dans le derrière...
"M. Thiers, me dit enfin le général Jacqueminot, se rejeta sur sa mauvaise vue, sur un moment de préoccupation, de distraction, et me dit que je prenais bien au vif une chose fort insignifiante. Il affecta d'un ton d'abandon et d'enjouement avec moi, me quitta en me tendant une main que je ne pris pas et, depuis, il n'a plus omis de me saluer.
"
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MessageSujet: L'APRES NAPOLEON ...   NAPOLEON  ET LES FEMMES - Page 20 EmptyVen 8 Fév - 15:06

M. Thiers allait avoir bientôt des ennuis plus importants.
Depuis quelque temps, le pacha d'Egypte, Méhémet Ali, protégé par la France, était en lutte contre le sultan Mahmoud, soutenu par l'Angleterre.
Au printemps 1840, Londres et Vienne, craignant de voir la Russie profiter de ce conflit pour occuper Constantinople, proposèrent à la France une intervention collective en vue de régler le différend turco-égyptien. Louis-Philippe accepta.
Malheureusement l'entente se révéla difficile à établir. Suivre l'Angleterre, c'était se montrer hostile au pacha notre ami et ameuter l'opinion française contre le gouvernement ; et soutenir Méhémet, c'était soulever l'animosité de l'Angleterre et de l'Europe contre la France.


Fort embarrassés, M. Thiers et Mme Dosne palabraient des heures entières sans parvenir à prendre de décision.
C'est alors que Palmerston, brusquant les choses, provoqua, le 15 juillet, la signature d'un traité à quatre stipulant que l'Angleterre, la Prusse, l'Autriche et la Russie étaient unies pour soutenir le sultan contre le pacha.
Cette nouvelle provoqua en France une grande émotion. Le peuple qui était resté bonapartiste estima qu'il fallait profiter de cette "trahison" pour venger l'empereur...
La bourgeoisie, animée du même esprit belliqueux, criait : "Ce traité est une insolence !".

Mme Dosne huma ce vent de colère d'une narine frémissante et comprit qu'il y avait là une occasion inespérée de donner à son cher Adolphe une popularité nationale...
Elle appela M. Thiers, lui exposa son plant, lui tint le langage de l'ambition et l'incita à déclarer la guerre à l'Angleterre.
Le président du Conseil tenta de rétorquer que le roi était farouchement pour la paix. Mme Dosne, qui voyait déjà son amant jouer les Napoléon, caracoler sur un cheval blanc et s'installer aux Tuileries au milieu d'une foule en délire, ne voulut rien entendre :

- Tu dois faire la guerre !


Cette fois, Thiers fronça les sourcils, prit un air terrible et partit en trottinant vers son cabinet présidentiel. Quelques heures plus tard, il ordonnait le rappel des quatre dernières classes, la création de régiments et la construction d'une chaîne de forts autour de Paris.
Pendant un mois le pays tout entier, excité par une presse aux ordres du gouvernement, ne rêva que plaies et bosses. Et Alphonse Karr, avec sa lucidité habituelle, écrivait :

"M. Thiers joue le sort de la France à pile ou face, et la pièce est en l'air !"

Cette pièce, Alphonse Karr ignorait que c'était Mme Dosne qui l'avait lancée...

Le 2 octobre Paris apprit avec stupeur que Méhémet Ali, - que l'on croyait invincible - avait été écrasée par la flotte britannique.
Mme Dosne entra alors en transes :

- Il n'y a plus un moment à perdre, il faut décider le roi à la guerre.

M. Thiers, voulant mettre Louis-Philippe devant le fait accompli, commença par décider l'envoi dans la Méditerranée de la flotte de l'amiral Duperré, convoqua les Chambres et prépara un manifeste à l'Europe.
Le 4, le roi, agacé par la turbulence belliqueuse du petit Marseillais, prit la parole et s'opposa formellement à l'envoi du manifeste.
Pendant treize jours, Thiers, poussé par Mme Dosne, usa de toute son éloquence et de toute sa ruse de phocéen-levantin, pour amener Louis-Philippe à déclarer la guerre.
Le roi fut inflexible.
Le 17, il dit à Thiers :

- Humilier la France, mon cher ministre, ce sont des paroles de journaux... Vous ne savez pas ce que c'est que ce pays ; il ne veut pas la guerre au fond, et si nous l'entreprenions, nous serions tous perdus : vous, moi, mes fils, ma famille, ma femme, votre femme, votre belle-mère...
A ces mots, Thiers baissa la tête, fort gêné.
Onze jours plus tard, il était contraint d'abandonner le pouvoir pour trente ans
!
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MessageSujet: L'APRES NAPOLEON ...   NAPOLEON  ET LES FEMMES - Page 20 EmptyVen 8 Fév - 15:11

La France, grâce à la sagesse de son roi, avait échappé à la guerre. Mais le bellicisme de Mme Dosne devait avoir un jour les plus funestes conséquences.
Les cliquetis d'armes qui avaient retenti en France pendant trois mois, et les discours hystériques de M. Thiers avaient fortement inquiété l'Allemagne. Au point que Henri Heine put écrire, un peu plus tard : "Le bruyant tambourinage de Thiers a réveillé de son sommeil léthargique notre bonne Allemagne... Il battait si fort la diane que nous ne pouvions plus nous rendormir et que, depuis, nous sommes restés sur pied ! ...

C'est donc peut-être un peu à cause de Mme Dosne, maîtresse ambitieuse de M. Thiers, que nous avons eu la guerre de 1870, laquelle devait engendrer celles de 1914 et de 1939...
Ce qui est beaucoup pour une seule femme ! .
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MessageSujet: L'APRES NAPOLEON ...   NAPOLEON  ET LES FEMMES - Page 20 EmptyVen 8 Fév - 16:50

LA CHAMBRE DES PAIRS CONDAMNE LOUIS-NAPOLEON A LA CHASTETE



La chasteté est un trésor précieux que nous portons dans des vases d'argile... - L'ECCLESIASTE -



A la fin de juillet 1840, dans un estaminet enfumé des docks de Londres, le capitaine du cargo La Ville d'Edimbourg reçut la visite d'un élégant personnage qui lui tint ces étranges propos :

- Je suis chargé par quelques amis d'organiser un petit voyage sur les côtes d'Allemagne. A vrai dire, nous n'avons aucun but précis et, poussés par notre seule fantaisie, peut-être aurons-nous le désir d'aller jusqu'à Hambourg. Pourriez-vous nous prendre à votre bord ? Nous serions une soixantaine.

Le capitaine tira sur sa pipe et répondit que, son bateau étant destiné à transporter indifféremment des passagers ou des marchandises, la chose paraissait possible.

- Seulement, ajouta le dandy, mes amis et moi-même sommes des originaux. Lorsque nous voyageons, nous aimons nous entourer de mystère. Aussi devrez-vous consentir à ignorer d'où nous venons, où nous allons, et même jusqu'à notre identité... Notre goût de l'aventure peut également nous conduire à vous demander de changer de route pendant le voyage. Ce genre de caprice ne devra pas non plus vous étonner. J'ajoute que, bien entendu, votre prix sera le nôtre.

Le capitaine pensa que la terre était peuplée d'hurluberlus, accepta les curieuses conditions posées par son client et se déclara prêt à partir pour l'inconnu.
Le 5 août au soir, les mystérieux passagers montèrent à bord de la Ville d'Edimbourg. Ils formaient une troupe étrange. Certains avaient fort belle allure, mais la majorité était constituée de personnage misérables, portant des vêtements râpés et des chaussures éculées. A leur suite, des bagages stupéfiants furent embarqués.
Ces touristes, décidément fort originaux, emmenaient, en effet, avec eux des ballots de vivres, une calèche, un gros paquet de prospectus et, enfermé dans une cage, un aigle à moitié déplulmé...
A 8 heures, on leva l'ancre. Vers 3 heures du matin l'homme qui avait loué le bateau alla trouver le capitaine :

- Un de nos amis a manqué le départ. Arrêtez-vous à l'embouchure de la Tamise. Il viendra nous rejoindre en canot.

Le capitaine fit arrêter son navire à l'endroit indiqué et attendit. Bientôt, un clapotis d'avirons se fit entendre. On descendit l'échelle et un homme monta à bord. Il semblait jouir d'un prestige considérable auprès des autres passager.
Petit, l'oeil vague, portant un chapeau rond, il n'avait pourtant aucune des caractéristiques d'un chef.
Discret, le capitaine ne posa aucune question et mit le cap sur l'Allemagne.
Dans la matinée, le dandy vint le retrouver :

- Comme il fallait s'y attendre, dit-il d'un ton enjoué, nous venons de décider, avec mes amis de changer de destination. Nous voulons mouiller devant Wimereux près de Boulogne.

Sans rien dire, le capitaine changea de direction.


Quelques heures plus tard, comme il traversait le pont, un spectacle inattendu vint troubler son flegme : les soixante passagers à moitié nus étaient en train de revêtir des uniformes.
Toujours discret, il rejoignit sa cabine sans demander d'explications, pensant que des gens aussi singuliers pouvaient parfaitement éprouver le besoin de se travestir en pleine mer.
Devant Wimereux, le petit personnage à l'oeil vague qui portait maintenant l'uniforme de colonel d'artillerie, fit mettre les canots à la mer.

- Nous allons faire un petit tour à terre, dit-il.

En quatre voyages, les soixante passagers, empêtrés de leur équipement et de leurs fusils, furent sur une plage. L'un d'eux, portait accroché à ses épaulette, l'aigle solidement ficelé.
Alors l'homme à l'uniforme de colonel prit la parole :

- Mes amis. Nous voici en France. Il nous reste à prendre Boulogne. Une fois ce point enlevé, notre succès est certain... Si je suis secondé comme on me l'a fait espérer, dans quelques jours nous serons à Paris. Et l'Histoire dira que c'est avec une poignée de braves tels que vous que j'ai accompli cette grande et glorieuse entreprise.

A quelques kilomètres de là, les habitants de Boulogne préparaient leur café matinal sans se douter que le prince Louis Bonaparte, fils de la reine Hortense et neveu de l'empereur, venait de débarquer sur une page en compagnie de soixante fidèles animés par l'espoir insensé de prendre le pouvoir.

Après quelques pourparlers avec les douaniers, la petite troupe de conspirateurs se dirigea vers Boulogne et pénétra dans une caserne. Deux hommes de corvée qui nettoyaient la cour les saluèrent et continuèrent leurs bas travaux. Voulant s'en faire des alliés, Louis Bonaparte, nomme le premier lieutenant et décora le second de la Légion d'honneur. Puis, lissant là les deux soldats complètement ébahis, il continua de visiter la caserne.
Soudain, un officier parut, le capitaine Puygelier. Louis Bonaparte alla vers lui, aimable et souriant :

- Capitaine, je suis le prince Louis. Soyez des nôtres. Vous aurez tout ce que vous voudrez.

La réponse ne fut pas celle qu'il attendait :

- Prince Louis ou non, dit l'officier, je ne vous connais pas. Faites-moi le plaisir de déguerpir ! Les gibernes sont pleines. Méfiez-vous ! Vous serez mis en joue avant qu'il ne soit longtemps !

Puis il cria :

- Clairon ! Sonnez-moi le ralliement ! Aux armes ! ...

Le prince, très ennuyé, comprit que l'affaire s'engageait mal.

- Mon parti est pris ! dit-il d'un ton grave.

Et coudes au corps, il quitta la caserne en courant, suivi de ses amis. Le hasard, dont on connaît la malice, conduisit le groupe de fuyards au pied de la colonne qui commémorait le départ de la Grande Armée vers les champs de victoire d'Austerlitz...
Là, le prince s'effondra :

- Je me ferai tuer ici, dit-il. Laissez-moi !

Mais ses fidèles l'entraînèrent vers la mer, tandis que le tocsin sonnait de tous les clochers de la ville et que le tambour battait le rappel à toutes les portes.
Ils arrivèrent sur la plage de Wimereux presque en même temps que les soldats du capitaine Puygelier.

- Les canots ont disparu, cria Louis Bonaparte, regagnons le bateau à la nage !

Il se jeta à l'eau, suivi de ses compagnons. Une salve qui fit un tué, quelques blessés et un trou dans l'uniforme du prince, arrêta les nageurs.
Un lieutenant du roi n'eut plus, alors, qu'à cueillir les conspirateurs.
La plus burlesque des équipées était terminée.
Grelottant, désespéré, Louis-Napoléon fut conduit au château. Le 12, il était incarcéré à la Conciergerie dans la cellule occupée cinq ans plus tôt par Fieschi, et le 30 septembre la Chambre des Pairs le condamnait à l'emprisonnement perpétuel au fort de Ham...


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MessageSujet: L'APRES NAPOLEON ...   NAPOLEON  ET LES FEMMES - Page 20 EmptyVen 8 Fév - 18:13

En apprenant cette condamnation, les amis du prince furent atterrés : "De Londres à Florence et de Constance à Rome, écrit Florent Boin, tous ceux qui connaissaient Louis-Napoléon déclarèrent que la décision de la Chambre des Pairs équivalait pour lui à une condamnation à mort ; jamais, disaient-ils, jamais il ne pourra vivre sans femmes !"
Ce n'était pas, en effet, le manque de liberté qui risquait de faire souffrir le plus Louis-Napoléon (il pouvait rester des jours entiers enfermé dans un bureau à lire et à fumer des cigarettes), mais la chasteté qui lui était indirectement imposée.

Le futur empereur ne pouvait se passer de femmes. Il lui fallait toujours avoir la mains sur un sein, une jolie jambe ou une agréable fesse... Ce goût des formes féminines le poussait d'ailleurs à commettre des gestes que d'aucuns trouvaient déplacés de la part d'un prince. Paul Verdier nous dit qu' "il ne pouvait voir un décolleté sans y plonger les mains à la façon d'un homme qui veut retirer un poisson d'un aquarium. Hardiesse qui étonnait toujours les témoins..."

Naturellement, Louis-Napoléon n'avait en amour aucun préjugé de classe : soubrette, princesses, bourgeoises, commerçantes, paysannes, tout lui était bon. Et son adolescence fut si riche en aventures amoureuses de toutes sortes que, pour comprendre l'effroyable pénitence que les Pairs venaient d'imposer au malheureux prince, il va nous falloir, comme disent les romanciers, remonter un peu en arrière...
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MessageSujet: L'APRES NAPOLEON ...   NAPOLEON  ET LES FEMMES - Page 20 EmptyVen 8 Fév - 19:17

LOUIS-NAPOLEON SE DEGUISE EN FEMME, POUR COURTISER UNE NOBLE FLORENTINE


Le goût des femmes le poussa à des extravagances peu courantes chez un prince. - OLIVIER LERICHE -


COMME tous les enfants de l'amour, Louis-Napoléon Bonaparte fut tourmenté, dès son plus jeune âge, par le désir "de savourer les dames (1)."
A douze ans, il tomba amoureux d'une petite voisine dont il traça le nom sur une plate-bande en semant des graines de cresson.

- Elle crut à un amour platonique, racontera-t-il plus tard, et j'en fus vexé, car j'aurais aimé coucher avec elle. La nature, chez moi, était, déjà, fort exigeante...



(1)On sait que Louis-Napoléon fut conçu à Cauteret, en juillet 1807, à un moment où la reine Hortense était éloignée de son mari. C'était donc un bâtard. Depuis cette date, les braves gens et les historiens se demandent qui fut le père ce bambin aux yeux clairs. Trois noms sont généralement avancés : Ver Huell, un amiral hollandais, Elie Decazes (dontLouis XVIII devait faire un jour son favori) et Charles de Bylandt, écuyer hollandais de la reine. Tous trois furent les amants d'Hortense. Tous trois se trouvaient à Cauteret... Malheureusement, aucun n'a jamais parlé et l'énigme demeure. Napoléon III est donc né de père inconnu...


A treize ans, il ne put se contenir davantage. Il vivait alors en Suisse avec sa mère, au château d'Arenenberg. Un soir, il entraîna une petite bonne dans sa chambre, la troussa avec autorité et la viola.
Ce geste allait avoir les plus douces conséquences pour les jeunes femmes qui habitaient à Cette époque auprès du lac de Constance.
Mis en goût par le plaisir qu'il avait connu avec la soubrette, Louis-Napoléon, en effet consacra, dès cet instant, la plus grande partie de son temps à l'étude approfondie - et comparative - de ce que l'on nommait joliment l' "ouvroir des dames et des demoiselles"...

Il commença par les bergères, toujours contentes, comme chacun sait, d'être bousculées et violentées par un prince, puis il pénétra dans les familles de la bonne bourgeoisie helvète et consomma, dans le plus grand désordre et sans tenir compte de la hiérarchie naturelle, les jeunes filles, les mamans, les tantes, les cousines, les gouvernantes, etc. Enfin, l'âge lui venant, il visa plus haut et rencontra les jolies et aristocratiques étrangères qui villégiaturaient dans la région.
Cette extraordinaire activité amoureuse l'obligeait à quitter le château dès la fin du déjeuner pour ne reparaître qu'à l'heure du dîner.
De telles absences finirent par éveiller les soupçons de la reine Hortense. Un jour, que Louis-Napoléon demandait la permission de quitter la table avant la fin du repas, elle lui dit en souriant :

- Quand on laisse un dessert, c'est qu'on court à un autre...

Le prince rougit, fort gêné. Alors, indulgente aux frasques de ce fils qui commençait à lui ressembler, elle ajouta simplement :

- Va ...

Et Louis-Napoléon, posant sa serviette, courut retrouver une ravissante anglaise du voisinage qui l'attendait, tous les jours un peu plus tôt, nue sur son lit...

Tous les ans, la reine Hortense emmenait son fils à Rome où avait lieu une réunion de la famille Bonaparte.
En 1830, ils s'arrêtèrent à Florence. Là, le prince, qui avait alors vingt-deux ans, fut, un soir, présenté à la comtesse Baraglini. Cette jeune femme, que l'on appelait l'"anticamera del paradiso" (l'antichambre du paradis) était d'une telle beauté que Louis-Napoléon en tomba immédiatement amoureux.
Le lendemain, il fit remettre à la comtesse un billet discret par lequel il demandait un rendez-vous.
Ne recevant pas de réponse, il chercha un moyen de s'introduire dans la maison de cette troublante Florentine. Après une nuit de réflexions, il finit par imaginer un stratagème qui lui parut ingénieux.
Ecoutons le pamphlétaire Eugène de Mirecourt nous conter cette extraordinaire et bouffonne aventure :

"Il se revêtit d'un costume complet de femme, d'une robe, d'un châle, d'un chapeau, et, après s'être bien rasé, mis de la poudre de riz pour blanchir son teint et du rouge pour colorer ses joues, une perruque de femme, de fausses tresses et de fausse nattes afin de mieux se déguiser, il se munit de plusieurs beaux bouquets de fleurs et se dirigea, ainsi costumé en bouquetière, vers la demeure de la dame de ses pensées.
"Une femme de chambre vint lui ouvrir. Il baissa les yeux d'un air timide :
" - Je suis, dit-il, en adoucissant sa voix le plus possible, la fleuriste de la Signora, et je lui apporte les fleurs qu'elle m'a commandées.
"La domestique, trompée par ce stratagème, l'introduisit sans défiance auprès de sa maîtresse. A la vue de cette horrible fille dont les petits yeux cyniques s'écarquillaient sous son chapeau ridicule et dont le nez proéminent donnait à toute sa physionomie un aspect grotesque et risible - on aurait dit Bobèche habillé en femme - la belle Italienne ne peut dissimuler un profond sentiment d'aversion. Mais Louis Bonaparte, tout entier à sa passion, emporté par son amour, n'y prit même pas garde. Aussitôt que la femme de chambre se fut retirée en refermant la porte sur elle, et qu'il fut seul avec la dame, il s'avança brusquement vers elle, se précipita à ses genoux en lui fisant mille protestations d'amour, en la suppliant de céder à sa flamme :
" - Je ne puis plus vivre, lui disait-il, sans vous posséder. Plutôt mourir mille fois que d'endurer plus longtemps les tourments affreux qui me rongent le coeur et me torturent l'âme depuis que je vous ai vue. Mettez un terme à mon supplice, cédez à mon amour, soyez à moi, ou je m'abandonne au désespoir et je mets fin à mes jours.
"Et, tirant un poignard caché dans sa poitrine, il le brandit en disant :
" - Je suis décidé à me tuer à vos pieds si vous repoussez mes voeux et je vous léguerai ma mort comme un éternel remord.

"A cette vue, à ces gestes de désespoir, à ces menaces de se tuer, la belle Signora, en proie à la plus grande terreur, agita violemment une sonnette. Son mari et ses gens accoururent et trouvèrent le prince amoureux déguisé en fleuriste aux pieds de la dame, tenant son poignard d'une main et ses fleurs de l'autre.
"A ce spectacle étrange, les arrivants, stupéfaits, ne savent que penser. Le mari demande une explication à sa femme qui lui dit que la prétendue fleuriste n'est autre qu'un poursuivant insolent et ridicule qui l'accable depuis longtemps des importunités de son amour. A cette déclaration, l'époux, furieux, saisit sa canne et, d'un bras vigoureux dont la colère double la force, il donne au malencontreux soupirant une ample distribution de coups de bâton qui pleuvent sur son échine, drus comme grêle.

"N'écoutant que sa frayeur, notre amoureux abandonne ses bouquet et son poignard et détale au plus vite ; les valets le poursuivent et le renversent plusieurs fois dans les escaliers en l'accompagnant à grands coups de pied jusqu'au milieu de la rue, où il arrive tout décoiffé, son fameux chapeau de femme pendant derrière ses épaules, sa perruque, ses fausses nattes à moitié arrachées, son châle et sa robe déchirés... Les gamins, à qui les domestiques racontèrent l'aventure, le poursuivirent de leurs insultes et de leurs huées jusque chez lui, où il arriva dans ce piteux costume, transi de peur et roué de coups.
"Le lendemain, tout Florence connaissait l'aventure arrivée au futur empereur. Pour se soustraire au ridicule qui l'accablait, il envoya deux témoins au mari outragé pour lui proposer un cartel, pensant qu'il refuserait de se battre et que cette courageuse provocation rétablirait un peu son honneur et sa réputation. Mais, hélas ! mal lui en prit encore, car l'époux courageux accepta le duel et se rendit au rendez-vous. Ce que voyant, Louis Bonaparte prit le parti de quitter Florence et s'enfuit honteusement au lieu d'aller se battre, ainsi qu'il l'avait lui-même proposé. Pour excuser cette lâcheté, il la mit sur le comte de sa mère qui ne lui avait pas permis, disait-il, d'aller au rendez-vous d'honneur qu'il avait donné et qu'elle le forçait à quitter Florence. Personne ne crut à ce prétexte grossier, et Louis Bonaparte quitta ainsi lâchement la ville."
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MessageSujet: L'APRES NAPOLEON ...   NAPOLEON  ET LES FEMMES - Page 20 EmptySam 9 Fév - 14:40

Après cette aventure peu reluisante, la reine Hortense emmena son grand dadais de fils à Rome, où il apprit que Louis-Philippe venait de remplacer Charles X. Pensant qu'il ne s'agissait là que d'un régime de transition avant le retour des aigles impériales, il se mêla au mouvement carbonari.
Mais il fut bientôt poursuivi par la police pontificale et, au début de 1831, il devait fuir en compagnie de sa mère, sous un déguisement.
Grâce à de faux passeports, tous deux parvinrent à pénétrer en France.
Le dessein de la reine Hortense était de prier Louis-Philippe d'accueillir son fils dans l'armée française.
Le 23 avril, ils arrivaient à Paris. Et, tandis que la nièce de l'empereur entrait en relation avec M. d'Houdetot, aide de camp du roi, l'incorrigible prince courait dans les galeries du Palais-Royal goûter une de ces Parisiennes dont on lui avait tant vanté les savoir-faire...


Louis-Philippe fut effaré en apprenant que les deux illustres exilés étaient à Paris. Il commença par refuser de recevoir Hortense. Puis il se ravisa et consentit à une entrevue secrète. La reine fut reçue au Palais-Royal, dans la chambre du colonel d'Houdetot, en présence de la reine Marie-Amélie et de Mme Adélaïde, soeur et égérie du souverain.
Louis-Philippe se montra fort aimable, conta mille anecdotes, plaça les trois ou quatre bons mots qu'il connaissait et parla de la famille Bonaparte en termes chaleureux.
Hortense rentra à l'hôtel de Hollande pleine d'espoir.
Quelques jours plus tard, elle devait déchanter : le roi demandait aux deux "napoléonides" de quitter la France dans les plus brefs délais.


Après avoir assisté le 5 mai, de la fenêtre de leurs chambres, place Vendôme, à une petite manifestation bonapartiste, ils quittèrent Paris et gagnèrent Londres.
Là, le prince consacra la plus grande partie de son temps à courir le jupon. Tandis que sa mère rencontrait M. de Talleyrand, alors ambassadeur de France en Angleterre, ce petit écervelé, animé par une exaltation érotico-patriotique, allait, de lit en lit, venger Waterloo...

Au mois d'août, Hortense, pensant que la fraîcheur des glaciers suisses agirait heureusement sur le tempérament de son fils, ramena celui-ci à Arenenberg. Puis, elle le fit entrer à l'Ecole militaire de Thoune. Pendant cinq ans, Louis-Napoléon étudia l'artillerie et prouva aux jeunes filles de la ville que la réputation des artilleurs n'était point usurpée.
En 1836, la reine Hortense pensa qu'il était grand temps de marier son fils. Elle invita à Arenenberg la princesse Mathilde, fille du roi Jérôme, qui avait quinze ans et qui était ravissante. Louis-Napoléon en tomba amoureux
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MessageSujet: L'APRES NAPOLEON ...   NAPOLEON  ET LES FEMMES - Page 20 EmptySam 9 Fév - 17:30

Il emmena la jeune fille faire de longues promenades dans les bois, canoter sur le lac et rêver sous la lune.
- Tu es gracieuse comme la plus gracieuse des chattes, lui disait-il. Toi seule au monde peux me rendre heureux...
Il ajoutait l'oeil vague :
- La vie, l'âme, Mathilde, sont comme une lettre dont tout le monde voit le dehors, l'adresse et l'enveloppe, et qu'une seule personne lit parce que l'âme ne se fait comprendre qu'à une seule âme...
Elle écoutait, extasiée.
Après quoi, il la quittait sur un baiser chaste, soit pour aller coucher à Ermatingen, où habitait une Anglaise aux cheveux jaune paille qui prétendait être la fille naturelle de Hudson Lowe, le geôlier de Napoléon Ier.
Le lendemain, le futur empereur reprenait ses conversations romantiques avec Mathilde "tout comme s'il avait dormi, veillé par un ange".


Tous deux allaient alors innocemment graver leurs initiales dans l'écorce des hêtres et jeter des pétales de marguerite dans une source favorable aux amoureux.
Mais de telles promenades, aux côtés d'une cousine dont les seins fermes faisaient craquer le corsage, finissaient par avoir sur le tempérament du prince des effets horriblement aphrodisiaques. Le malheureux était alors obligé d'avoir recours à des exutoires champêtres. "Il arriva à Louis-Napoléon, nous dit Simon Jolivet, de laisser la jeune princesse à sa cueillette de fleurs et de courir dans un fourré pour donner à une bergère le trop plein de son sentiment..."
Puis, calmé, il revenait vers Mathilde qui avait eu le temps de terminer son bouquet, et il continuait de philosopher sur l'éternité de l'amour humain et le trouble des âmes...

Comme tous les amoureux, Louis-Napoléon et Mathilde attachaient beaucoup d'importance aux symboles. Jamais ils ne se seraient séparés pour passer de chaque côté d'un arbre. Jamais elle ne lui aurait offert d'oeillets. Jamais il n'aurait, lui, violé une bergère sur une fougère où elle avait dormi... Razz
Or, un soir qu'ils rentraient tous deux en courant vers le château, trempés par une violente pluie d'orage, la foudre tomba sur un arbre qui se brisa devant eux.
Louis-Napoléon saisit la main de sa fiancée :

- Notre mariage sera rompu par le sort ! dit-il.


Quelques jours plus tard, le roi Jérôme vint chercher sa fille. Il expliqua qu'elle devait aller à Stuttgart chercher la bénédiction de son grand-père, le roi de Wurtemberg :

- Aussitôt après, nous annoncerons vos fiançailles.

Avant de quitter Arenenberg, Mathilde offrit à Louis-Napoléon une canne à pommeau d'or représentant une tête de chien. En échange de ce symbole de fidélité, le prince passa au doigt de sa fiancée une bague ornée de myosotis en turquoise...

- Nous les marierons en août, dit Hortense au roi Jérôme.
- Le 15, pour la Saint-Napoléon !

Mathilde en larmes monta dans la voiture de son père. Louis-Napoléon grimpa alors sur le marchepied, embrassa la jeune fille une dernière fois et, malgré un "très net pressentiment", lui murmura :

- A bientôt !

C'était le 25 mai 1836. Ils ne devaient se revoir que douze ans plus tard..
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