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Détente - amitié - rencontre entre nous - un peu de couleurs pour éclaircir le quotidien parfois un peu gris...
 
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 Quand j'avais cinq ans, je m'ai tué

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epistophélès

epistophélès


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MessageSujet: Quand j'avais cinq ans, je m'ai tué   Quand j'avais cinq ans, je m'ai tué - Page 4 EmptyDim 2 Aoû - 14:36

19

L'agent de police avait un revolver mais y nous a pas tués. Il était gentil, comme agent de police et il aimait les enfants, mais il a dit que c'était dangereux de conduire à l'intérieur d'un magasin. Il a téléphoné à la mère de Jessica mais elle n'était pas chez elle et puis il a appelé chez moi mais il a eu Jeffrey qui a dit que ce n'était pas le bon numéro. Alors l'agent de police nous a dit qu'on pouvait y aller à condition de promettre de rentrer tout droit chez nous, et quand on est parti j'ai entendu le plus vieux des monsieurs en costume dire : "Comment, c'est tout ? Vous les laissez filer comme ça ?" et l'agent de police a dit : "On dirait que vous n'avez jamais eu leur âge."
Le ciel était complet, c'est-à-dire qu'il était tout barbouillé et qu'il pleuvait. (Quand je rentre tout barbouillé et mouillé pasque je m'ai battu, manman dit toujours "c'est complet".) Les rues étaient luisantes de pluie et on voyait fumer son haleine. On est rentré.
Je suivais Jessica pour pouvoir la regarder. On est passé devant Maxwell sur l'autre trottoir. La grosse pendule de la banque disait 4 heures.
On ne parlait plus. On a été coi pendant tout le chemin jusque chez Jessica. Dans l'allée de sa maison, y avait deux voitures, un break et une petite auto. Je savais que la petite était celle de son père. Jessica a ouvert la petite porte, sur le côté de la maison et elle est entrée mais moi je ne voulais pas. J'ai attendu dehors qu'elle me dise d'entrer. Puis je suis entré quand elle me l'a dit.
Toutes les lumières étaient éteintes, il n'y avait personne à la maison, pas même de bêtes. Jessica a enlevé le manteau de ma manman mais j'ai gardé le mien. Il y avait quelqu'un dans la poche. Câlinot le Singe, il dormait. Jessica a traversé le vestibule pour aller dans la salle de séjour. Elle ne disait rien. Elle s'est assise sur le sofa de côté et elle a posé ses pieds dessus, laissant des marques sombres d'humidité. (Mais on ne doit pas mettre ses pieds sur les meubles, ça les fiche en l'air dit ma manman et parès y faut les donner aux pauvres. Une fois mon grand-père a vendu toutes les chaises de la maison sans le dire à personne. Un monsieur est venu et il était en train de les charger dans un camion quand manman est arrivée. Elle l'a engueulé. Elle disait : "Mais vous savez bien que c'est un vieux monsieur, à plus de quatre-vingts ans, vous croyez qu'il connaît encore la valeur du mobilier ?")
Debout dans le vestibule, je regardais Jessica. Dans un coin de la salle de séjour, il y avait une grande horloge. Le Capitaine Kangourou en a une qui danse, mais celle de Jessica ne dansait pas. Elle n'avait même pas de façade. Rien qu'un truc dans le bas qui allait et venait, allait et venait.
Près du sofa y avait une table pleine de napperons et de bibelots. Jessica regardait par la fenêtre qui était dans son dos et sautait d'un pied sur l'autre.
Dehors la lune était sortie. En musique on avait appris une chanson :

Au clair de la lune
Mon ami Pierrot
Prête-moi ta plume
Pour écrire un mot
Ma chandelle est morte
Je n'ai plus de feu
Ouvre-moi ta porte
Pour l'amour de Dieu.
Au clair de la lune
On n'y voit qu'un peu
On chercha la plume
On chercha du feu
En cherchant de la sorte
Je ne sais c'qu'on trouva
Mais je sais que la porte
Sur eux se ferma.


- Est-ce que tu la vois, toi la tête du monsieur qui vit dans la lune ? que j'ai demandé.
Les nuages passaient sur la lune et ils la faisaient apparaître et disparaître. Une fois que j'étais sur notre perron en train de regarder la lune, ma manman était venue et elle avait essayé de me faire voir la figure du monsieur qui vit dans la lune. Mais j'ai pas pu le voir. J'ai jamais pu le voir.
Jessica ne disait rien. Je m'ai assis sur le sofa.
Dehors la pluie s'est arrêtée. Au bord du ciel c'était rouge. Dans la maison tout était marron. En hiver il fait noir très tôt et l'on retarde les pendules. Le ciel c'est où Dieu habite, je lui ai adressé mes prières à cette adresse. Dans le ciel, j'ai prié pour que le père de Jessica soit pas mort mais Dieu m'a pas écouté. Quand j'étais petit, je croyais que la nuit c'était quand les nuages cachaient le ciel.
- T'as mouillé le sofa, j'ai dit à Jessica.
Elle m'a regardé et elle a dit :
- Quand mon papa est mort, maman a recouvert de draps tous les sièges pour que les gens renversent rien dessus. Elle les a découverts hier seulement. Elle a dit que c'était le moment d'arrêter d'être triste mais elle a pleuré toute la nuit.
Jessica a regardé là où elle avait mouillé et elle a dit :
- Elle aurait mieux fait de laisser le drap.
J'ai regardé par la fenêtre, j'ai posé mon nez contre la vitre et j'ai soufflé des lunettes. J'ai dit :
- T'as vu, Jessica, des lunettes.
Mais elle regardait autre chose, près de l'escalier, pendu à la rampe, un sac à main.
De l'autre côté de la rue, une lumière s'est allumée. Il faisait de plus en plus noir dehors. J'ai cherché la lune mais elle avait disparu. Un chien est passé sur le trottoir, un monsieur le promenait. Un avaion est passé là-haut, le bruit était derrière lui. Quelque part dans les maison, plus loin dans la rue, quelqu'un a crié "Faut que je déplace la voiture !" et Jessica s'est levée pour aller dans l'entré et elle a regardé le sac en disant :
- C'est le sac de ma mère.
Et puis elle a regardé vers le haut de l'escalier. Et puis elle s'est mis à monter l'escalier.
Je suis resté assis sur le sofa. Il y avait une bougie sur le napperon sur la table mais elle était éteinte, pas allumée. Le réfrigérateur bourdonnait dans la cuisine. L'horloge a sonné cinq fois. Et dehors le ciel est devenu bleu sombre sans étoiles. j'ai croisé les mains sur mes genoux et j'ai attendu, assis bien droit, comme il faut, mais Jessica ne revenait pas.
Je m'ai levé. Je suis allé dans l'entrée. Ca sentait comme Jessica. J'ai regardé le sac à main.
J'ai écouté. Y avait pas de bruit. j'ai posé le pied sur la première marche. Y avait un tapis dessus. Je m'ai retrouvé dans l'escalier.
J'ai commencé à monter les marches. Quand j'ai été en haut, j'ai regardé de tous les côtés. Je voyais à peine. J'ai attendu que mes yeux s'habituent. Y avait une salle de bains. A côté y avait une chambre à coucher avec un grand lit pour deux personnes. A côté y avait un placard. Je l'ai ouvert, y avait des draps et des serviettes. Alors j'ai regardé vers le bout du couloir. J'ai vu qu'il y avait une autre chambre, la porte était ouverte et Jessica était dedans, assise de côté sur son lit, en train de regarder par la fen^ter, les pieds pendant au bord du lit.

Pause caniculaire. ...
geek
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epistophélès

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MessageSujet: Quand j'avais cinq ans, je m'ai tué   Quand j'avais cinq ans, je m'ai tué - Page 4 EmptyVen 14 Aoû - 14:43

J'ai été jusqu'au seuil de sa chambre et je m'ai arrêté. Elle m'avait pas entendu. Je suis resté à la regarder sans rien dire. Sa figure était éclairée par une lampe à l'extérieur et ses yeux avaient des diamants dedans. J'attendais, j'attendais sans bouger, et alors elle s'est mise à chanter une petite chanson :

Koukaberra perché
Dans le vieux caoutchouc
Roi de la brousse
Roi de la brousse
Ris Koukaberra
Ris grand roi
Chante ta joie


Moi j'écoutais. Je regardais ses lèvres s'ouvrir et se fermer s'ouvrir et se fermer. Elle était appuyée contre trois coussins. Un rose, un à carreaux et un blanc comme un oreiller. Ses pieds se balançaient au bord du lit. Je regardais.
Dans un coin de la chambre y avait un cheval de bois qui était une chaise, en fait. A son plafond pendait une lampe avec des clowns sur l'abat-jour et, accroché au mur au-dessus de son lit, y avait Jerry le Pantin.
Jessica a repoussé ses chaussures et elles sont tombées par terre. Elle avait toujours ses bas de laine roulés aux genoux, tout lisses et tout doux. Et puis elle a dit quelque chose.
- Peter Pan est une fille.
Elle regardait encore par la fenêtre.
- On l'a fait ressembler à un garçon mais c'est une fille, on lui a simplement coupé les cheveux très court et on lui a fait porter un soutien-gorge très serré.
(J'avais vu ça aussi, à la télévision, et ça m'avait donné envie de voler alors j'avais demandé à mon papa de téléphoner à la chaîne pour demander comment ils faisaient, mais Jeffrey m'a dit qu'il avait fait semblant, qu'y avait personne au bout du fil et que mon papa m'avait menti.)
- Je suis assez grande pour porter un soutien-gorge, a dit Jessica, mais j'en ai un ma maman me l'a donné pour plus tard.
Elle est allée dans son placard pour le prendre. Elle me l'a montré, ça m'a fait drôle. C'était pas bien. Normalement je dois pas les regarder. Mais alors j'ai fait un truc. Je l'ai pris et je me l'ai mis, seulement dans le dos.
- Regarde, Jessica, j'ai dit, je suis un chameau. Je m'attendais pas à son rire. Elle a ri comme je l'avais jamais entendue rire avant. C'était comme si elle chantait. Je m'ai mis le soutien-gorge sur la tête et je m'ai mis à sauter dans tous les sens et elle a encore ri et je l'ai mis sur ma figure et elle est tombée sur son lit tellement qu'elle riait.
- Toc, toc ! j'ai dit. (C'était une blague.)
- Qui est là ?
- Bouhou !
- Bouhou qui ?
- Ho, y a pas de quoi pleure, je lui ai dit.
Jessica m'a regardé.
- Mais je ne pleure pas.
- Non, tu vois. Y a pas de quoi pleurer.
- Je pleure pas, Gil (elle avait arrêté de rire).
- Non, pasque c'est une blague.
- Quoi donc ?
Elle s'est mise à regarder par la fenêtre pasqu'elle avait pas compris ma blague.
- Jessica, c'est une blague, j'ai dit.
Mais elle voulait plus se retourner. J'ai regardé son dos, il faisait des petits sauts, elle pleurait.
-Jessica.
J'ai simplement dit son nom mais elle a posé sa tête sur le lit et ses épaules ont commencé à monter et à descendre, monter et descendre. Je savais pas quoi faire alors je m'ai approché du lit.
J'ai essayé de lui montrer un tour de magie, on dirait qu'on enlève son propre pouce, mais elle voulait pas regarder.


Kawa Exclamation
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epistophélès

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MessageSujet: Quand j'avais cinq ans, je m'ai tué   Quand j'avais cinq ans, je m'ai tué - Page 4 EmptyMer 26 Aoû - 11:55

- On pourrait jouer à faire semblant, Jessica. Quelque chose. Pour que tu soyes pas triste.
- Non, elle a dit. C'est des trucs pour les petits. Je veux plus être petite. Je déteste ça.
Elle s'est mise à frapper son lit en répétant :
- Je déteste ça, je déteste ça !
Et elle frappait son lit, et elle criait de plus en plus fort et y avait quelque chose comme une bête dans sa voix, elle faisait du bruit comme un animal.
- Je veux plus être petite, j'en ai assez, assez !
Et puis elle a caché sa tête dans son bras et elle a pleuré, pleuré, pleuré, appuyés sur son lit.
Je savais pas quoi faire. J'étais là à la regarder et j'étais en colère. Pasque je suis petit moi aussi. Et pasque j'en avais assez et je détestais ça moi aussi.
Ma manman m'avait dit qu'un jour quand je serais grand j'aimerais quelqu'un et ça voudrait dire que j'essayerais d'empêcher tout le monde de lui faire du mal. J'avais cru que c'était Shrubs. Mais non. C'était Jessica.
Je m'ai assis sur le lit près d'elle et j'ai posé ma main sur ses cheveux sur un des rubans, et j'ai tiré sur le bout d'un ruban qui s'est défait et puis qui est tombé sur le lit. Et puis l'autre. Je l'ai tenu dans ma main. Et puis je l'ai posé contre ma joue pasqu'il était douceur. Comme Jessica.
Quand elle a levé les yeux pour me regarder, elle avait les cheveux dans la figure. Je les ai repoussés avec ma main et ils étaient humides eux aussi, mais pas de la pluie du dehors, de larmes. J'ai cueilli une larme au bout de mon doigt et je l'ai mise dans mes yeux.
J'ai mis mes bras autour de Jessica comme fait mon papa quand je pleure et j'ai fait comme ça, comme il fait, une sorte de caresse derrière la tête. Elle a roulé sur le côté et s'est appuyée contre moi. C'était chaud. J'ai enlevé mon blouson et quelqu'un est tombé sur le lit. Câlinot le Singe. Je l'ai posé sur le rebord de la fenêtre, tourné vers l'extérieur, pour qu'il monte la garde sur Jessica Renton et sur moi. Et puis je l'ai regardée qui pleurait et j'ai dit quelque chose très, très doucement :
- Je laisserai personne te faire du mal. Personne. Et je vais faire en sorte qu'on soye plus des petits.
Alors elle a levé la tête pour me regarder avec ses yeux qui sont géants, verts avec des petits morceaux marron dedans et elle est retombée sur moi, sur mon ventre avec sa tête, et je l'ai tirée bien serrée contre moi et ça faisait chaud sur moi. Dehors j'ai vu qu'il commençait à neiger et Câlinot le Singe regardait ça et le vent mais nous on avait bien chaud à l'intérieur.
Et tout d'un coup il est arrivé quelque chose. J'ai vu les réverbères s'allumer. Ils se sont allumés et ont répandu sur nous leur lumière. Jessica a posé sa figure contre mon ventre et elle a dit :
- Tu es mon ami.
Et il y avait des diamants dans ses yeux.
J'ai posé mon menton sur ses cheveux et elle a levé la tête et posé sa figure contre la mienne, c'était doux comme Pougnougnou, et elle a posé sa bouche sur ma figure, elle a tiré sur ma chemise. Elle a roulé sur elle-même et sa robe est passé par-dessus ses bras qui étaient autour de moi et elle s'est laissée aller sur le lit et elle m'a tiré sur elle et j'ai senti ses mains dans mes poches. Elles poussaient sur mes jambes, sur moi. J'ai senti l'avion et son élastique qu'on remontait, de plus en plus serré, de plus en plus serré sous mon ventre. Jessica tenait mon derrière et elle le faisait monter et descendre, monter et descendre.
Devant elle, là où je la sentais, elle avait comme un petit derrière qui était doux comme un baiser. Et tout d'un coup j'ai entendu un bruit, qui venait de très loin, et se rapprochait de la maison de Jessica. Ca courait le long de Seven Mile Road. Des sabots. Un cheval qui galopait monté par personne. Blacky. Le bruit devenait de plus en plus fort. Il passait devant tous les magasins. Et puis j'ai entendu encore autre chose, un vélo avec des cartes dans les rayons à côté de Blacky, monté par personne lui non plus, qui venait me chercher, son bruit de plus en plus fort, de plus en plus. Sous mon nombril l'élastique de l'avion était de plus en plus serré, de plus en plus serré et je tenais Jessica et ses jambes étaient autour de moi et j'ai dit :
- N'aye plus peur.
Et elle a dit :
- J'ai plus peur maintenant. Plus du tout, plus du tout. Du tout. Du tout.
Le bruit devenait plus fort et Blacky et le vélo se rapprochaient et je savais qu'ils allaient arriver. L'élastique était de plus en plus serré, aussi, et je pensais que j'allais mourir. J'étais presque mort. Et puis j'ai volé. Je m'ai envolé au-dessus de la maison et de la rue et de Maxwell, au-dessus de la rue Lauder et de l'école, au-dessus de tout, pour rejoindre Jessica. J'ai vu que j'y étais presque. J'y étais presque. Et puis j'y étais.

Quelqu'un hurlait :
- Oh, mon Dieu, oh mon Dieu !
Les lumières se sont allumées. Elle m'a tiré du lit et elle m'a lancé contre le mur et du sang est sorti de ma figure. J'ai glissé par terre. Tout ce que j'ai vu c'était son sac et elle a agrippé Jessica et j'ai hurlé :
- Ne la touchez pas, ne la touchez pas !
Et je l'ai battue, martelée avec mes poings mais elle m'a encore jeté par terre et je pouvais pas me relever.

FIN DU 19...
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MessageSujet: Quand j'avais cinq ans, je m'ai tué   Quand j'avais cinq ans, je m'ai tué - Page 4 EmptyMer 26 Aoû - 19:24

20

- Ton numéro de téléphone ! gueulait la mère de Jessica.
Je pensais que je pouvais pas bouger, ma figure avait du sang dessus. J'avais envie de dégobiller.
- C'est quoi ton numéro de téléphone ? Tu ne comprends pas l'anglais ! (Elle me serrait le bras.) Je te parle !
J'ai fermé les yeux et je m'ai évanoui.
Jessica était à genoux sur son lit, la figure dans les coussins. Elle pleurait, elle pleurait. Elle arrêtait ps de pleurer et quand sa mère allait pour la toucher elle la laissait pas faire.
- Comment est-ce possible, une chose pareille ? disait sa mère. Mais quel sorte d'animal dégoûtant es-tu, hein ? il faut t'enfermer, te mettre hors d'état de nuire. Mais comment peuvent bien être tes parents pour avoir élevé un monstre pareil ! Mais je vais m'occuper de toi ! Attends un peu ! Tu ne feras plus tes horreurs à personne, à personne ! Ni à ma petite fille adorée ni à personne ! Tu m'entends ?
Elle me tirait en arrière par les cheveux pour me faire relever la tête.
- Tu m'entends, hein, petit saligaud !
Je revenais à moi. J'ai rouvert les yeux.
- Si vous la touchez, j'ai murmuré, je vous tuerais.
Je sais pas comment elle a eu le numéro mais elle a appelé mes parents. Elle a dit que j'avais dit que j'allais la tuer.
Ma manman est venue et m'a mis dans la voiture. J'ai essayé de rester avec Jessica, je m'ai accroché au lit, j'ai piqué une crise, mais je pouvais pas tenir. Quand on est arrivé à la maison, il y avait un agent de police et mon papa. J'ai parlé à personne. Ma mère m'a mis un médicament sur la figure. Elle pleurait, je m'en souviens.
Je me souviens qu'ils m'ont mis au lit et que le médecin est venu me donner des médicaments pour me faire dormir. J'arrivais pas à me lever. Je me souviens presque plus, mais je me souviens du téléphone, il sonnait, il sonnait, il n'arrêtait pas de sonner comme des cloches et j'entendais que c'était la père de Jessica.
Le lendemain mon père et ma mère m'ont mis dans la voiture et m 'ont amené ici, à la Résidence Home d'Enfants les Pâquerettes. Et ils m'ont laissé. C'est la mère de Jessica qui les a fait fiare ça, je les ai entendus sire qu'elle avait de quoi porter des accusations précises, mais aussi qu'eux-mêmes pensaient que cela valait mieux. Je les ai entendus.
Et maintenant ça fait deux mois que je suis ici. Hanoukah est passée depuis trois semaines. J'ai eu des habits dans une boîte de mon papa et de ma manman, la boîte était entourée de ficelle. J'ai pris la ficelle et je l'ai nouée autour d'une de mes chaussettes et je l'ai accrochée à mon mur comme un pantin.
Je n'écris plus ici très souvent, maintenant, pasque le Dr Nevel y dit que c'est mieux de lui parler pendant les séances. Je ne viens même plus très souvent dans la Salle de Repos. J'en ai plus besoin, je sais me maîtrise.

PAUSE !


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MessageSujet: Quand j'avais cinq ans, je m'ai tué   Quand j'avais cinq ans, je m'ai tué - Page 4 EmptyDim 30 Aoû - 12:28

Rudyard a quitté la Résidence Home d'Enfants les Pâquerettes, mais il est revenu. Seulement je le vois pas, il ne vient pas dans mon aile ou en Salle de Jeux. Il est à l'étage. Je pense à lui quand je vais nager. Je sais faire la nage du chien. Je vais l'apprendre à Câlinot le Singe quand je rentrerai chez nous. Il aime nager seulement je le reverrai jamais. Il était chez Jessica. Je pense que sa mère l'a tué.
J'ai vu Rudyard. C'était à l'étage. Mme Cochrane m'avait emmené pour voir un autre médecin qui me montrait des photos et me demandait le nom des choses. C'était un test. Quand je suis sorti, Rudyard était dans le hall avec un enfant. Il le tenait dans ses bras, l'enfant faisait des grimaces.
Il m'a regardé. Je l'ai regardé. On s'est regardé longtemps. Et puis il a dit :
- J'ai quelque chose pour toi.
Il a déposé le petit par terre et il s'est redressé. Il m'a encore regardé et il a a plongé sa main dans sa poche arrière.
- Ca fait une semaine que je me trimballe avec ça. Je ne sais même pas pourquoi. Dis au Dr nevele que tu l'as trouvée quelque part.
J'ai regardé, c'était une enveloppe. Quand j'ai de nouveau regardé Rudyard, il pleurait. Il pleurait pour moi. Alors j'ai fait quelque chose. J'ai collé ma main sous mon menton, comme ça, et j'ai remué les doigts pour lui faire le Grand Salut.
Le petit s'est enfui le long du corridor et Rudyard lui a couru derrière. Au bout du corridor, il est devenu de plus en plus petit.
J'ai ouvert l'enveloppe. Et puis je l'ai refermée. J'avais les mains qui tremblaient. Pasque j'avais peur.

Cette nuit-là j'ai pas pu dormir. Allongé dans mon lit, dans mon aile, je regardais le plafond. Il y avait une fenêtre dedans. Une lucarne que les lumières du couloir s'y voyaient.
Alors j'ai entendu les concierges partir pour chez eux. Ils disaient qu'ils allaient se geler les couilles. Quand ils ont été partis, y avait plus personne. Il était tard. Tout était coi? Mannie suçait son pouce et Howie respirait fort dans le lit près du mien. Et moi je regardais la lucarne du plafond. Je la regardais, je la regardais encore, je la regardais toujours.
Je suis sorti de mon lit. Sous mon oreiller, j'ai pris la lettre, la lettre de Jessica. Je suis allé à la porte. J'ai regardé dehors. Personne. Je suis parti. Je longeais le mur. Y avait quelqu'un dessus : mon ombre. Nous rasions le mur, moi et moi.
J'allais quelque part avec moi-même.
J'ai passé une porte où qu'y avait d'écrit escalier.
C'était un escalier. J'ai monté et encore monté. Mes pieds faisaient des échos mais je m'ai pas arrêté. Et puis j'ai passé encore une porte et j'ai tourné par ici. Je suis allé tout au bout du couloir et puis j'ai encore tourné par ici. J'ai passé des portes en verre et j'étais dans un nouveau hall. Il y avait une infirmière derrière un bureau. Elle lisait un livre. Elle m'a pas vu. Alors j'ai passé encore une porte. A l'intérieur de la salle y avait une rangée de lits. Je suis allé jusqu'au dernier lit de la rangée.
Carl était attaché, ils lui mettaient des courroies comme des ceintures. Il n'a même pas essayé de bouger un tout petit peu mais il m'avait vu avec ses yeux. Ils étaient ouverts. Il n'arrivait pas à dormir lui non plus. Y avait une chaise pliante près de la fenêtre. Je l'ai prise et je l'ai ouverte et je m'ai assis à côté du lit de Carl. Il me souriait. J'avais pas peur.

Je reviens dans 10 minutes. ...
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MessageSujet: Quand j'avais cinq ans, je m'ai tué   Quand j'avais cinq ans, je m'ai tué - Page 4 EmptyDim 30 Aoû - 12:56

- C'est moi, je lui ai dit. De la Salle de Jeux, tu te souviens ? Je t'ai poussé.
Carl n'a rien dit. Ses yeux ont un peu tourné une fois, mais il me regardait.
- Je comprends pas grand-chose, je lui ai dit au sujet de Rudyard et du Du Dr Nevele. Rudyard m'a montré comment nager et c'était mon ami, mais il m'a menti pour le mur, à propos de lire ce que j'écris sur mon mur.
Carl souriait. Je voyais son ventre et sa poitrine se soulever et redescendre. Du bruit venait des autres lits. On aurait dit des bruits de chiots. C'était des enfants.
- Et le Dr Nivele. Il ne comprend pas les enfants et il a dit que je n'avais pas de lettres. Il les volait et en plus il mentait. C'est pas bien.
Carl a cessé de bouger.
- Et maintenant y a plus personne. Je voudrais être chez moi. Je voudrais n'être nulle part.
Je suis resté assis avec Carl le reste de la nuit. J'étais près de lui et il me regardait, en souriant, et je restais. C'était très calme dans la salle, très doux, sans bruit, comme si tout le monde s'était envolé pour le paradis.
Quand le matin est venu, je suis parti. J'ai retraversé le hall. Des infirmières arrivaient, accrochaient leur manteau après l'avoir enlevé. Je suis allé à la Salle de Repos. J'ai ouvert la porte et j'ai allumé la lumière mais y avait quelqu'un là, blotti sur le plancher contre le mur.
Elle s'est réveillée quand je suis rentré et elle s'est assise et m'a regardé en se frottant les yeux et elle avait l'air d'un petit bébé, presque. Elle a mis ses lunettes pour voir qui c'était et c'était moi.
- Madame Chochrane.
Elle avait des tas de marques et de petites rides d'avoir dormi sur le plancher. Elle était comme étourdi. Elle a ôté ses lunettes pour se masser les yeux. Elle a voulu se lever mais elle a pas pu. Elle était trop vieille. Je l'ai regardée, elle était comme un petit enfant. Je savais qu'elle était venue là pour m'attendre parce que je n'étais pas dans mon lit et qu'elle m'avait cherché partout. Je l'observais. Elle ne disait pas un mot. Elle était assise sans rien dire, sur le sol, devant le mur sur lequel elle avait écrit Il voulait voir s'envoler les minutes. Je savais que c'était elle.
J'avais très sommeil. J'ai éteint la lumière dans la Salle de Repos et je m'ai allongé pr terre près d'elle et elle a gardé son bras sur moi. Elle l'a gardé là pendant que je dormais.

FIN DU 20
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MessageSujet: Quand j'avais cinq ans, je m'ai tué   Quand j'avais cinq ans, je m'ai tué - Page 4 EmptyDim 30 Aoû - 13:10

21

Cher Gulp !
Je ne sais pas si je pourrai t'écrire avant un certain temps parce que ma mère m'emmène dans une école privée demain. C'est loin, en Ohio. Elle dit qu'il y a des tas d'enfants sympathiques là-bas et que j'oublierai.
Le médecin de l'hôpital lui a conseillé de m'y envoyer. Il dit que ce qui s'est passé me tourmentera encore longtemps et peut-être que j'aurai de mauvais rêves. Il a donné à ma mère des pilules pour me faire dormir.
Le soir où je suis rentrée de l'hôpital elle m' a mise au lit dans sa chambre et m'a sonné ma pilule. Mais je l'ai cachée dans ma bouche et dès qu'elle est repartie je l'ai crachée. Et quand elle a été partie pour de bon, je me suis levée et je suis allée dans ma propre chambre. Je me suis couchée mais je ne pouvais pas dormir. J'avais peur. Et j'ai entendu un bruit. Ca m'a effrayée et j'ai allumé la lampe. Alors il a disparu. Mais quand j'ai éteint la lumière, il est revenu. J'avais très peur. J'ai vraiment écouté, écouté, l'oreille tendue.
Il faisait nuit, y avait seulement un tout petit peu de lumière qui filtrait depuis la rue. Et j'ai vu Câlinot le Singe assis sur le rebord de la fenêtre et regardant dehors comme tu l'avais mis. Le bruit c'était lui. Il chantait.

Koukaberra perché
Dans le vieux caoutchouc
Roi de la brousse
Roi de la brousse
Ris Koukaberra
Ris grand roi
Chante ta joie.

Je l'ai écouté chanter sans arrêt. Il chantait. Il chantait. Il chantait. C'était doux. Et quand je me suis endormie, j'ai rêvé d'arc-en-ciel.

Jessica

Chère Jessica,
Une fois, j'avais cinq ans. C'était l'été. J'étais resté debout tard pasqu'il y avait pas école le lendemain. Et j'ai fait un mauvais rêve.
Je m'ai réveillé. Il faisait tout noir dans ma chambre. Il y avait une ombre sur le placard. Tout était silencieux. Je ne me sentais pas bien. Je transpirais. C'était froid sur moi. Je m'ai assis dans mon lit et j'ai attendu. Puis je suis sorti du lit. J'ai tendu le doigt dans la direction de la porte et j'y suis allé. Je suis allé dans l'entrée en pyjama. Je suis resté dans le hall devant la petite veilleuse qui est au-dessus de la chambre de mes parents. J'écoutais. Mais je n'entendais rien. A l'intérieur de leur chambre c'était tout noir.
J'étais là, en pyjama. J'ai regardé dans la chambre de mes parents mais il faisait tout noir. J'ai écouté et je n'ai pas entendu un seul bruit. Alors j'ai dit quelque chose, très, très doucement, dans l'entrée :
- Il n'y a personne, là-dedans ?

Gulp.

FIN
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