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 NAPOLEON ET LES FEMMES

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MORGANE
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JEAN
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epistophélès

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MessageSujet: NAPOLEON ET LES FEMMES   NAPOLEON  ET LES FEMMES - Page 18 EmptyJeu 13 Déc - 20:02

LA LEGERETE DE PAULINE BONAPARTE ENTRAINE LE DESASTRE DE SAINT-DOMINGUE



Elle eût été sérieuse, son mari n'eût jamais été nommé à Saint-Domingue. - H. FLEISCHMANN -



APRES le 9-Thermidor, Laetitia et ses enfants, privés de la protection de Napoléon, qui venait de perdre son commandement, quittèrent Antibes et retournèrent à Marseille vivre dans la crasse d'une petite chambre d'hôtel.
Pauline retrouva les adolescents du Vieux-Port, leurs yeux chauds et leurs mains indiscrètes. Et peu à peu elle oublia les beaux officiers qui lui faisaient la cour au Château-Salé...

Après Vendémiaire, tout changea de nouveau. Bonaparte, qui venait d'être nommé général en chef de l'Armée de l'Intérieur pour avoir fait massacrer des Parisiens, envoya de l'argent à sa famille, et Pauline put échanger ses robes en lambeaux et ses bas troués contre des vêtements un peu plus élégants.
C'est alors que le citoyen Stanislas Fréron, qui, deux ans auparavant, avait fait régner la terreur sur la Canebière (c'est un quartier de la ville de Marseille), arriva à Marseille avec le titre de commissaire du Directoire.
Cet individu (1), dont les révolutionnaires eux-mêmes disaient qu'il avait "atteint l'immortalité du crime", était la plus épouvantable des fripouilles. Ce qui ne l'empêchait pas de jouer les muscadins et de courir le jupon avec un air de bellâtre avantageux.

Fréron retrouva la famille Bonaparte, qu'il avait connue en 1793, réussit facilement à éblouir Pauline et devint son amant. Les ressources extraordinaires du tempérament de la jeune fille l'émerveillèrent. Il décida de l'épouser.
Folle de joie, Pauline étala dès lors sa liaison avec une absence de discrétion qui choqua les plus blasés. C'est ainsi que Barras écrit : "Elle vivait maritalement avec Fréron. Ils se montraient ensemble en public et au spectacle, dans une familiarité peu convenable, même selon nos moeurs."

Mais Napoléon avait d'autres ambitions pour sa soeur. Il repoussa Fréron comme il avait repoussé Junot.
En apprenant cette décision, Pauline eut une crise de nerfs. Puis elle désira dire à son cher Stanislas que rien, jamais, ne pourrait les séparer. Comme elle ne savait ni lire ni écrire, ce projet posait un problème.
Elle le résolut en allant demander à son frère Lucien d'écrire la lettre sous sa dictée.
Cette lettre, la voici :


Non, il n'est pas possible à Paulette de vivre loin de son tendre ami Stanislas. Ecris-moi souvent et épanche ton coeur dans celui de la
tendre et constante amante...
Ah ! mon cher trésor, ma lumière. Quelle souffrance d'être séparés aussi longtemps. Mon cher espoir, mon idole, je crois qu'à la fin le sort se lassera de nous persécuter. Toutes mes actions n'ont que toi pour objet.
Je t'aime toujours et passionnément. Pour toujours, je t'aime, je t'aime, ma belle idole : tu es mon coeur, tendre ami. Je t'aime, je t'aime, je t'aime, je t'aime, amant si tendrement aimé.


Fréron montra ce cri d'amour à Napoléon. Mais le Corse fut inflexible, et Pauline dut renoncer à devenir la femme de son tendre Stanislas...
Selon le mot amusant d'Henri d'Alméras : "Elle en souffrit quelques mois. Elle s'en consola toute la vie..."


(1) Stanislas était le fils de ce Fréron sur qui Voltaire avait écrit le célèbre quatrain :

Un jour dans un charmant vallon,
Un serpent mordit Jean Fréron.
Que pensez-vous qu'il arriva ?
Ce fut le serpent qui creva
.
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MessageSujet: Re: NAPOLEON ET LES FEMMES   NAPOLEON  ET LES FEMMES - Page 18 EmptyVen 14 Déc - 10:30

Paolina Buonaparte :
NAPOLEON  ET LES FEMMES - Page 18 80px-Paolina_Bonaparte_-_S.G._Counis
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MessageSujet: NAPOLEON ET LES FEMMES   NAPOLEON  ET LES FEMMES - Page 18 EmptySam 15 Déc - 20:28

Pour faire oublier son chagrin à Pauline, Napoléon l'invita à venir le rejoindre à Milan où il tenait sa première cour avec Joséphine. La jeune fille arriva en Lombardie au début de 1797 et se grisa de bals, de fêtes et de musique en compagnie d'officiers dont la galanterie s'exprimait par des gestes à la vérité plus précis qu'honnêtes.

"Un soir, nous dit l'auteur de la Chronique scandaleuse, au cours d'une réception au palais Serbelloni, un valet, intrigué par le mouvement d'un rideau et croyant que le vent en était la cause, voulut fermer la fenêtre...
Il eut la surprise de découvrir, dans l'embrasure, Pauline tenant sa robe troussée et recevant, debout contre le mur, l'hommage rapide d'un beau lieutenant..."

L'incident provoqua un petit scandale et rendit Bonaparte furieux.
C'est alors que l'impétuosité de Pauline commença à l'inquiéter et qu'il décida de la marier rapidement.
Un événement allait précipiter les choses.
A Milan, Pauline avait retrouvé Victor-Emmanuel Leclerc, jeune officier d'état-major, auquel elle avait accordé quelques privautés naguère à Antibes.
Immédiatement, elle était devenue sa maîtresse. Fort éprise de ce garçon qui ressemblait à Napoléon, elle l'entraînait à tout moment dans des cabinets retirés, sous des escaliers, derrière des haies, dans des placards, des remises à outils ou des buissons, pour y faire la "chosette"...
Or, un soir, Bonaparte, qui les avait conviés dans son cabinet de travail, bavardait gaiement avec eux quand un secrétaire apporta un volumineux dossier.

- Excusez-moi, dit le futur empereur, c'est très urgent.
Et il se plongea dans ses papiers.

Les deux amants attendirent un moment sans parler.
Puis Pauline, qui avait toujours une démangeaison au bon endroit, invita par geste Leclerc à la suivre derrière le paravent qui se trouvait dans un coin de la pièce.
Le jeune officier accepta et tous deux disparurent sur la pointe des pieds.
Bonaparte, trop absorbé par son travail, n'avait rien remarqué. Soudan, il dressa la tête. Un bruit étrange lui parvenait du fond de la pièce. Il y courut, tira le paravent et trouva sa soeur et son lieutenant couchés sur le tapis et "s'exprimant leur amour avec une égale ardeur.

Cette fois, Napoléon ne se fâcha pas.
Leclerc, il est vrai, était un beau parti pour Pauline.
Fils d'un riche propriétaire de moulins à Pontoise, il avait fait de brillantes études, et son talent militaire avait depuis longtemps attiré l'attention de Bonaparte.

- Puisque vous vous aimez, vous allez vous marier, dit le Corse.

Les deux amants se relevèrent un peu confus et s'en allèrent préparer leur mariage...

Les fiançailles n'apportèrent aucun changement dans l'attitude de Pauline. La jeune fille demeura aussi aguicheuse qu'auparavant, et les amis de son futur mari en profitèrent pour parfaire son éducation amoureuse.
Coquette, espiègle, primesautière, ravissante, tous les hommes l'adoraient. Elle, poussée par une véritable fringale de plaisir, se fût volontiers fait caresser par tous...
Le poète Antoine-Vincent Arnault, qui devait, un jour, appartenir à l'Académie française, nous a laissé un portrait savoureux de Pauline à cette époque. Ecoutons-le :

"A dîner, je fus placé à côté de Paulette qui, se souvenant de m'avoir vu à Marseille, et d'ailleurs me sachant dans ses confidences, puisque j'étais dans celles de son futur époux, me traita en vieille connaissance.
Singulier composé de ce qu'il y avait de plus complet en perfection physique et de ce qu'il y avait de plus bizarre en qualités morales. Si c'était la plus jolie personne qu'on pût voir, c'était aussi la plus déraisonnable.
Pas plus de tenue qu'une pensionnaire, parlant sans suite, riant à propos de rien et à propos de tout, contrefaisant les personnages les plus graves, tirant la langue à sa belle-soeur quand elle ne la regardait pas, me heurtant le genou quand je ne prêtais pas assez d'attention à ses espiègleries, et s'attirant de temps en temps de ces coups d'oeil terribles avec lesquels son frère rappelait à l'ordre les hommes les plus intraitables. Mais cela ne lui en imposait gère, le moment d'après, c'était à recommencer, et l'autorité du général de l'armée d'Italie se brisait ainsi contre l'étourderie d'une petite fille."

D'une petite fille au sourire frais, qui allait faire de sa vie la plus échevelée des bacchanales.
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MessageSujet: NAPOLEON ET LES FEMMES   NAPOLEON  ET LES FEMMES - Page 18 EmptySam 15 Déc - 21:25

Le mariage fut célébré le 14 juin 1797 à la chapelle de Montebello.
Pauline, qui était fort amoureuse de son époux, montrait après la cérémonie un sourire heureux qui fit prédire par les braves gens une union sans nuages. .. geek
Comme toujours, les braves gens se trompaient. Car, dès qu'elle fut installée à Paris, rue de la Ville-l'Evêque, la nouvelle Mme Leclerc, ravie de connaître enfin la capitale, commença à regarder les jeunes muscadins avec des yeux chauds qui en disaient long sur son appétit.

"Elle les considérait de sa fenêtre cherchant à évaluer leurs possibilités amoureuses, les imaginant dans tout le développement d'un beau désir, et les voyait partir avec le regard malheureux d'un chat tenu en laisse qui voit s'échapper une souris..."
(Pierre AUDIN, Pauline Bonaparte.)

Leclerc, qui venait d'être nommé général, mais qui gardait un certain bon sens, ne tarda pas à s'apercevoir que sa jeune épouse était tourmentée par des pensées lascives. Aussi, lorsque le Directoire l'envoya à Rennes comme chef d'etat-major, prit-il quelques précautions.
Sous prétexte que Pauline - alors âgée de dix-sept ans - avait besoin d'apprendre l'orthographe, il l'envoya à l'école chez Mme Campan.
Mais cette occupation n'était pas suffisante pour détourner la petite Corse de son idée fixe.
D'ailleurs, la cour d'admirateurs qu'elle traînait de salon en salon n'était pas faite pour lui donner envie de connaître les joies simples de l'instruction primaire...

Ses succès mondains étaient - il faut bien le dire - considérables. Personne ne se souvenait d'avoir vu une femme aussi belle ; et cette mauvaise langue de Mme d'Abrantès elle-même est obligée d'avouer dans ses Mémoires : "Beaucoup de personnes ont parlé de sa beauté. On connaît cette beauté par ses portraits, ses statues même ; toutefois, il est impossible de se faire une idée de ce qu'était cette femme extraordinaire comme perfection du beau."

Cette beauté suscitait, bien entendu, quelque jalousie.
La première femme qui la lui témoigna avec méchanceté fut Joséphine.
Pour se venger, Pauline ne nomma plus sa belle-soeur que "vieille peau" et dénonça régulièrement ses infidélités à Napoléon.
Mais il ne s'agissait là que de petites frictions familiales. Une autre femme devait montrer publiquement, et de façon autrement grave, sa hargne. Elle s'appelait Mme de Contades.

Un soir, au cours d'une réception chez Mme de Permon, mère de la future Mme d'Abrantès, elle vint se planter devant Pauline que toute la société entourait dévotement, et s'écria :

- Ah ! mon Dieu, quel malheur ! Une si jolie femme. Mais comment cette difformité ne s'est-elle jamais laissé apercevoir ? Mon Dieu, que c'est malheureux :
- Que voyez-vous donc ? demanda quelqu'un.
- Comment ? Ce que je vois ! Et vous-même, comment ne voyez-vous pas les deux énormes oreilles qui sont plantées aux deux côtés de cette tête ? Si j'en avais de pareilles, je me les ferais ôter. Il faut que je lui conseille de le faire. On ne peut proposer à une femme de lui couper les oreilles sans que cela tire à conséquence...

"Mme de Contades, raconte la duchesse d'Abrantès, n'avait pas achevé que tous les yeux s'étaient portés sur la tête de Mme Leclerc, non plus cette fois pour l'admirer, mais pour inspecter ses oreilles.
"La vérité est que, en effet, jamais plus drôles d'oreilles n'avaient été appliquées par la nature à droite et à gauche d'un visage par ailleurs charmant ; c'était un morceau de cartilage blanc, mince, tout uni, et sans être aucunement ourlé.
Ce cartilage n'était point énorme, comme le disait Mme de Contades, mais c'était fort laid...
"Le résultat de cette petite scène fut de faire pleurer Mme Leclerc, elle se trouva mal, et finit par aller se coucher avant minuit."

Après cet affront, Pauline, qui n'avait pas assez d'esprit pour se venger par un trait cinglant, pensa qu'il fallait faire périr ses ennemies "dans leurs humeurs mauvaises" en montrant publiquement la toute-puissance de sa beauté sur les hommes. Pour commencer - ayant caché ses oreilles dans une coiffure artistique - elle prit trois amants d'un coup...

"Ce qui, nous dit Bernard Nabonne, indiquait en même temps le tempérament de cette jeune mère de dix-huit ans et son indifférence sentimentale. (Pauline avait donné un fils à son mari le 20 avril 1798. Cet enfant, dont Napoléon était le parrain, avait été baptisé Dermit...)
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MessageSujet: NAPOLEON ET LES FEMMES   NAPOLEON  ET LES FEMMES - Page 18 EmptySam 15 Déc - 21:33

L'enfant du couple, qui était de faible constitution est décédé à l'âge de six ans.
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MessageSujet: NAPOLEON ET LES FEMMES   NAPOLEON  ET LES FEMMES - Page 18 EmptyDim 16 Déc - 23:22

Ces trois amants étaient des généraux amis de son mari (des amis ? ... Shocked ... Razz ) : Beurnonville, Moreau et Macdonald.
Elle s'en amusa quelque temps. "Le jeu, dit encore Bernard Nabonne, consistait à obtenir qu'aucun des trois ne sût qu'il avait un rival, ce qui était fort difficile, car ces hommes étaient intimement liés. Elle s'ingénia donc à les brouiller ensemble en prêtant à chacun d'eux des actes infâmes contre leur amitié. Le procédé n'eut pas de succès. Les amis s'étant expliqués comprirent tout et décidèrent de rompre simultanément avec leur maîtresse commune, avec laquelle Moreau venait de passer deux jours à la campagne.
"Les trois lettres de rupture devaient être portées par Beurnonville, qui, au dernier moment, préféra charger un porteur des lettres de ses deux camarades, et aller rompre en personne pour son propre compte."
Mais l'entrevue ne se passa pas du tout comme il l'avait prévue. Avant même qu'il n'ait eu le temps d'ouvrir la bouche pour exposer ses griefs, la belle l'avait traîné sur un lit, déshabillé et mis - en un tour de main -dans les plus heureuses dispositions... Couvert de baiser, transformé en ourson bien propret, le général, qui avait le sens du devoir, fut obligé de se montrer galant homme.
La rupture fut donc remise à quelques jours.
Prudent, la seconde fois Beurnonville envoya une lettre.

Le coup d'Etat du 18 Brumaire et l'élévation subite de Bonaparte retira à Pauline le peu de réserve qui lui restait encore.
On la vit s'afficher avec de sémillants gaillards aux yeux chauds qui se flattaient d'être ses cavaliers.
"Expression fort appropriée, nous dit la Chronique indiscrète, attendu que Mme Leclerc leur servait justement de cavale..."
Pendant ce temps, le général Leclerc guerroyait au Portugal et, pour subvenir aux besoins grandissants de sa charmante épouse, pillait consciencieusement toutes les villes et tous les villages qu'il traversait.


Au début de 1801, Pauline montra tout à coups un intérêt passionné pour la tragédie. Tous les soirs, elle était au théâtre de la République (nom que portait alors la Comédie-Française). Après avoir applaudi le spectacle, elle courait dans les coulisses et félicitait le premier rôle, Pierre Rapenouille, dit Lafon, en des termes nettement excessifs, mais que celui-ci acceptait sans broncher.
Un soir, elle lui prit le bras :

- Vous êtes magnifique dans ce costume.

Puis, plus bas, elle ajouta :

- Comme vous devez être beau tout nu !

Le comédien n'était pas très intelligent, mais il comprit tout de même où la soeur du Premier Consul voulait en venir. Bien élevé, il crut bon d'exprimer par une petite mine sa surprise et son ravissement. La mimique étant ambigüe, Pauline s'imagina un instant qu'il "donnait dans le travers" (qu'il était homosexuel), comme la plupart des acteurs de son époque. Mais il n'en était rien. Lafon aimait les dames, et, le soir même, il le lui prouva avec cette belle ardeur qu'il mettait à massacrer les vers de Racine...
Dès le lendemain, Pauline et Lafon se montrèrent sans pudeur dans tout Paris.


Cette liaison allait avoir des conséquences inattendues et fort désastreuses pour la France.

En octobre 1801, Leclerc rentra du Portugal. Il bondit immédiatement chez lui pour étreindre Pauline dont il était toujours aussi amoureux. La jeune femme le revit avec un immense plaisir, car elle aimait bien avoir sous la main un homme toujours disponible en cas de besoin urgent...
Mais elle ne cessa pas pour autant de voir son cher Lafon et de lui manifester en public toutes les marques d'une passion démesurée.
C'est alors que Napoléon, fort ennuyé par cette situation scandaleuse qui faisait jaser ses ennemis politiques et risquait de lui nuire au moment où il prêchait la vertu au peuple français, prit la décision d'éloigner sa soeur de Paris.
Comment ?
En l'envoyant à l'autre bout du monde. Justement Saint-Domingue était ravagée, depuis la Révolution, par de violents troubles. Poussés par les Anglais, les Noirs de l'île - qui avaient réussi à faire supprimer l'esclavage en 1791 - réclamaient leur indépendance. Et pour y parvenir, bien entendu, ils massacraient les Blancs...


Ecoutons un témoin :

"Cent mille Noirs se sont révoltés dans la partie nord ; plus de deux cents sucreries sont incendiées ; les maîtres sont massacrés, et, si quelques femmes sont épargnées, leur captivité est un état pire que la mort même. Déjà les nègres ont gagné les montagnes ; le fer et le feu y montent avec eux. Un nombre immense de caféières est aussi la proie des flammes ; celles qui restent touchent au moment de la destruction. De toutes parts, femmes, enfants, vieillards, échappés au carnage, abandonnent leurs retraites et cherchent sur les vaisseaux le seul asile qui leur soit assuré..."

La rébellion était dirigée par un ancien esclave, Toussaint Louverture, qui rêvait de devenir le dictateur de l'île.
Pour asseoir son autorité sur les hommes de sa race, il se disait fils du Tonnerre. En réalité, il n'était que le descendant du chef congolais Gaou-Guinou (Toussaint, qui s'appelait Breda, devait son sobriquet au commissaire français Polverel, qui s'était écrié, en voyant les succès militaires du chef rebelle : "Mais cet homme fait ouverture partout !")


En 1794, le Directoire, pensant le calmer, lui avait donné le grade de général. Rusé, Toussaint Louverture s'était confondu en remerciements et avait aussitôt demandé pour ses soldats, des armes que le gouvernement français, avec une grande naïveté lui avait fournies.
Toussaint, levant alors le masque, avait tourné ses canons contre les colons, s'était fabriqué tant bien que mal une constitution et avait proclamé l'indépendance...
Depuis, une gabegie (une pagaille) incroyable régnait dans l'île...
Pour ramener l'ordre et reprendre Saint-Domingue qui constituait alors l'une de nos plus riches colonies, Bonaparte avait décidé d'intervenir. Une expédition devait partir à la fin de l'année 1801. Il ne restait plus qu'à en nommer le commandant en chef.


Le Premier Consul hésitait entre plusieurs généraux malicieux et rusés qui eussent constitué de redoutables adversaires pour Toussaint Louverture.
L'attitude de Pauline avec Lafon lui fit commettre une des plus belles erreurs de sa vie. Voulant éloigner sa soeur, il envoya le timide et crédule Leclerc à Saint-Domingue...
... Il fallait un diplomate, ce fut un cocu qui l'obtint.

En apprenant qu'elle devait suivre son mari aux Antilles, Pauline eut une crise de nerfs.

- Je ne veux pas aller chez les anthropophages, gémissait-elle en se tordant les bras.

Mais Bonaparte lui intima l'ordre de faire ses bagages, et elle dut s'incliner.
Bien entendu, tout Paris commentait ce départ :


"On s'étonnait, dit Salgues, de cette rigueur du Premier Consul pour une soeur qu'il semblait aimer tendrement ; mais on assurait, pour la justifier, que la princesse était éprise d'un jeune et brillant comédien, et que Bonaparte ne voyait pas de remède plus sûr que de mettre une distance du quinze cents lieues entre cette beauté et son amant."

Il y avait, on le voit, des gens bien informés...
A la fin de novembre, Leclerc se rendit à Brest, où devait avoir lieu l'embarquement. Pauline, prétextant des affaires à régler, demeura à Paris pendant quelques jours et se "gava de Lafon", selon l'expression fort imagée de Jacques Durocher. Puis elle le quitta en pleurant et prit la route de l'exil.
Mais elle trouva encore un moyen de retarder son départ.
Ecoutons un membre de l'expédition :


"Depuis quinze jours, l'escadre était prête à mettre à la voile. L'ordre de départ avait été donné, les vents étaient favorables, et pourtant on restait au port. Qui donc arrêtait le mouvement ?
"C'était une femme, Mme Leclerc !
"Elle arrivait, disait-on, portée en litière à bras d'hommes ! ... Si le roi de Prusse, le grand Frédéric, eût existé alors, il eût pesté, comme de son temps, contre le cotillon. En effet, le cotillon eut parfois une fâcheuse influence dans les affaires, et l'on peut, cette fois encore, lui attribuer la série de malheurs qui vinrent fondre par la suite sur notre armée."

La légèreté de Pauline allait être en effet responsable du désastre subi par nos troupes à Saint-Domingue
...
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MessageSujet: NAPOLEON ET LES FEMMES   NAPOLEON  ET LES FEMMES - Page 18 EmptyDim 16 Déc - 23:53

A SAINT-DOMINGUE, PAULINE PREND SES AMANTS PARMI LES INDIGENES



Elle aimait l'exotisme. - Dr CABANES -


LE 14 décembre 1801, le vaisseau-amiral Océan, sur lequel les Leclerc étaient confortablement installés, mit toutes voiles dehors et quitta le port de Brest.
Sur le quai d'embarquement, un homme regardait tristement s'éloigner le trois-mâts qui conduisait le jeune général et sa femme vers les Antilles.
Cet homme était Fréron, le premier amant officiel de Pauline. Bonaparte, qui voulait s'en débarrasser aussi, l'avait nommé sous-préfet de Cayes, petite ville de Saint-Domingue.

- Ils vont tous se retrouver à bord du même bateau, s'était dit le Premier Consul avec malice, et leur voyage ne manquera pas d'un certain piquant.

Mais Fréron aimait toujours Pauline. Il n'avait pas eu le courage se s'embarquer sur l'Océan. Il s'était caché dans une auberge de Brest et avait manqué volontairement le départ. Quelques jours plus tard, il montait à bord du Zélé, navire moins confortable que l'Océan, mais, nous dit Alphonse Nisard, "où il pouvait penser à ses amours sans avoir sous les yeux le spectacle douloureux pour lui d'un homme mettant la main là où il ne pouvait plus mettre que son rêve..."

Le pauvre avait tort de se tourmenter le coeur et l'esprit avec des images lascives. Pauline, sur son bateau, ne pensait guère à la bagatelle. L'estomac tordu par un violent mal de mer, elle passait ses journées étendue sur un canapé, entourée de cuvettes. Parfois, les poètes Esménard et Norvins, qui étaient du voyage, venaient lui dire leurs oeuvres et la comparer à la "Galatée des Grecs, la Vénus maritime" ; mais leur poésie grandiloquente ne faisait qu'aggraver l'état de la jeune femme.
La traversée dura cinquante-deux jours. Ce ne fut que le 5 février 1802, en effet, que l'Océan accosta à Port-Margo.


Aussitôt, le général Leclerc s'élança avec une petite troupe de hussards vers le Cap de la République (alors capitale de Saint-Domingue), qui était aux mains des rebelles.
En quelques heures, la ville fut prise. Mais, avant de la quitter, les Noirs l'avaient incendiée, et Leclerc eut bien du mal à trouver une maison indemne. Finalement, il réquisitionna une grande propriété située sur une colline proche, et Pauline vint s'y installer.
Dolente, mal remise de son voyage, elle se mit immédiatement au lit et écrivit une longue lettre à Bonaparte pour lui dire qu'elle était très malheureuse.
Le Premier Consul lui répondit le 16 mars :


J'ai reçu votre lettre, ma bonne petite Pauline. Songez que les fatigues, les peines ne sont trien quand on les partage avec son mari et que l'on est utile à sa patrie.
Faites-vous aimer par votre prévenance, votre affabilité et une conduite sévère et jamais inconséquente. L'on fait faire des caisses de modes pour vous, que le capitaine de la Syrène vous apportera. Je vous aime beaucoup. Faites que tout le monde soit content autour de vous et soyez digne de votre position.

BONAPARTE.


De cette lettre tendrement fraternelle, Pauline devait oublier bien vite les conseils de sagesse pour ne se souvenir que de deux phrases : "Faites-vous aimer" et "Faites en sorte que tout le monde soit content autour de vous..."
C'est pourquoi, dès que ses forces le lui permirent, elle fit vraiment tout pour que, dans son entourage, les officiers, les sous-officiers, et même certains hommes de troupe, se sentissent heureux de vivre. Dès qu'elle apercevait un Français un peu triste, elle l'entraînait vers son boudoir, le déshabillait, se dévêtait et s'efforçait de lui faire retrouver le sourire
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MessageSujet: NAPOLEON ET LES FEMMES   NAPOLEON  ET LES FEMMES - Page 18 EmptyLun 17 Déc - 2:58

Pendant ce temps, Leclerc remportait quelques victoires faciles. Le 5 mars, il batti Toussaint Louverture à la Crête-à-Pierrot et délivra 3 000 Blanches et Mulâtresses que les Noirs avaient enlevées pour leur délassement de guerriers...
Le général rebelle, usant d'une ruse classique, feignit alors de se soumettre.
Ravi, le général Leclerc rentra triomphalement au Cap de la République.

Ecoutons un témoin :


"On nous y reçut comme des vainqueurs qui ont gagné vingt batailles. Mme Leclerc s'était portée à notre rencontre. Elle appelait son mari : "Mon joli gamin".
C'était, il est vrai, un poupon de joli figure, aux moustaches naissantes, blond et de petite taille." (Général BRO, Mémoires)
Le "joli gamin", confiant en la parole de Toussaint Louverture, crut la campagne terminée. Et, dans un bel élan d'humanité, il amnistia tous les rebelles. Le succès dépassait les espérances du chef noir. Toutefois, pour mieux endormir la méfiance des Français, il se montra pendant quelque temps d'une exquise loyauté, célébra la réconciliation et loua la grandeur de Bonaparte..Pauline, enchantée de voir la tournure que prenaient les événements, continuait de distribuer du "contentement" autour d'elle en faisant preuve d'un tempérament qui stupéfiait les plus blasés. Le chancelier Pasquier écrit, en effet, dans ses Mémoires : "Le soleil des Tropiques s'étonna de son ardeur pour les plaisirs !..."

Bientôt, cette insatiable jeune femme eut d'autres désirs. Troublée par les histoires que les dames de sa suite lui contaient "touchant le gigantisme localisé de certains Noirs", Pauline voulut, selon de mot de Barras, "établir des comparaisons". La chose lui était facile ; les Noirs attirés par sa beauté entouraient sa maison du matin au soir.
Elle commença par commander une fête avec danses érotiques. Spectacle qui choqua beaucoup le bon et candide Norvins : "Nous fûmes réellement très embarrassés, écrit-il, d'abord pour notre ravissante générale.
Cependant, pour ne pas avoir l'air de mépriser les pauvres nègres dans leurs plaisirs, Mme Leclerc alla prendre place sur un grand sofa de feuilles de bananiers, favorisé de pavillons, que nos marins avaient élégamment placé sous une voûte de frangipaniers et de lauriers-roses odorants. Enfin, nous regagnâmes le quartier général asphyxiés, pour ainsi dire, par un dégoût dont l'horreur me poursuit encore, tandis que les Noirs, infatigables corybantes, prolongèrent jusqu'au jour cette orgie abominable..."

Pauline ne partageait pas le dégoût de Norvins. Fort alléchée par ce qu'elle avait vu, elle était impatiente de savourer elle-même un de ces grands gaillards à peau foncée qu'elle venait d'admirer en pleine action...

La plupart des auteurs modernes assurent avec une amusante gravité que Pauline, bien que fort excitée par le climat aphrodisiaque de Saint-Domingue, ne fit jamais entrer de Noirs dans son lit. "Elle se contenta, nous dit l'un d'eux, d'admirer leur nudité, comme on regarde une oeuvre d'art." ... Razz

Cette attitude d'esthète nous paraît, il faut bien le dire, assez étonnante de la part d'une femme qui, selon le mot imagé d'un mémorialiste, ne pensait qu'à "se faire mignoter l'as de trèfle"...
En outre, cela ne correspond guère à ce que nous disent les auteurs contemporains.
Barras est formel quand il parle des "excès de libertinage qu'elle avait commis, non pas seulement en Europe et à Saint-Domingue avec tous les Blancs composant l'armée, mais avec les nègres, dont elle avait voulu faire la comparaison."
De son côté,, Fouché déclare, avec plus d'hypocrisie : "En proie aux vives ardeurs du climat des tropiques, elle se plongea dans tous les genres de sensualité."


Enfin, la Chronique scandaleuse de l'Empire ajoute :
"Pauline Bonaparte eut à Saint-Domingue de nombreux amants. Elle ne se contenta pas de donner un dérivatif aux Français éloignés de leur terre natale, elle goûta - et avec gourmandise - aux nègres de l'île. Certains se vantèrent de leur bonne fortune, et c'est ainsi que les excès de la générale Leclerc furent connus."

Il semble donc bien prouvé que Pauline ait pris à Saint-Domingue les plaisirs colorés que les auteurs modernes nient avec une étrange pudeur.


Leclerc ne tarda pas à être informé des débordements de sa femme. Très affligé, il chercha un moyen qui lui permît de sévir sans provoquer de scandale. L'imprudence de quelques Françaises allait lui donner une idée.
Un jour, ses soldats découvrirent dans les bagages de Toussaint Louverture une caisse remplie de lettres fort érotiques écrites au chef rebelle par des femmes blanches.
Aussitôt, Leclerc rédigea un avis qui fut affiché sur tout le territoire de l'île : "Les femmes blanches qui se sont prostituées aux nègres, quel que soit leur rang, seront renvoyées en France."


Ainsi, Pauline était prévenue indirectement du danger qu'elle courait. Contrainte pas la loi de prendre désormais des plaisirs plus orthodoxes, elle se donna alors au général Humbert qui, nous dit-on, "avait une belle moustache et savait s'en servir"...
Leclerc n'eut pas le loisir de savourer le plaisir amer d'être une fois encore un général cocu.
Au mois de mai, brusquement, les Noirs, poussés par les Anglais, reprirent leur guérilla contre les Français.
Des hommes furent assassinés, des femmes enlevées, des officiers sodomisés sur la place publique.
Le mari de Pauline, qui croyait le pays pacifié, fut atterré. A la Hâte, il prit des mesures destinées à rétablir l'ordre. Il était malheureusement trop tard, l'insurrection gagnait toute l'île. Or, à ce moment pour comble de malchance, une épidémie de fièvre jaune d'une virulence exceptionnelle s'abattit sur Saint-Domingue.
L'une des premières victimes de ce mal fut Stanislas Fréron qui mourut au mois de juillet. Bientôt, l'armée fut atteinte. En quelques semaines, nous dit Bernard Nabonne, l' "épidémie allait tuer 1 500 officiers, 25 000 soldats, 8 000 marins, 2 000 fonctionnaires civils, 750 médecins militaires".


Epouvanté, Leclerc écrivit !

Ravages terribles dans mes troupes. Tous mes généraux sont malades. j'ai dû me servir des généraux noirs... Il m'est impossible de faire marcher des troupes européennes ; elles crèvent en route...

Pendant ce temps, Pauline, absolument inconsciente du danger qui menaçait son mari, continuait d'organiser des fêtes.Et, le bon goût n'étant pas la chose au monde la mieux partagée, elle donnait à ses bals le nom de "Rendez-vous dans la chambre mortuaire".
Ce qui faisait rire...
Hélas ! le 22 octobre, Leclerc fut atteint, à son tour, de la fièvre jaune. Le 2 novembre, il expirait laissant Pauline hébétée...

Le corps du général fut ramené en France à bord du Swiftsure. Pendant le voyage, Pauline demeura prostrée dans une cabine, pleurant son mari, sa jeunesse et sa santé. Elle rapportait en effet de ses contacts trop intimes avec les partisans de Toussaint Louverture une très mauvaise maladie...
Le 1er juin 1803, elle débarqua à Toulon où elle fut mise en observation médicale aux Nazarettes. Pour égayer un peu sa quarantaine, des amies lui écrivaient les derniers potins parisiens. C'est ainsi qu'elle apprit l'aventure savoureuse survenue à un jeune adolescent que l'on appelait le jeune sauvage de l'Aveyron
.

Ecoutons l'auteur de la Chronique du Consulat :

"Ce jeune sauvage - sans doute un enfant abandonné par ses parents - avait vécu plusieurs années dans les bois de l'Aveyron de fruits qu'il cueillait sur les arbres et des bêtes qu'il atteignait à la course. Les bûcherons réussirent à s'emparer de lui avec un filet.
Il ne put jamais apprendre à parler. Il n'émettait que des sons gutturaux. A cause de son âge et de sa vigueur développée par son genre d'existence, les femmes le regardaient avec sympathie, s'étonnaient de ne pas fixer davantage son attention et se demandaient entre elles :

- Comment un homme peut-il être sauvage ?

"On le conduisit un jour à Clichy-la-Garenne, chez Mme Récamier. Il resta pendant quelques minutes tranquille, puis il donna quelques signes d'agitation, et, profitant de ce que son précepteur avait le dos tourné, s'échappa. On ne s'aperçut de sa disparition que lorsqu'il était déjà loin. On se mit à sa poursuite dans le parc qui avait une assez vaste étendue. On finit par le découvrir perché sur un arbre et en chemise.
"Son précepteur, un peu humilié de sa fugue, employa tour à tour, pour le faire descendre, les prières et les menaces.
"En guise de réponse, le jeune homme se borna à ôter sa chemise et à montrer, comme l'eût fait un singe, toute l'ampleur de sa virilité. Il y eut des cris. Jamais les dames qui assistaient à la chasse ne l'avaient trouvé si intéressant, tout en feignant, cela va sans dire, de paraître très scandalisées.
"De guerre lasse, on lui montra une assiette chargée de fruits, et il dégringola aussitôt de son perchoir.
"Le jeune sauvage de l'Aveyron, depuis cette époque, ne parut plus dans le monde. Il y devenait un peu trop compromettant..."

Pauline - qui conservait un délicieux souvenir des instants passés avec les Noirs de Saint-Domingue regretta profondément de ne pouvoir goûter à cet amusant sauvage.
Elle devait se consoler en épousant le prince Borghèse
...
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MessageSujet: NAPOLEON ET LES FEMMES   NAPOLEON  ET LES FEMMES - Page 18 EmptyLun 17 Déc - 15:32

PAULINE POSE NUE DEVANT CANOVA



La princesse avait le désir profond d'aider les artistes. - PAUL D'ARISTE -



EN arrivant à Paris, Pauline s'aperçut que ses frères et soeurs avaient - en un an - décuplé leur fortune grâce à l'ascension de Bonaparte, et qu'ils vivaient tous dans de somptueuses demeures. Piquée, elle alla demander de l'argent au Premier Consul et acheta l'hôtel Charost, faubourg Saint-Honoré (actuelle ambassade d'Angleterre).
Là, elle aménagea tout de suite une chambre douillette pourvue d'un lit propice aux ébats les plus compliqués, et se prépara à y faire entrer tous les messieurs qui lui plairaient.
Tout d'abord, elle renoua avec le comédien Lafon dont elle n'avait pas oublié la vigueur. Cette liaison donna lieu à une scène assez savoureuse. Un soir, Pauline éclata en sanglots :

- Quand je te vois avec moi dans ce lit, dit-elle à son amant, j'ai l'impression que mon mari vit encore...

Le comédien, désolé, dut faire des prodiges pour consoler la trop sensible veuve.


Puis Pauline donna successivement son "bijou de famille" - comme disaient les poètes légers du temps - à l'amiral Decrès, ministre de la Marine et des Colonies, et à une foule de petits-maîtres, dont nous assure un mémorialiste, "elle ne connaissait pas toujours le nom"...
Bonaparte, une fois de plus, s'inquiéta. Pensant qu'un époux calmerait cette frénésie sensuelle, il décida de remarier sa soeur sans tarder.
Justement, la jeune femme venait de prendre pour amant un homme riche, pourvu de titres et point mal fait de sa personne.

- Ce garçon fera l'affaire, déclara le Premier Consul à son frère Joseph. En outre, il peut nous concilier les royalistes. Je te charge des premiers pourparlers.

Il s'agissait du prince Camille Borghèse, arrière-petit neveu du pape Paul V.
Joseph convoqua le cardinal Caprara, légat du pape, et lui déclara sans rire que sa soeur avait été compromise par le prince.


- Seul, un mariage pourrait sauver la situation, ajouta-t-il.

Le prélat courut chez le prince qui fut épouvanté.
Ce jeune homme voulait bien batifoler agréablement sur une courtepointe en compagnie de la veuve du général Lecler, mais l'idée de l'épouser et d'être un illustre cocu ne lui était jamais venue.
Le cardinal Caprara lui fit comprendre qu'il courait un grand danger en s'opposant au désir de Bonaparte.
Finalement, Borghèse, la mort dans l'âme, accepta.
Le mariage fut célébré à Mortefontaine, et le prince, inquiet, lut attentivement le contrat. On le vit alors soupirer et adresser un sourire radieux et reconnaissant aux Bonaparte présents.
Tous crurent que le nouveau beau-frère les remerciait de lui donner pour compagne la plus jolie femme du monde. Ils ignoraient qu'en Italie il était d'usage de faire figurer dans les contrats de mariage le nom de l'amant de la fiancée parmi son apport dotal, et que le prince s'attendait à trouver dans la corbeille une liste démesurée de noms inconnus
...
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MessageSujet: NAPOLEON ET LES FEMMES   NAPOLEON  ET LES FEMMES - Page 18 EmptyLun 17 Déc - 19:10

Le jeune couple partit bientôt pour Rome où il s'installa, en décembre 1803, au palais Borghèse. Pauline, qui n'avait aucune connaissance artistique, ne goûta que modérément les merveilles qui se trouvaient réunies dans sa nouvelle demeure. En revanche, elle s'amusa follement des farces et attrapes que, suivant la mode du temps, les architectes avaient multipliées pour égayer les invités. "Le promeneur s'apprêtait-il à franchir un ruisseau, le pont rustique s'écartait. Des bancs se soulevaient quand il voulait s'y asseoir. Un peu plus loin, il posait le pied sur une pierre apparemment très innocente et il recevait un jet d'eau dans la figure..."

Mais ces innocentes plaisanteries finirent pas lasser Pauline qui n'aimait qu'une seule distraction au monde...
Or, justement, le prince Borghèse ne se montrait pas le brillant jouteur qu'elle avait espéré.
Elle sombra donc bientôt dans un ennui profond.
Fort heureusement, Bonaparte eut la bonne idée de se faire sacrer empereur, ce qui permit à Pauline de courir à Paris.
Elle y eut de nombreuses aventures. Celle-ci, entre autres, qui est relatée par plusieurs chroniqueurs :


Un jour - ou plutôt une nuit, - c'était en 1805, on donnait une fête au jardin du Luxembourg. Une femme d'une très jolie tournure semblait regarder avec la plus vive attention les préparatifs d'un feu d'artifice. Elle était habillée modestement, mais avec beaucoup de goût... On la devinait nous dit-on, "bien supérieure à sa toilette".
"Quoiqu'elle eût le visage couvert d'un voile qui dissimulait ses traits, écrit Doris, un jeune homme la remarqua, et, après l'avoir quelque temps observée, vint se placer à côté d'elle. Bientôt, la conversation s'engagea. La femme - une petite bourgeoise, sans doute mariée à un ennuyeux barbon - hésitait à répondre et semblait très intimidée. Evidemment, elle était vertueuse et elle n'avait pas l'usage du monde. Cependant, elle s'humanisait peu à peu, et son voile ne l'empêchait ni d'être détaillée par son compagnon de hasard, ni de le détailler elle-même. Elle remarqua qu'il était bien planté, solide, agréablement tourné. Le feu d'artifice tiré, il offrit une glace, qu'elle accepta.
Encouragé et convaincu maintenant qu'il avait affaire à quelque grisette en instance d'amant, il demanda à la jeune femme de la reconduire chez elle. Elle refusa avec un air pudique, mais elle voulut savoir le nom de cleui avec qui elle venait de passer une si agréable soirée.


"Le lendemain, le jeune homme recevait de l'inconnue une lettre qui lui donnait rendez-vous le jour suivant, à sept heures, près du grand bassin. Ils furent exacts l'un et l'autre, également intéressés par l'aventure. Ils causèrent un peu plus intimement que l'avant-veille. La dame apprit à ce jeune homme qu'elle se nommait Amélie, mais, comme il commençait à devenir pressant, elle s'échappa, légère et un peu ironique en promettant de donner bientôt de ses nouvelles.
"Trois jours après, un nouveau billet fixait cette fois le rendez-vous chez Mlle D... lingère, rue du Bac, n°188, à huit heures du soir. L'amoureux - car il l'était déjà, et sérieusement - va chez la lingère, demande une clef qu'on lui donne, et pénètre dans une chambre meublée avec beaucoup de goût. Presque aussitôt arrive, très émue et d'autant plus jolie, la charmante Amélie... Ils ne se quittèrent que très satisfaits l'un de l'autre. Ils s'étaient montré, si j'ose m'exprimer ainsi, le fond de leur coeur.


"Plusieurs rendez-vous suivirent, puis, brusquement, les petits billets qui annonçaient l'heure tant attendue cessèrent. Le jeune homme, désolé, courut chez la lingère. On ne connaissait pas Amélie. Elle n'était qu'une cliente d'occasion. Son nom, son adresse, on les ignorait.

"Deux après, notre jeune homme assistait par hasard à un spectacle de la Cour. Tout à coup passe devant lui une femme couverte de diamants et conduite par un des grands dignitaires de l'empereur. Il la regarde, très étonné. Et il reconnaît l'inconnue du Luxembourg. A un de ses voisin, il demande d'un air détaché comment elle s'appelle et on lui répond :

" - C'est la princesse Borghèse, la soeur de l'empereur.

Quelques minutes plus tard, il avait réussi à s'approcher d'elle et à attirer son attention. Elle le reconnaît à son tour et une rougeur fugitive monte à ses joues, puis elle détourne la vue.
"Le lendemain, le jeune homme recevait l'ordre de se rendre chez le comte de Montalivet, ministre de l'Intérieur. Là, on lui apprit qu'il était nommé à une place importante dans le département du Nord, mais qu'il fallait partir dans les quarante-huit heures. Il accepta avec reconnaissance, et, vingt-quatre heures plus tard, il était rendu à son poste.

Ainsi, les débordements de la princesse Borghèse pouvaient avoir des conséquences inattendues dans l'édifice sacro-saint de l'Administration Impériale...

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MessageSujet: NAPOLEON ET LES FEMMES   NAPOLEON  ET LES FEMMES - Page 18 EmptyVen 21 Déc - 2:22

Au printemps de 1805, Pauline imagina de faire exécuter sa statue par Canova.
Le célèbre sculpteur vint à Paris, considéra longuement la soeur de l'empereur et décida de la représenter en "Vénus victorieuse", allongée, à demi vêtue, sur un canapé. Ravie, la princesse Borghèse se déshabilla complètement et montra à Canova une poitrine en tout point parfaite.

- Cette partie est si belle, dit l'artiste en connaisseur, que je ne puis espérer faire mieux que la nature. je me contenterai donc de mouler vos seins.

Pauline accepta avec joie. Pourtant, lorsqu'on en arriva à l'opération du moulage, Canova sembla hésiter à mettre la main sur "les objets parfaits".

- Mais allez donc ! lui dit la princesse. De quoi avez-vous peur ?
- De devenir amoureux de ma statue.
- Allez toujours, Canova ! Vous êtes un flatteur !

Lorsque la statue fut terminée, elle provoqua un scandale, et la soeur de Napoléon fut accusée d'impudeur.


- Comment avez-vous pu poser ainsi toute nue ? lui demanda une dame de la cour.

- Oh ! dit simplement Pauline, il y avait du feu dans l'atelier...


La soeur de l'empereur, dont les ardeurs intimes semblaient croître avec l'âge, eut bientôt, nous dit un mémorialiste, "la désagréable impression d'être assise en permanence sur un tison".
Aussi la voyait-on demander à tous les messieurs qui l'entouraient de vouloir bien éteindre ce feu avec les moyens que la nature avait mis à leur disposition.
Son trouble était si grand qu'il lui arrivait de ne plus savoir très bien distinguer entre les sexes et de s'adresser parfois à des dames..
.

Le prince Borghèse l'apprit et en fut mécontent.
Que sa femme le trompât avec quelque bel officier de l'armée impériale était, somme toute, un des risques de l'époque, mais qu'elle lui fît des infidélités avec des femmes lui sembla proprement insupportable.
Un instant, il eut envie de faire une scène terrible à Pauline. Puis il pensa que la situation pouvait être utilement exploitée. Il alla trouver son épouse et lui fit comprendre qu'en échange de sa mansuétude il lui serait agréable d'avoir le grand cordon de la Légion d'honneur, le titre de citoyen français, la Toison d'or et un poste dans l'armée.
Pauline promit d'intervenir auprès de Napoléon, et, bientôt, le prince Borghèse, ravi, se voyait décerner toutes les dignité sollicitées avec le grade de "chef d'escadron à la suite des grenadiers à cheval".

Comme il allait remercier Pauline, celle-ci l'arrêta :

- Ce n'est pas tout.

Et l'oeil brillant de malice, elle lui annonça qu'elle avait obtenu également qu'il fût envoyé immédiatement au camp de Boulogne...
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MessageSujet: NAPOLEON ET LES FEMMES   NAPOLEON  ET LES FEMMES - Page 18 EmptySam 22 Déc - 0:28

Quelques jours plus tard, Borghèse allait retrouver son escadron, et Pauline, débarrassée de ce mari tatillon (maniaque), jaloux et impuissant, se lança à corps perdu - jamais l'expression n'a été plus juste - dans l'adultère mondain. (Je ne sais pas pour vous, mais moi, l'histoire hystérique de Pauline me gave... ((m'ennuie)) Rolling Eyes ).
Entre deux joutes amoureuses, elle recevait. Ces réceptions permettaient d'ailleurs à la jeune femme de recruter de nouveaux amants. Comme elle ne pouvait, malgré sont extraordinaire tempérament, les faire entrer tous à la fois dans son lit, elle en mettait de côté et nommait joliment cette petite réserve sa "pépinière"...

Pour allécher les hommes qui venaient à ses soirées, Pauline utilisait les moyens les plus stupéfiants. C'est ainsi que, sur son ordre, le nègre Paul, qui la servait, traversait le salon en portant ostensiblement un magnifique bidet (cuvette avec robinet pour se laver l'intimité) en porcelaine dorée dont elle était très fière...

Elle allait parfois plus loin encore, n'hésitant pas à se livrer sur quelques-unes de ses amies à des attouchements fort émouvants.


Ecoutons la duchesse d'Escars :

"Elle me fait dire qu'elle désirait me voir... Malgré toute la prévention que j'éprouvais pour la soeur du tyran qui me persécutait, je ne pus m'empêcher de la trouver très jolie. Elle était mise avec une extrême élégance. Elle avait pour dame d'honneur Mme de C ...(de Chambeaudoin). Je prie mes lecteurs de croire à la vérité de ce que je vais écrire :

"Cette Mme de C... était couchée par terre, étendue sous les pieds de la princesse, qui les avait l'un et l'autre sur sa gorge très nue de cette femme. Je ne puis exprimer quelle fut mon indignation. Quant à Mme de C... elle était si visiblement née pour cette infâme place qu'elle n'en paraissait nullement confuse.
"Le préfet ne put s'empêcher de lui dire : "Mais, madame, cette attitude est bien fatigante.
" - Oh ! non, monsieur , répondit-elle, j'y suis accoutumée.
"Pour moi, assise à c^té de Mme Borghèse, je ne pouvais détourner mes yeux d'un tel spectacle et j'avais beaucoup de peine à m'empêcher de rire tout haut en voyant cette gorge qu'un pied promenait.
Mme Borghèse me demanda si j'aimais le spectacle et quel était celui que je préférais.

"La tragédie, lui répondis-je.
" - Et moi aussi, reprit Mme de C... J'aime la tragédie parce qu'elle est l'âme.
"Sa voix, altérée par le pied de Mme Borghèse, rendait encore la phrase encore plus plaisante. J'étouffais l'envie de rire, j'abrégeai ma visite... J'y retournai plusieurs fois. J'y vis d'autres femmes sous ses pieds
.
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MessageSujet: NAPOLEON ET LES FEMMES   NAPOLEON  ET LES FEMMES - Page 18 EmptySam 22 Déc - 18:22

En voyage, le comportement de Pauline était plus impudique encore. Maxime de Villemarest écrit en effet :

"Quand la princesse avait trop grand froid aux pieds, il fallait qu'elle (Mme de Chambeaudoin) eût de temps à autre des complaisances peu décentes pour que Pauline trouvât à mettre ses pieds dans un endroit assez chaud. (1)

(1) Marquise de NADAILLAC, duchesse D'ESCARS, Mémoires. Pauline avait contracté cette curieuse habitude aux Antilles. L'auteur des Souvenirs d'un osif ou l'esprit des autres écrit en effet : "La princesse Borghèse avait conservé du voyage qu'elle avait fait à Saint-Domingue beaucoup trop d'habitudes de la vie des colonies. Des négresses, obéissantes de cette île s'étaient facilement prêtées à la fantaisie qu'elle avait d'appuyer sur leur poitrine ses pieds pour les réchauffer."

Cette désinvolture se manifestait d'ailleurs en toute occasion. Lors d'un de ses voyages à Plombières, la princesse s'arrêta à Bar-le-Duc où son ancien beau-frère, Louis Leclerc, qui était préfet de la Meuse, l'accueillit avec pompe. Dès qu'elle fut descendue de calèche, elle demanda un bain.

- Il est prêt, lui dit le préfet.
- Tant mieux, je vous remercie. Mais après, j'aurai besoin d'une douche.

Louis Leclerc se mordit les lèvres :

- Impossible, je n'ai pas d'appareil !

Pauline éclata de rire :

- Rien n'est plus simple ! Il suffira de percer un trou dans le plafond au-dessus de la baignoire et de faire couler l'eau par ce trou. Vite ! vite ! envoyez chercher des ouvriers !

La mort dans l'âme, le préfet s'exécuta. Et comme Pauline avait tenu à se baigner dans le salon d'honneur, on perça le plafond qui fut complètement détérioré.
Alors la princesse se dévêtit et appela Paul, un nègre, qui, suivant un rite qu'elle avait institué, la prit, nue, dans ses bras et la plongea dans la baignoire remplie de lait.
Lorsqu'elle eut terminé ses ablutions lactées, elle fit signe, par l'ouverture du plafond, aux ouvriers qui se trouvaient à l'étage supérieur.


- Je suis prête pour la douche !

Les braves Meusiens, fortement émoustillés par le spectacle qui leur était offert, n'osaient bouger. Les yeux écarquillés, ils se donnaient des bourrades dans le dos en murmurant des jurons en patois.
Enfin, Pauline les rappela à leur devoir, et c'est avec le plus grand respect qu'ils lui versèrent un seau d'eau sur la tête...


A Plombières, Pauline rencontra le comte de Forbin, en tomba amoureuse et devint sa maîtresse. A son retour à Paris, pour justifier la présence de ce monsieur dans sa chambre, elle le nomma chambellan, et les mauvaises langues s'empressèrent de raconter que "si le titre de valet de lit existait, elle le lui eût certainement donné."

En avril 1807, épuisée par ses excès, Pauline partit, sur l'ordre de son médecin, se reposer à Gréoux, dans les Basses-Alpes. Malheureusement, Forbin vint l'y rejoindre, et la princesse continua de se fatiguer...

"Certains après-midi, raconte Roland Bachelard avec sa verve méridionale, le bruit du plaisir que menait S.A.I. avec le comte était si grand que les cigales se taisaient, comme frappées de stupeur..."
En septembre, Pauline se rendit à Marseille en compagnie d'hommes dont elle put vérifier le dévouement à l'occasion d'une halte. Ecoutons Barras :

"Elle s'arrêta en haut d'une prairie, près d'une campagne possédée par M. César Roubaud où elle devait coucher. Des courtisans se déshabillèrent respectueusement pour étendre sur la pelouse leurs habits, afin que la princesse fût s'asseoir sans péril de l'humidité de la terre.
M. Desbains, sous-préfet de Grasse, frisé à l'oiseau royal, offrait son dos pour appuyer celui de la princesse : le général Guyot, couché en travers, plaçait les deux pieds de la princesse sur son ventre. Ce groupe grotesque amusa fort les passants et les curieux."

Mais Pauline allait bientôt se livrer à des excentricités plus grandes encore...
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MessageSujet: NAPOLEON ET LES FEMMES   NAPOLEON  ET LES FEMMES - Page 18 EmptySam 22 Déc - 18:55

PAULINE FAIT ENTRER L'EUROPE DANS SON LIT


Elle avait des vues larges. - ALFRED VIVIEN -


UN matin d'octobre 1807, dans le parc d'une villa d'Aix-en-Provence, une jeune femme et un jeune homme se promenaient, tendrement enlacés, s'embrassaient à chaque pas et se caressaient audacieusement en montrant tous les signes d'un violent désir. Derrière eux, deux homme, d'allure grave, marchaient en parlant de la politique.
Ce quatuor n'aurait rien eu de singulier si deux des promeneurs - et les moins discernables pour un passant non averti - n'avaient été unis par le mariage.

Pauline et le comte Forbin formaient en effet le couple passionné, tandis que le prince Borghèse marchait derrière en compagnie du général Cervoni.
Celui-ci était un joyeux drille. A certain moment, voyant Forbin glisser sa main dans le corsage de la princesse, il se tourna vers Borghèse :

- J'ai l'impression, dit-il, en riant que ce coquin est en train de toucher des fruits qui appartiennent à Votre Altesse...
Le prince fut atrocement vexé. Au point qu'oubliant toute dignité il répliqua :

- Ma femme peut se féliciter d'être la soeur de l'empereur. Sinon, il y a longtemps que je lui aurais donné une correction ! ...
Après quoi, l'envie de se promener lui étant passée, il donna le signal de retour à la villa.
Quatre jours plus tard, Napoléon, informé par le prince des frasques de sa soeur, envoyait M.de Forbin sur la frontière d'Espagne...

Pauline fut désespérée par le départ de son amant. Pour oublier, elle alla s'installer à Nice, dans un merveilleux palais dont le jardin bordait la mer. Mais, au bout de quelques jours, nous dit l'auteur des Chroniques secrètes, "elle eut envie de se faire gonfler la mouflette". Elle chercha dans la liste des hommes qu'elle gardait en réserve, se souvint d'un compositeur italien rencontré à Paris et l'invita à venir passer quelques jours avec elle.

Ce musicien, qui se nommait Félix Blangini, était amoureux fou de Pauline. Au reçu de sa lettre, il poussa un cri de joie, ferma son piano, car il était soigneux, fit un paquet de ses dernières romances et grimpa dans une voiture.
Tandis qu'il roulait vers Nice, la princesse Borghèse trompait son impatience avec des valets de chambre savoyards qu'elle avait choisis, non en fonction de leur connaissance de l'étiquette, mais parce qu'ils étaient "généreusement pourvus par la nature".
Lorsque des amis se permettaient un mot d'affectueuse réprobation pour ces aventures indignes d'une soeur d'empereur, Pauline haussait les épaules :

- Dans la famille Bonaparte, disait-elle, nous avons le sang chaud !

Ce qui était - il faut bien le reconnaître - la plus stricte vérité. Henri d'Almeras nous le confirme :


"On peut refuser aux soeurs de Napoléon bien des choses, douceur de caractère, délicatesse d'esprit, modération dans l'exercice du pouvoir et la recherche des titres, mais il n'est que juste de reconnaître qu'elles avaient un fort tempérament. A cet égard, elles se montraient tout à fait supérieures, et c'était peut-être leur manière d'avoir du génie.
"Dans la merveilleuse destinée de leur frère, elles semblaient n'avoir vu qu'une occasion de satisfaire plus facilement leurs exigences amoureuses. Elles y parvenaient à peine, quoiqu'elles eussent à leur disposition tant de soldats et d'officiers. C'est encore Thiébault qui le constate - il les avait vues de près - dans cette phrase très nette où il s'exprime avec la liberté d'un soldat qui sait mal farder la vérité : "On peut avancer que toute la garde impériale n'aurait pas suffi, je ne dis pas pour les contenter, mais pour les contenir." Et la garde impériale était un corps d'élite."


Pauline était naturellement, la plus douée de toutes :

"Des amants de la jolie Pauline, il y en eut évidemment un très grand nombre qui ne furent que momentanés et occasionnels, des soldats, des pages, des laquais. Ils profitèrent d'une minute d'énervement, d'une température orageuse, d'une journée printanière, d'une lecture excitante. Ils s'acquittèrent le mieux possible, rien ne nous interdit de le supposer, de leurs fonctions passagères et d'ailleurs fort agréables, mais ils ne tirèrent pas à conséquence. Ils ne furent que des collaborateurs fortuits qu'on paya avec de menus avancements ou avec des gratifications. Nous ignorons leurs noms et, à vrai dire, ce n'est pas à cause de leur nom que Pauline s'était adressée à eux. Humbles ouvriers d'une tâche méritoire à laquelle d'autres, plus illustres, se sont consacrés avec plus de gloire, ils ont passé inaperçus. Ils sont rentrés dans le silence et dans l'oubli sans se douter que, pendant quelques instants, grâce au regard bienveillant que jeta sur eux une soeur d'empereur, ils furent de l'histoire."


[color=olive]Enfin Blangini, exténué, mais rayonnant, arriva à Nice. Il fut reçu de façon charmante. Pauline le conduisit dans une salle de bains, le lava, l'essuya, lui fit prendre une collation et l'entraîna sur un lit...
Pendant deux mois, il mena une vie paradisiaque. Entre deux duos amoureux, ils se mettait au piano et composait une romance passionnée pour sa maîtresse. Un jour, Pauline, qui n'avait pourtant aucune idée de la prosodie, écrivit un petit poème fort médiocre, que le compositeur, toujours exalté, déclara digne de Virgile et mit en musique...
Folle de joie, la princesse convia des amis et entreprit de chanter son oeuvre. Ce fut un désastre. Comme elle chantait aussi faux que Napoléon, les invités, montraient un air navré. "Finalement, nous dit Alfred Vivien, la princesse poussa un cri étrange et embrassa avec fougue M. Blangini... On comprit alors que la romance était terminée. Il y eut un soupir général, puis des bravos.
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MessageSujet: NAPOLEON ET LES FEMMES   NAPOLEON  ET LES FEMMES - Page 18 EmptyJeu 27 Déc - 19:05

Au mois d'avril 1808, le prince Borghèse arriva à Nice avec une nouvelle qui atterra Pauline. Il venait d'être nommé "gouverneur général des neuf départements au-delà des Alpes".
"Etincelante de colère", selon le mot de Blangini, elle dut suivre son mari à Turin, mais se montra insupportable tout au long du voyage.
Entendons M. de Villemarest :

"A peine elle était dans sa voiture qu'elle voulait qu'on la portât et, quelques minutes après, il fallait remonter en voiture. L'ennui et l'impatience, à grand-peine contenus, que l'on voyait sur la figure du prince étaient à faire pitié ; aussi, tant qu'il le put, fit-il la route à pied. Sa femme le tourmentait sur tous les points possibles ; elle lui disait qu'elle voulait prendre le pas sur lui, arguant d'un senatus-consulte récent : elle y avait vu que le prince avait pas immédiatement après les princes français, d'où elle concluait que les princesses françaises se trouvaient dans le même cas et que, par conséquent, ce serait à elle à répondre aux harangues des autorités. Vainement le prince objectait que c'était lui qui était le gouverneur général et qu'elle n'était point, elle, la gouvernante générale ; elle n'en voulait point démordre et lui disait alors d'une façon peu aimable qu'il n'étiat gouverneur général que parce qu'il était son mari, et qu'il ne serait rien s'il n'eût pas épousé la soeur de l'empereur, ce qui au fond, ne manquait pas de quelque vérité. Alors le prince l'appelait : "Paulette ! Paulette !..." du ton le plus doux possible ; mais je t'en souhaite, Paulette avait de la tête et son état capricieux demeurait en permanence."

A la première halte en pays piémontais, un incident vaudevillesque eut lieu : au moment où le prince allait prendre la parole pour répondre au maire qui venait de prononcer un petit discours de bienvenue, Pauline intervint :

- Taisez-vous ! C'est à moi de parler !

Borghèse se redressa :

- Non, madame, c'est à moi... Je suis gouverneur !

Pauline se planta devant lui :

- Peut-être ! Mais c'est à moi de répondre aux discours officiels. Je suis la soeur de l'empereur...
- Je suis votre mari ! criait le prince.
- Cela ne vous donne aucun droit de préséance ! Taisez-vous ! ...

Pendant cet extravagant dialogue, la municipalité et les habitants du village, éberlués, n'osaient faire un geste. Finalement, le maire s'approcha :

- Altesses ! Altesses ! gémit-il.


Mais les altesses se disputaient avec une telle violence qu'aucune prière ne pouvait les atteindre. Lorsqu'elles furent à bout de souffle et d'arguments, elles remontèrent dans leur voiture en claquant les portières, et le cocher fouetta les chevaux.
Cette scène pénible et bouffonne tout à la fois fit très mauvaise impression.
Trois jours plus tard, Pauline arrivait à Turin et s'installait dans son palais avec Borghèse et deux grands Savoyards qu'elle emmenait partout "en-cas".
Inconsciente du tort qu'elle pouvait faire à l'empereur, elle continuait sa vie galante...


La situation de Blangini à Turin était extrêmement inconfortable. Pauline le traînait sur tous les lits, l'embrassait publiquement et poussait l'impudeur jusqu'à le faire descendre de calèche pendant une excursion. Alors, nous dit la Chronique Indiscrète, elle l'emmenait dans un buisson, et là, sans se soucier des cochers, des dames de la suite et des invités qui attendaient, elle se faisait "picorer la pelouse".
Or, Napoléon avait envoyé à Blangini l'ordre formel de quitter l'Italie.
Le pauvre musicien passait donc son temps à trembler de peur. Ce qui l'empêchait parfois de se montrer le brillant partenaire qu'eût désiré Pauline. Un de ses biographes, Valentin Tellier, nous dit, en effet :
"Blangini vivait dans la crainte constante d'être arrêté et jeté en prison pour avoir désobéi à l'empereur. Lorsqu'il se mettait au lit avec Pauline, il avait soin de placer différents meubles devant la porte. Il raconta plus tard, lorsqu'il fut maître de chapelle du roi de Westphalie,, qu'un après-midi, alors qu'il exécutait un savoureux duo avec la princesse Borghèse, un bruit de pas retentit dans le couloir.
"Pauline, qui ne voulait pas perdre une seconde de plaisir, lui demanda de continuer d'exécuter sa partie.
Grelottant de peur, le malheureux s'efforça d'obéir ; mais hélas, la nature refusa de le suivre dans son entreprise. Il s'arrêta, honteux. La princesse furieuse, commença par l'insulter avec grossièreté, puis elle lui ordonna d'aller chercher un de ses valets de chambre savoyards. Le musicien courut à l'office, ramena le plus grand, l'enferma avec Pauline, et s'empressa de rejoindre ses appartements."

Après cette défaite, Blangini, mort de peur et de honte, monta dans une voiture et quitta Turin pour n'y jamais revenir
.
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MessageSujet: NAPOLEON ET LES FEMMES   NAPOLEON  ET LES FEMMES - Page 18 EmptyJeu 27 Déc - 19:16

Privée de son beau musicien, Pauline n'eut plus qu'un désir : retourner en France pour y goûter les messieurs qui constituaient sa petite réserve. Le prince Borghèse s'opposant à son départ, elle se mit au lit, refusa toute nourriture et déclara qu'elle allait mourir.
Finalement, elle obtint d'un médecin ami l'ordre d'aller de toute urgence prendre les eaux d'Aix, en Savoie. Le 6 juin, elle s'installait au bord du lac du Bourget. Le 7, elle commençait sa cure. Le 8, elle prenait un amant. Le 12 juillet, complètement guérie, elle parait pour Paris.
Lorsqu'à son retour d'Erfurt, Napoléon trouva sa soeur installée faubourg Saint-Honoré, il entra dans une violente colère :

- Je veux qu'elle reparte immédiatement retrouver son mari à Turin ! Le scandale a suffisamment duré !


Informée de la décision de son frère, Pauline ne perdit pas une seconde. Elle mit une robe moulante, dont le décolleté s'arrêtait à la point des seins, et courut aux Tuileries.
En la voyant entrer dans son cabinet, l'empereur oublia sa colère.

- Princesse Pauline, dit-il, vous êtes vraiment la plus jolie femme du monde.
- J'hésite à le croire, sire, puisque vous voulez m'éloigner de votre capitale...

Napoléon sourit :

- Restez ici autant qu'il vous plaira. Vous êtes, en effet, le plus bel ornement de ma cour ! ...

Et pour lui montrer que sa générosité n'avait point de borne, il lui offrit le château de Neuilly.
Pauline savait remercier. Quelque temps après, elle faisait entrer dans le lit de son frère une dame de sa suite, la belle Christine de Mathis, dont la fesse avait attiré l'oeil impérial..
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MessageSujet: NAPOLEON ET LES FEMMES   NAPOLEON  ET LES FEMMES - Page 18 EmptyDim 30 Déc - 18:21

A Neuilly, dans ce palais où tout était conçu pour le plaisir, Pauline, livrée à elle-même, vécut de la façon la plus impudique qui soit. Elle se promenait nue dans les salons, recevait ses amis dans son bain, et se donnait les soins les plus intimes devant ses domestiques.
Ecoutons Constant :


"Les dames de service près d'elle étaient admises dans son appartement pendant sa toilette qu'elle prolongeait à dessein de se faire admirer. Souvent un intervalle assez long séparait le moment où on lui offrait sa chemise de celui où on la lui passait ; pendant ce temps, elle se promenait dans sa chambre avec autant d'aisance que si elle eût été totalement vêtue. Il y a sur cette toilette des détails qui paraissent incroyables, mais dont je n'aime pas à rappeler le souvenir, même dans le secret de ma pensée."

Naturellement, les amants occupaient la majeure partie du temps de Pauline. Il y avait celui du matin, celui du déjeuner, celui de l'après-midi et celui qu'elle gardait, si j'ose dire, pour la bonne bouche et qui avait le privilège de passer la nuit entière avec elle.
Ces messieurs étaient, bien entendu, choisis dans l'armée et plus spécialement dans l'état-major de Berthier. Le maréchal avait, en effet, l'habitude de s'entourer de très beaux officiers que la bagatelle attirait plus que le massacre...
Or, parmi ces jeunes gens, que l'on appelait "les dadais de Berthier", Pauline remarqua un jour le beau Jules de Canouville, chef d'escadron de hussards, dont le nez en bec d'aigle lui fit battre le coeur.
Elle l'attira à Neuilly pour une nuit, et en tomba amoureuse. Aussitôt, elle l'installa dans une aile du château et, rompant pour quelque temps avec les membres de son haras habituel, elle mena, à ses côtés, une vie presque conjugale.
L'anecdote que nous rapporte Turquan nous montre que Canouville jouait parfaitement son rôle d'époux.
Ecoutons-le :

"Le dentiste Bousquet, qui était le dentiste à la mode, avait été appelé auprès de la princesse Pauline pour visiter la bouchet et nettoyer les dents de son Altesse Impériale. Il se rendit avec empressement à cet appel.
On l'introduisit dans une chambre où était la princesse Pauline, vêtue d'un charmant déshabillé du matin. Sur une chaise longue, un joli jeune homme, paresseusement étendu, contemplait la princesse d'un oeil langoureux. Le dentiste avait écouté avec respect les recommandations de Son Altesse, et celle-ci se disposait à ouvrir la bouche, quand le jeune homme, qui suivait de l'oeil la petite scène, laissa tomber ces mots :

" - Monsieur, prenez bien garde, je vous prie, à ce que vous allez faire. Je tiens extrêmement aux dents de ma Paulette, et je vous rends responsable de tout accident.
" - Soyez tranquille, mon prince, répondit le dentiste, je puis assurer à Votre Altesse Impériale qu'il n'y a aucun danger.

"Et l'homme se mit au travail. Tandis qu'il raclait avec un soin quasi religieux les dents de la princesse, le jeune homme continuait ses recommandations sur le ton de la plus tendre sollicitude. Enfin le dentiste se retira. En traversant le salon d'attente, les dmaes et les chambellans de service lui demandèrent des nouvelles de Son Altesse. Le dentiste rassura toutes les inquiétudes.
" - Son Altesse Impériale est très bien, dit-il ; elle doit être fort heureuse de l'attachement qui lui porte son auguste époux et qu'il vient de témoigner devant moi d'une façon touchante. En vérité, cela réconforte le coeur de voir un ménage si uni...

"Personne ne se permit de détromper le sensible dentiste et de lui dire que le beau jeune homme qui l'avait tant édifié par sa sollicitude "conjugale" était le capitaine de Canouville. Mais, le praticien parti, chambellans et dames du palais ne purent retenir un fou rire qui retentit longtemps dans l'antichambre princière."

Hélas ! cette agréable existence devait se terminer par un éclat.
Le tsar Alexandre avait offert à Napoléon trois pelisses de zibeline d'un prix inestimable. Toujours généreux, l'empereur donna la première fourrure à Pauline, la seconde à Désirée Clary, en souvenir de leur amour d'adolescence, et garda le troisième pour lui.
Or, un soir que Canouville s'était montré particulièrement fougueux, la princesse Borghèse, ne sachant comment le récompenser, lui fit cadeau de quelques diamants et de sa pelisse de zibeline. Ravi, le capitaine déclara qu'il porterait désormais cette merveilleuse parure avec son uniforme de cérémonie.
Quelques jours plus tard, Napoléon passait une grande revue dans la cour des Tuileries. Soudain, pour une raison inconnue, le cheval de M. de Canouville se mit à reculer malgré les efforts de son cavalier et vint donner du derrière dans le flanc de la monture de l'empereur.
Furieux, Napoléon se retourna, vit Canouville et avisa la pelisse de zibeline.

- Quel est cet officier ? cria-t-il.

A ce moment, il reconnut également les boutons de diamants qu'il avait donnés à sa soeur en Italie.
Sa colère fut terrible :

- Berthier, hurla-t-il. Que font ici tous ces c... que vous avez autour de vous ? Pourquoi ne sont-ils pas à l'école de guerre ? Que signifie cette inaction quand le canon gronde quelque part ? Berthier ! ... Il faut tout vous dire et vous ne voyez rien ! ...

Penaud, Berthier, suivant sa déplorable habitude, se rongeait les ongles sans répondre.

- Eh bien ! dit l'empereur, que M. de Canouville parte ce soir même pour le Portugal. Il doit y avoir des dépêches à porter au prince d'Essling. C'est lui qui les portera...


Cet incident causa un énorme scandale à la Cour.
Le soir même, le trop élégant capitaine roulait vers les Pyrénées, tandis que Pauline, rendue à sa solitude cherchait déjà un nouvel amant...

Tandis que la princesse Borghèse "consommait à l'écart", comme disent les théologiens lorsqu'ils se penchent sur le problème de l'adultère, Canouville arrivait à Salamanque et se présentait chez la duchesse d'Abrantès.
Retenu à souper, il raconta ses amours avec Pauline, l'incident de la pelisse et la colère impériale. La duchesse, le voyant "tout gonflé de son chagrin", comprit qu'elle avait là une merveilleuse attraction à offrir à ses invités. Habilement, elle questionna Canouville sur les charmes et les qualités cachés de la princesse Borghèse.
Mis sur cette voie, le brave capitaine ne sut plus s'arrêter. Devant une assistance passionnée, il décrivit en pleurant les nuits d'amour passées avec Pauline, les postures qu'elle aimait prendre, les caresses qu'elle désirait et celles dont elle était prodigue.
Le plaisir qu'il semblait trouver au récit de ces moments prodigieux autorisait toutes les indiscrétions.
Aussi les invités de la duchesse lui posèrent-ils bientôt, et sans cesser de garder un ton d'exquise compagnie, les questions les plus inouïes.
Certains s'enquéraient de la couleur exacte du pelage de Pauline ; d'autres des mots qu'elle prononçait à l'ultime moment du plaisir ; d'autres encore, du "durcissement de son tétin"...
Et Canouville, secoué de gros sanglots à la pensée du paradis perdu, répondait à tout sans faire grâce du plus petit détail.
Jamais la duchesse d'Abrantès n'eut un dîner plus réussi
.
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MessageSujet: NAPOLEON ET LES FEMMES   NAPOLEON  ET LES FEMMES - Page 18 EmptyDim 6 Jan - 20:59

Je fais une petite rectification : Canouville n'avait pas été envoyé, par Napoléon, au Portugal, mais en Espagne. Une erreur, dans le livre, que j'ai bêtement recopiée. .......... Laughing
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MessageSujet: NAPOLEON ET LES FEMMES   NAPOLEON  ET LES FEMMES - Page 18 EmptyMar 8 Jan - 19:09

A minuit, le capitaine, dont les joues luisaient encore de larmes, quitta la maion de Junot en compagnie du général Thiébault.
Ecoutons celui-ci nous conter la fin de cette extraordinaire soirée :

"Je crus qu'il allait également prendre congé de moi et s'acheminer vers son gîte, mais il s'arrêta, et là, au milieu de la rue, reprenant son ton lamentable :


" - Mon général, me dit-il, auriez-vous le courage d'abandonner un malheureux jeune homme ?
" - Certes, non, lui répondis-je, et quand vous ne dînerez ou ne déjeunerez pas chez la duchesse, j'espère bien que vou regarderez ma table comme la vôtre.
" - Et pour cette nuit ?
" - Pour cette nuit ? Mais vous allez regagner votre lit et dormir.
" - Et quel lit ?
" - Parbleu, celui qu'on vous a préparé dans votre logement
" - Je n'ai pas de logement
" - Comment ? Vous ne vous êtes pas fait loger en arrivant ?
" - Non, mon général, et si vous m'abandonnez, je ne sais que devenir.
" - Et, tout en éclatant de rire, je l'emmenai chez moi.


"Là, ce fut une autre parade. En effet, comme j'ordonnais à mon valet de chambre de faire dresser un lit dans mon salon, il reprit :

" - Mon général, vous êtes si bon.
" - Eh bien ?
" - Eh bien ! je suis trop malheureux pour coucher seul.
" - Ah ça ! Vous ne voulez pas coucher avec moi ?
" - Non, mon général ; mais de grâce, faites-moi faire un lit dans votre chambre.

"Et je le fis. Au lieu de me coucher, il me fallut entendre le récit de son bonheur et de ses infortunes ; là vinrent les moindres circonstances de sa brillante aventure, le panégyrique des qualités, des charmes de sa princesse, l'aveu de sa passion pour elle, passion partagée, puis les détails de tout ce qu'il imaginait pour amuser son idole, pour l'encenser ; tout, jusqu'aux vers peignant les situations les plus intimes.

J'ARRÊTE LA, LE CLAVIER DERAILLE. JE DOIS TAPER COMME UNE MALADE POUR QUE LES LETTRES APPARAISSENT
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MessageSujet: NAPOLEON ET LES FEMMES   NAPOLEON  ET LES FEMMES - Page 18 EmptyMer 9 Jan - 18:27

où il s'était trouvé avec elle et que, pour qu'il pût mieux les dire, Talma lui avait appris à déclamer ; enfin, une investigation tellement minutieuse, tellement précise, de cette sculpturale personne, que si j'avais été statuaire, j'aurais pu faire la statue.
"Fournier prétendait que cette Paulette était le "grand cheval de bataille de Canouville". Le fait est que, toujours en selle, il aurait fallu le tuer pour le désarçonner."

Canouville ne demeura pas longtemps en Espagne.
Dès qu'il eut remis ses dépêches au prince d'Essling, il grimpa sur un cheval et reprit, à bride abattue, le chemin de Paris, "les yeux fixés", nous dit Albert Fournier dans son style particulier, "sur l'horizon où se profilait le lit généreux d'une amante adorée"...
Huit jours plus tard, il arrivait à Neuilly et se précipitait dans l'appartement de Pauline. Le spectacle qu'il y découvrit le stupéfia. Dans un fauteuil, la princesse, "fort retroussée", était en train de se faire "reluire le bijou" par le capitaine de dragons Achille Tourteau de Septeuil, autre dadais de Berthier.
Canouville demeurant figé sur le pas de la porte, Pauline, sans abandonner son occupation, l'interpella gentiment :

- Eh bien ! entrez capitaine !

Mais l'officier secoua la tête. Plus tard, il avouera :
"Voir Septeuil effectuer grossièrement et sans talent une besogne que je faisais, moi, avec tant de tact et de délicatesse m'écoeura."

Il repartit immédiatement vers l'Espagne avec son gros chagrin.


Quelques semaines plus tard, Septeuil étant devenu l'amant de Mme de Barral, ex-maîtresse de l'empereur (car tout le monde finissait par être un peu cousin de la main gauche dans cette délicieuse cour impériale), Pauline, furieuse, le fit envoyer en Espagne où il retrouva Canouville.
Pendant des mois, les deux hommes, pipe au bec, passèrent des soirées charmantes à se raconter leurs souvenirs respectifs sur la princesse lointaine...

Un jour, celle-ci apprit que Septeuil avait eu une jambe emportée au cours du combat de Fuentès. Elle poussa un cri :

- Oh ! c'est atroce !

Et comme déjà on s'émouvait devant son chagrin, elle ajouta :

- Oui, c'est atroce ! ... Cela fait un bon danseur de moins.

Au début de 1810, un jeune officier allemand, Conrad Friedrich, se présenta au château de Neuilly pour demander une recommandation à Pauline.
Comme il était fort beau, la princesse se sentit animée par cet esprit de conquête qui caractérisait Napoléon et rêva d'étendre son Empire sur ce territoire étranger...

- Revenez demain, lui dit-elle.

Discipliné, le jeune Allemand se présenta à l'heure convenue. Mais, cette fois, au lieu de le conduire dans le salon, le valet le fit entrer dans la salle de bains où Pauline, complètement nue sous une robe de mousseline transparente, finissait sa toilette.
Ecoutons le jeune Conrad :

"Je reconnus aussitôt, nous dit-il, la jolie soeur de Napoléon, dont les formes opulentes et d'une si parfaite plasticité apparaissaient sous des draperies à chacun de ses mouvements. Elle me pria de m'asseoir auprès d'elle sur un moelleux lit de repos..."

Ayant fait là ce qu'ils avaient de mieux à y faire, la princesse et l'Allemand se sentirent l'estomac creux.
"Elle fit servir dans une pièce voisine, ajoute Conrad, un repas exquis, qui nous réconforta. Je dus promettre en me retirant de revenir bientôt ; et je passai ainsi plus d'un après-midi auprès d'elle."

Naturellement, Pauline se lassa vite de ce beau Germain.
Mais pour le récompenser du plaisir qu'il lui avait donné, elle le fit nommer par Murat, lieutenant de cheveau-léger de l'armée napolitaine
.


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MessageSujet: NAPOLEON ET LES FEMMES   NAPOLEON  ET LES FEMMES - Page 18 EmptyMer 9 Jan - 18:33

La répudiation de Joséphine causa une immense joie à la princesse Borghèse qui détestait sa belle-soeur. Le mariage de Napoléon avec Marie-Louise allait la procurer des jouissances d'un autre ordre.
La cérémonie ayant amené à Paris un nombre considérable d'étrangers de qualité, Bernard Nabonne nous dit que" la princesse avait l'occasion, qu'elle ne voulait pas laisser échapper, de faire des comparaisons sur les mérites respectifs de chacune des races européennes". Successivement, elle mit en effet dans son lit un Autrichien, le prince Metternich, un polonais, le prince Joseph Poniatowski; et un Russe, le colonel Czernicheff. Petit choix qui, venant après l'Italien Blangini et l'Allemand Friedrich, donne une idée de la façon dont Pauline concevait l'utilisation du Marché commun
...
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MessageSujet: NAPOLEON ET LES FEMMES   NAPOLEON  ET LES FEMMES - Page 18 EmptyMer 9 Jan - 19:07

PAULINE VEND SES BIJOUX POUR TENTER DE SAUVER L'EMPIRE


Elle fut la soeur la plus fidèle et la plus aimante. - ARTHUR LEVY -



LA princesse Borghèse avait conservé, des années où elle courait en haillons sur les trottoirs de Marseille, ce goût populaire de la moquerie qui devait être un jour l'une des plus savoureuses caractéristiques de nos midinettes.
L'empereur en eut la révélation au cours d'une cérémonie officielle. Pauline suivait l'impératrice. Soudain, elle leva la main au-dessus des yeux, ferma tous ses doigts, sauf l'index et l'auriculaire et, nous dit Bernard Auger, "simula de la sorte les proéminences osseuses que la nature à soudées au front des bovidés."
"Geste, ajoute Fouché, que le peuple n'applique, dans ses grossières dérisions, qu'aux époux crédules et trompés."

Malheureusement, Napoléon dont l'oeil perçant n'était jamais en défaut, aperçut dans une glace le geste irrévérencieux de sa soeur. Il se leva, prêt à administrer une paire de gifles à cette altesse demeurée trop attachée aux manières désinvoltes du ruisseau marseillais.
Mais Pauline, qui avait conservé également les réflexes de son enfance, détala à travers le salon et parvint à se soustraire à la colère impériale.
A la suite de cette gaminerie, qui avait beaucoup étonné les diplomates étrangers de passage aux Tuileries, la jeune princesse fut priée de ne plus reparaître à la Cour. Elle en fut navrée pendant quelques jours.
Puis elle s'aperçut que cette interdiction lui permettait de se consacrer plus complètement au "joli jeu de la jointure", comme on disait alors dans la bonne société parisienne, et remercia son auguste frère.


Au cours de l'été de 1811, Pauline, sachant par expérience que les villes d'eau étaient singulièrement propices aux "frictions d'épiderme", partit pour Aix-la-Chapelle. (1)
A peine arrivée, elle prit deux amants, le comte de Montrond, bellâtre prétentieux qui s'était fait une réputation d'homme d'esprit en répétant les bons mots de M. de Talleyrand, et le colonel russe Ivanovitch Kabloukoff, colosse aux yeux clairs, dont la voix de basse faisait retentir l'alcôve princière d'interminables jurons caucasiens.

Les sens calmés par ces deux exceptionnels tâcherons, Pauline montrait à toute la ville un sourire angélique.
Hélas ! la politique allait lui retirer une partie de sa joie de vivre. Au début de septembre, M. de Montrond, accusé par Fouché d'entretenir des relations coupables avec l'Angleterre, fut arrêté et incarcéré au château de Ham.
En apprenant cette nouvelle, la princesse Borghèse eut d'abord une crise de nerfs. Puis elle fit venir son beau colonel russe, lui demanda d'exécuter à lui tout seul le travail qu'il partageait naguère avec son collègue, constat que le tempérament slave, malgré son exubérance légendaire, avait des limites dont la nature s'est plu à borner les ardeurs humaines, s'en plaignit amèrement, se rhabilla à la hâte, fit ses malles et se rendit sur-le-champ à Spa pour s'y consoler avec d'autres messieurs.

Au bout d'une semaine, la jeune femme, agacée par la surveillance constante dont elle était l'objet de la part des services policiers de Fouché, quitta la Belgique et rentra à Neuilly.
Là, elle retrouva Canouville qui avait réussi à revenir d'Espagne et se cachait à Paris.
Napoléon ne tarda pas à être informé de ces "retrouvailles", et, pour la troisième fois, la foudre s'abattit sur le malheureux. A trois heures du matin, tandis que Pauline et le chef d'escadron se trouvaient dans l'attitude dite du "rosier grimpant", Berthier reçut le message suivant, écrit de la main même de l'empereur :

"Donnez ordre au chef d'escadron Canouville de partir aujourd'hui, à neuf heures du matin, pour se rendre à Dantzig, où il sera employé dans le 21e Régiment de Chasseurs comme chef d'escadron. Vous lui enverrez à Wesel son brevet, que vous prendrez chez le ministre de la Guerre. j'ai signé le décret qui le nomme.En conséquence, il cesse d'être votre aide de camp. Vous lui recommanderez de ne pas revenir à Paris, même avec un ordre du ministre, sans un ordre de vous."

Cinq heures plus tard, Canouville, laissant Pauline en larmes, prenait, tête basse, le chemin de Dantzig..
.


(1) Les villes d'eau, il faut bien le dire, ont eu de tout temps cette alléchante réputation. Chez les Romains, la station thermale de Baïes, par exemple - que Sénèque appelait la retraite du vice - attirait plus d'oisifs à la recherche de plaisirs voluptueux que de malades authentiques. Au Moyen-Âge, Bade, grâce à ses sources, était devenue l'un des grands lupanars d'Europe. Un vrai malade qui s'aventurait parmi les curistes était considéré comme un trouble-fête et l'on s'ingéniait à le faire mourir pour s'en débarrasser. Au XVIe siècle, Plombières, où hommes et femmes se baignaient nus dans la même piscine, sous le prétexte de combattre une colique néphrétique, fut le théâtre d'incroyables orgies.
La morale stricte des temps modernes a, fort heureusement mis fin à ces navrants désordres...
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MessageSujet: NAPOLEON ET LES FEMMES   NAPOLEON  ET LES FEMMES - Page 18 EmptyJeu 10 Jan - 20:51

Selon son habitude, la princesse Borghèse se consola bien vite. Quelques jours plus tard, elle faisait entrer dans son lit le lieutenant de Brack, jeune homme charmant et distingué, qu'une tournure légèrement efféminée avait fait surnommer par ses camarades Mademoiselle de Brack, et se chargeait d'en faire un homme...
Mais le rôle du professeur n'amusa pas longtemps Pauline. Lorsque le petit lieutenant eut appris le rudiment, elle le renvoya à sa caserne.
Après quoi, voulant éprouver des plaisirs un peu plus épicés, elle attira alors chez elle l'homme qui faisait battre le coeur de toutes les femmes, le plus grand tragédien du siècle, le seul acteur à qui Napoléon trouvait du génie, Talma lui-même...

Tout de suite, celui que les critiques de l'époque appelaient "le prince de l'attitude", tomba éperdument amoureux de Pauline. Malheureusement, il ne pouvait se défaire d'une certaine grandiloquence.
Au lit, par exemple, il exprimait son bonheur en hurlant des alexandrins de Racine, de Voltaire ou de Corneille. Razz Ce qui ne laissait pas d'étonner les domestiques à l'affût derrière la porte.

Au mois de juin 1812, un peu fatiguée par les tirades ampoulées dont Talma truffait la moindre conversation, la princesse désira revenir à des plaisirs moins scéniques. Elle se rendit alors à Aix-les-Bains et commença immédiatement immédiatement sa chasse à l'homme. Hélas ! le tragédien amoureux vint bientôt la rejoindre, poussa des rugissements poétiques, pleura sur ses pas, déchira des mouchoirs et se mordit le poing.
Pauline, qui était, entre-temps, devenue la maîtresse d'un chef d'escadron d'artillerie, Auguste Duchand, fut prodigieusement agacée et fit tout pour éloigner ce trop bruyant soupirant.

Comme le pauvre ne comprenait pas et continuait à se frapper le coeur en criant : "Ah ! voyez mes transports, Madame, j'ai mal là ! ...
Un soir, dans son salon, alors qu'il était assis à ses pieds sur un coussin, elle annonça :

- Talma, maintenant, va nous faire rire ! N'est-ce pas, Talma, que vous voulez bien nous amuser avec des scènes de farce ?

C'était demander à un évêque de faire un numéro de main à main.


Talma blêmit. Mais Pauline lui caressa la tête et il finit par accepter. Pendant une demi-heure, devant un auditoire moqueur, il s'efforça d'interpréter des scènes de comédie. Son ridicule fut sublime.

A quelques jours de là, Pauline organisa une promenade en barque sur le lac du Bourget. Talma, naturellement, était de la partie. Or, vers le soir, un orage éclata obligeant tout le monde à se réfugier sous une tente édifiée à l'arrière du bateau. Soudain, la voix de Pauline retenti :

- Talma, sortez et dites-nous la Tempête
- Mais il pleut à verse, bredouilla le malheureux.
- Justement, ce sera magnifique ! Allez sur le pont et criez la Tempête !

Docile, le tragédien sortit de la tente, s'élança sous la pluie, s'agrippa au mât et là, ruisselant, déclama Shakespeare.
"Il secouait la tête, contre la duchesse d'Abrantès, pour faire tomber de ses cheveux l'eau que l'écume des vagues lui jetait."

- Bravo ! Bravo ! criait Pauline, c'est merveilleux !

Et pour mieux jouir de cette scène romantique, elle se pelotonnait contre Duchand, qui sans aucune pudeur, se gaussait ouvertement de son prédécesseur.
Le soir, Talma se mit au lit avec une bonne bronchite en cherchant - vainement - à quel personnage de tragédie il pouvait bien ressembler.
Lui dire qu'il évoquait plutôt Georges Dandin n'eût servi qu'à faire monter sa température.
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MessageSujet: NAPOLEON ET LES FEMMES   NAPOLEON  ET LES FEMMES - Page 18 EmptyDim 13 Jan - 18:14

A la fin de septembre 1812, le tragédien reçut une lettre qui le troubla profondément. L'organisateur de tournées, avec lequel il avait signé un contrat, le priait de se rendre à Genève où un spectacle était prévus pour la semaine suivante.
Croyant que Pauline était toujours amoureuse de lui, il se demanda avec angoisse comment il devait lui annoncer la nouvelle.
Finalement, il alla s'agenouiller à ses pieds. Là, le regard fixé au plafond et le bras droit tendu comme pour réciter une tirade de Britannicus, il déclama ce discours plein de réminiscences qu'il avait écrit et appris par coeur :

- O Madame ! O ma reine ! Les dieux sont contre nous. Les liens que nous avions si patiemment tissés seront, hélas ! demain, victimes d'un destin aveugle et implacable. O douleur ! O mon grand désespoir ! Entendez, entendez, Madame, mes soupirs ! ...

Pauline, un peu surprise, essayait de comprendre ce qui arrivait à son amant :

- Êtes-vous souffrant ? dit-elle.

Talma gémit :

- Non, non, ma bien aimée. Mais il faut que, demain, pour Genève je parte. Là-bas, tout un public par l'acteur alléché m'attend le coeur gonflé d'une joie sans pareille...
- Il faut que vous partiez pour Genève ? dit simplement Pauline. Mais allez, allez, mon ami ...

Talma, heureux de voir que la jeune femme prenait bien la chose, voulut se montrer galant. Parodiant Polyeucte, il ajouta :

- Je veux, pour satisfaire un juste et saint amour, pouvoir un peu remettre et différer d'un jour...

Mais la princesse Borghèse était trop contente d'être enfin débarrassée de cet amoureux grandiloquent.

- Non, non, dit-elle vivement, vous vous devez à votre art. Il faut que vous partiez.


Le tragédien s'imagina que Pauline se sacrifiait pour lui. Il éclata en sanglots et embrasse les genoux de la jeune femme. Puis, comme s'il se fût agi d'un péplum, il déchira d'un coup sec le bas de sa redingote. Après quoi, le coude gauche levé sur les yeux, il sortit à grandes enjambées et regagna son appartement.
En voyant son amant partir ainsi, Paulin, qui aimait le théâtre, fut profondément émue. Elle envoya sa camériste rappeler Talma et passa avec lui une nuit savoureuse et agitée, où, nous dit Alain Perreau, "la poésie fut mêlée aux plus délicieux désordres."

Au matin, le tragédien monta dans une voiture et quitta en pleurant la maison de la princesse Borghèse, sans se douter que sa belle amie était déjà dans les bras d'Auguste Duchand...

Le surlendemain, Talma, de Genève, envoya à Pauline ce mot passionné :

Mon amie, je t'ai donc quittée. Me voilà donc séparé de toi et séparé pour longtemps. Tu l'as voulu, mon éloignement était nécessaire, mais quel horrible sacrifice m'as-tu imposé. Ta bonté, tes larmes que je t'ai vu répandre, les consolations que tu as versées dans mon coeur abîmé de souffrance, n'ont pu adoucir l'amertume de mes regrets, mais, du moins, elles y ont versé une lueur d'espoir.
Avant-hier, je suis parti au point du jour et j'ai pu encore regarder tes fenêtres pour la dernière fois. Pour une dernière fois, les yeux fixés sur ta chambre, je t'ai dit adieu dans ma pensée, le visage baigné de larmes...


La princesse lut cette lettre avec un ennui profond.
Quelques jours plus tard, elle envoya une réponse polie à Talma, qui eut, en la lisant, l'impression désagréable de tomber, par erreur, dans une trappe, au troisième acte d'Athalie... Le sourcil bas, la bouche tordue par un rictus savant, il alla se coucher en poussant des gémissements pré-romantiques...
Dès qu'il fut remis, il prit sa plume et envoya à Pauline - en sanglotant - une longue missive dont voici un extrait :


Ah ! dis-moi, te rappelles-tu ces moments d'ivresse et de délire où tu m'as plongé ?... Te rappelles-tu les caresses qui me furent inspirées par toi seule (que toi seule a reçues de moi), tu les provoquais et je les prodiguais en mouillant mon visage de tes larmes ?...

Mais cette prose exaltée arriva à Aix au moment où la princesse Borghèse apprenait la mort, à la bataille de la Moskowa, de son cher Canouville. Elle jeta la lettre de Talma au panier.
Ne recevant pas de réponse, le tragédien traça un long cri de douleur sur quatre grands feuillets et l'envoya de Paris, où il était rentré :


Vous ne connaissez pas encore, Pauline, ce coeur qui s'est consacré à vous ; vous ignorez encore quelles atteintes profondes vous lui avez portées, avec quelle idolâtrie il vous chérit et vous révère, Pauline. Pauline, mon coeur est déchiré. Je n'ai rencontré ici que des personnes qui ont pu te voir... Ils me parlent de toi ; et moi, forcé de dévorer mon trouble et ma douleur devant eux. Il faut que je compose mon visage et que j'affecte un langage indifférent pour leur dérober mon émotion et mes angoisses d'un coeur que ton nom seul fait battre avec une affreuse violence... Ah ! Pauline, ma désolation est à son dernier terme.

Cette fois, encore, Pauline ne répondit pas. Alors Talma - qui aimait à se torturer - alla rôder vers le château de Neuilly, se délecta de souvenirs douloureux et envoya ce dernier mot à Pauline :

Oh ! mon amie, de quel trouble je me suis senti agité. Toutes les circonstances de notre liaison se sont présentées à la fois à mon souvenir ; tous mes membres étaient chancelants, je t'ai appelée par ton nom, comme si tu avais été là, et mes larmes ont coulé pour toi ; ô mon amie, à quelles peines m'as-tu condamné ?

Mais la princesse avait complètement oublié son grand homme. Elle jeta la lettre sans même la lire.
Elle préparait alors son départ d'Aix pour se rendre à Hyères, où son médecin lui avait recommandé de passer l'hiver, et les pleurs de Talma l'importunaient.
Elle arriva au bord de la Méditerranée le 3 décembre, en compagnie de son cher Duchand, dont la vertigineuse dépravation lui était un sujet constant d'émerveillement.
Hélas ! à la mi-janvier 1813, le fougueux militaire reçut l'ordre de rejoindre son régiement en Allemagne.
Quand il fut parti, Pauline quitta Hyères où, nous dit Alain Perreau, "les pêcheurs avaient une odeur si forte qu'elle ne put se résoudre à en faire figurer un dans sa collection d'amants", et alla s'installer à Nice. Là, l'hygiène étant un peu plus respectée, la princesse ne tarda pas à se faire "farcir le rigondin" par des messieurs pleins d'allant
...
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MessageSujet: NAPOLEON ET LES FEMMES   NAPOLEON  ET LES FEMMES - Page 18 EmptyDim 13 Jan - 19:56

A la fin du mois de juin, la vie calme de Pauline fut soudain troublée par d'alarmantes nouvelles.
Au cours du printemps, l'Europe entière s'était levée contre la France. Les armées prussiennes, autrichiennes et russes se groupaient en Allemagne pour en finir avec "l'usurpateur". Alors, Pauline oublia ses amants, ses jeux frivoles, ses bals et ses colifichets, pour ne penser qu'à son frère. Sachant qu'il avait besoin d'argent pour équiper des hommes, elle vendit à la hâte ses plus beaux bijoux et réunit trois cent mille francs (ce qui équivaut à près de deux cents millions de nos anciens francs) qu'elle mit à la disposition de l'empereur.
Très ému par cette offre qui lui parvint juste après le désastre de Leipzig, Napoléon lui répondit :

J'accepte le don que vous venez de me faire ; mais la bonne volonté et les ressources de mes peuples sont telles que je crois mes moyens assurés pour faire face aux énormes dépenses qu'exigeront les campagnes de 1814 et de 1815... Si cette coalition de l'Europe contre la France se prolongeait au-delà et que je n'eusse pas obtenu le succès que je suis en droit d'espérer de la bravoure et du patriotisme des Français alors je ferais usage de votre don et de tous ceux que mes sujets voudront me faire.

Au moment où son trône chancelait, une seule main se tendait vers l'empereur.
Et c'était une main de femme...


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