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 LA REINE MARGOT de la part d'EPHISTO

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MARCO
Jean2
JeanneMarie
epistophélès
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epistophélès

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MessageSujet: LA REINE MARGOT    LA REINE MARGOT   de la part d'EPHISTO - Page 3 EmptySam 20 Nov - 0:08

"Henri IV quitta Coeuvres extrêmement vexé et rejoignit son armée ; mais l'image de la blonde Gabrielle le poursuivait, et à quelques temps de là, nous dit Villegomblain, "

un nouveau voyage, en apparence fondé sur une entreprise sur la ville de la Fère, ayant esté résolu, il eut de nouveau la vue de la belle, et en sentit complètement les pointures".


Hélas ! cette fois encore, Gabrielle reçut fort mal le roi qui, furieux rentra à Compiègne où se trouvait installée provisoirement la Cour, et convoqua le duc de Bellegarde.

- Monsieur, lui dit-il, j'entends ne partager pas plus la femme que j'aime que la royauté. Je suis aussi jaloux de l'une que de l'autre. Je vous demande donc de ne plus penser à Melle d'Estrées".

Bellegarde, navré, alla sur-le champ mettre Gabrielle au courant de la décision royale. Fort en colère, la demoiselle monta dans un carosse et se rendit à Compiègne pour dire à Henri IV ce qu'elle pensait de sa façon d'agir. Sur un ton vif, elle lui reprocha de se mêler de ce qui ne le regardait pas, ajoutant
"qu'elle entendait être libre dans ses inclinations et qu'il ne s'attirerait que sa haine s'il l'empêchait d'épouser le duc de Bellegarde
."

Après quoi, sans même attendre une réponse, elle repartit pour Coeuvres.

"Frappé comme d'un coup de foudre, nous dit Dreux du Radier, le roi se livra à tous les sentiments du chagrin le plus vif. Les menaces de Melle d'Estrées l'étonnèrent plus que tous les dangers qu'il avoit courus. On vit alors le héros de Coutras, d'Arques, d'Ivry, le roi le plus brave et le plus intrépide qu'ait eu la France, étourdi de ce coup, tremblant et désespéré."

Il ne put dormir de la nuit et conçut un projet insensé qu'il exécuta dès le lendemain matin. Abandonnant son armée, interronpant la lutte contre la Ligue, oubliant qu'il était en train de conquérir un royaume, il partit avec cinq de ses confidents les plus intimes en direction de Coeuvres, où il voulait aller implorer son pardon.

Cette entreprise était d'une folle témérité, car deux garnisons ennemies occpaient une forêt par laquelle il devait nécessairement passer. Le risque d'être reconnu et pris par les Ligueurs était si grand qu'il avait imaginé un stratagème digne d'un collégien amoureux.
A trois lieues du château de Coeuvres, il renvoya ses compagnons, descendit de cheval, s'habilla en paysan, se mit un sac plein de paille sur la tête et acheva son voyage à pied
.


"Melle d'Estrées, qui était, nous dit Sauval, avec Mme de Villars, sa soeur, à la fenêtre d'une galerie d'où l'on découvrait fort loin dans la campagne, vit ce paysan et ne pensant à rien moins qu'à une si bizarre aventure n'examina point son visage.
Quand le roi fut entré dans la cour du château, il jeta son sac, monta, sans avertir personne, au lieu où il avait vu celle qui étoit la cause de son déguisement ; il l'aborda d'une manière fort soumise. Mais il la surprit extrêmement, quand elle l'aperçut dans un équipage si peu conforme à sa dignité ; et, bien loin de lui être obligée de ce qu'il venoit de faire pour avoir le plaisir de la voir, elle le reçut d'un air méprisant qui convenoit mieux à l'habit qu'il portoit qu'à l'éclat de sa naissance. Elle lui dit d'un air dédaigneux qu'il allât changer d'habit s'il vouloit demeurer auprès d'elle, et le quitta brusquement, laissant à sa soeur le soin d'excuser son incivilité
."
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MessageSujet: LA REINE MARGOT    LA REINE MARGOT   de la part d'EPHISTO - Page 3 EmptySam 20 Nov - 0:32

"Ce voyage pendant lequel Henri IV avait couru le risque de perdre sa couronne avait donc été inutile. Il rentra à Compiègne désespéré.

"Il paraissoit sur son visage tant d'affliction, précise Sauval, que ceux qui le virent dans un si grand abattement crurent qu'il avoit au moins perdu la moitié de son royaume."

Ne pouvant plus vivre sans voir Gabrielle, il nomma Antoine d'Estrées membre de son Conseil privé, pensant bien attirer ainsi toute la famille à Compiègne.
Le coup réussit. La semaine ne s'était pas écoulée que le père et les deux filles s'installaient à la Cour.


A partir de ce moment, Gabrielle, comprenant que l'amour qu'elle inspirait pouvait être utile à sa famille, se montra plus aimable avec Henri IV. Toutefois, elle ne tolérait pas qu'il lui mît "la main à la fesse", et le pauvre en souffrait
...

La victoire, pourtant bien timide, que venait de remporter le roi, accabla Bellegarde, toujours ausi amoureux de Gabrielle, et désola tous les soupirants que la blonde Picarde traînait à ses trousses.

L'un deux, l'ambitieux duc de Longueville, avec qui Mlle d'Estrées se montrait coquette et tendre, fut plus inquiet que peiné. Ayant réussi facilement là où Henri IV éprouvait quelques difficultés, il craignit que sa bonne fortune ne lui attirât des ennuis avec le souverain.

"Il ne voulait pas, nous dit Dreux du Radier, acheter ses plaisirs au prix d'une disgrâce
."
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MessageSujet: LA REINE MARGOT    LA REINE MARGOT   de la part d'EPHISTO - Page 3 EmptySam 20 Nov - 11:35

"Pressé de finir une intrigue qui ne pouvait avoir que des suites fâcheuses pour lui, il réclama ses lettres à Gabrielle d'Estrées et offrit de lui rendre les siennes.
L'échange eut lieu dans un coin retiré du parc de Compiègne et les deux amants se séparèrent à l'amiable ; mais , lorsqu'elle rentra chez elle, Gabrielle s'aperçut avec colère que Longueville, "pour la tenir dans une espèce de dépendance", avait conservé les billets les plus tendres
.

Elle se vengea assez méchamment enle faisant tuer quelque temps après, au moment où sa garnison tirait une salve d'honneur. ( Sauval dit : [i]"

on accusa Mlle d'Estrées d'avoir suborné un soldat pour lui ôter la vie en cette occasion, et cela n'étoit pas sans apparence
.
")

Comme le dit un historien du temps, "Mlle d'Estrées n'était pas d'un caractère commode[/size]".

[size=18]Si les amoureux de la belle Gabrielle étaient navrés de voir une intrigue s'ébaucher entre le roi, et leur idole, en ravanche, la famille d'Estrées considérait les choses avec beaucoup de satisfaction et de nombreuses arrière-pensées...

Il faut dire que cette famille avait alors bien des raisons de vouloir se rapprocher du roi.


Avant de donner ces raisons, il me faut présenter les trois principaux personnages avec qui vivait Gabrielle : son père d'abord, Antoine d'Estrées, sa tante, Isabeau Babou de la Bourdaisière, dame de Sourdis (qui lui servait de mère depuis que Mme d'Estrées avait quitté le domicile conjugal pour vivre en Auvergne avec son jeune amant), et son oncle, M. François de Sourdis.

Ces trois personnes étaient, à des titres divers, victimes de la guerre civile. Antoine d'Estrées ne se consolait pas d'avoir perdu son poste de gouverneur de la Fère en 1589, (quand la Ligue s'était emparée de la cité), M. de Sourdis, qui gouvernait naguère Chartres se désolait d'avoir été chassé de la ville par les catholiques, et Mme de Sourdis était fort triste parce que son amant le chancelier Hurault de Cheverny, s'était vus retirer le gouvernement du pays chartrain.


Tous trois attendaient donc beaucoup du roi et suivaient d'un très bon oeil le développement de sa passion pour Gabrielle... Ils voyaient là, en effet, un moyen inespéré de retrouver tout ce qui était perdu, et un marché fut habilement proposé par Mme de Sourdis qui laissa entendre à Henri IV, alors au paroxysme du désir, que Gabrielle serait à lui s'il rendait La Fère à Antoine, Chartres à Sourdis et le pays chartrain à Cheverny...

En bonne épouse et en maîtresse dévouée, elle insita naturellement pour que l'on commençât par s'occuper de Chartres.

Henri IV fut très embarrassé, car il avait alors l'intention de s'emparer de Rouen.
"

Jamais en effet, nous dit Pierre de Vaissière, les circonstances n'avaient été plus favorables à une tentative sur la capitale de la Normandie ; le gouverneur, M. de Tavan es, était à ce moment, disait-on, en complet désaccord avec les autorités municipales et les habitants ; les fortifications étaient mal entretenues ; la ville dénuée de vivres et de munitions. Bien mieux, les membres du Parlement de Normandie réfugiés à Caen offraient de voter "la levée d'une bonne et grosse somme de deniers pour assurer le succès de l'affaire".


Il y avait là une occasion à ne pas laisser échapper.

Henri IV hésita pendant quelques jours. Aller attaquer Rouen, tout de suite, c'était économiser des vies humaines et fortifier sa position entre Paris et la Manche par où venaient les secours anglais ; aller mettre le siège devant Chartres, c'était courir l'aventure, perdre des hommes, permettre à Rouen de s'armer, décevoir les conseillers normands, risquer de se faire couper la route de la Manche ; mais c'était aussi mettre Gabrielle d'Estrées dans son lit....
Finalement, le roi se décida ; il réunit tous ses capitaines et leur annonça sans un mot de commentaire :

- Nous allons attaquer Chartres !

Les chefs militaires furent stupéfaits et atterrés. L'entreprise leur semblait aberrante, extravagante, insensée.
Pourtant, ils n'osèrent point élever d'objections et l'armée se mit en route.


Dès que le siège fut oranisé, trois spectateurs fort intéressés par les opérations vinrent rejoindre le roi : M. de Sourdis, son épouse et la belle Gabrielle...

(Pierre de Vaissière : "A cette opération dont la réussite semblait ne pas faire de doute, on voit pourtant le roi préférer une entreprise dirigée contre la ville dont le nom seul : Chartres, pourrait nous faire soupçonner de qui émanait le projet, si nous ne savions positivement par d'Aubigné et d'autres que c'est bien Cheverny et Sourdis, les gouverneurs évincés de la ville et du pays, qui en furent les inspirateurs.
Et que cette fois l'enjeu de la partie ait été la personne de Gabrielle, la chose appara^t d'autant plus probable, sinon certaine, que nous voyons Mlle d'Estrée suivre, avec les Sourdis, le Béarnais
devant Chartres."

Henri IV vit arriver avec ravissement la jeune femme qui était l'enjeu de toute cette opération militaire.
Il l'aida à descendre de litière et fut ébloui : elle portait une robe de velours vert qui s'harmonisait parfaitement avec ses cheveux blonds, ainsi qu'une petite toque de même étoffe. Enfin, pour affronter le froid de ce mois de février, elle avait chaussé ses pieds de mignonnes bottes de maroquin rouge.

Mme de Sourdis était maligne, car cette adorable vision était bien faite pour exciter le roi
."
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MessageSujet: LA REINE MARGOT   LA REINE MARGOT   de la part d'EPHISTO - Page 3 EmptySam 20 Nov - 20:25

"Tandis que la famille d''Etrées-Sourdis s'installait à l'auberge de la Croix de Fer qui servait de quartier général à Henri IV, celui-ci faisait creuser des tranchées autour de la p lace et bombarder les fortifications.

- Le siège sera court ! déclara-t-il.


Les Chartrains n'étaient pas aussi démunis que les Rouennais. Il se slaissèrent enfermer dans leur ville et narguèrent les troupes royales. Vexé, le roi les somma de se rendre. Ils répondirent avec hauteur qu'ils étaient prêts à lui ouvrir les portes s'il se convertissait à la religion catholique, mais qu'ils se refusaient à servir un hérétique.

Le siège dura deux mois. Tous les jours, des boulets s'abattaient sur la ville, écrasant, tuant, estropiant de braves gens. Les assiégés n'en conservaient pas moins un étonnant moral : un matin, pour repousser les assaillants, ils n'hésitèrent pas à brûler leurs maisons et à les renverser en dehors des murailles
.

Du côté des assiégeants, la vie était beaucoup plus agréable. Henri IV, en effet, "faisait venir des filles de joie expertes en l'art de Vénus pour le plaisir de ses capitaines" et organisait chaque soir de petites sauteries qui lui permettaient de danser avec la belle Gabrielle. Le spectacle de ces hommes et de ces femmes enlacés "et même au-delà", nous dit-on, qui ne se gênaient pas pour
"jouer à la chosette" publiquement dans les couloirs et même sous le manteau des vastes cheminées, échauffa le sang du roi. Ses artères temporales prirent un relief inquiétant et Gabrielle lui fit plus envie que jamais.

Pour précipiter les événements, il donna un matin à ses sapeurs l'ordre de faire sauter une partie des remparts avec des mines.

Comprenant que toute résistance était désormais inutile, les Ligueurs ouvrirent les portes.

Quand on vit annoncer cette nouvelle à Henri IV, son oeil s'alluma. Que lui importait à ce moment les huit semaines de vie difficile dans la boue des tranchées, les dangers quotidiens et les douze cents hommes et huit maîtres de camp que lui coûtait l'opération . Il était sûr de coucher avec Gabrielle d'Estrées
.

Chartres capitula le 10 avril 1591. Aussitôt M. de Sourdis était rétabli comme gouverneur de la ville tandis que M. de Cheverny redevenait gouverneur du pays.

Et le soir même Henri IV pouvait enfin montrer à la belle Gabrielle qu'il était aussi ardent au lit que sur un champ de bataille...

Le lendemain, dans les rues de Chartres, eut lieu une grande procession que le roi troubla par une de ces gamineries dont il était coutumier. Alors que les Chartrains se rendaient au couvent des Saints-Pères en chantant des cantiques, Henri IV, accompagné de quesques seigneurs protestants, s'amusa à couper leur cortège, pour aller entendre le prêche d'un pasteur qui s'était installé dans un tripot. Cette plaisanterie, d'un goût douteux, mécontenta considérablement les vaincu qui étaient fortement attachés à la religion catholique, et causa un scandale en raison de la très mauvaise réputation dont jouissait l'établissement.


C'était, nous dit le Journal du Siège de Chartres, "le lieu le plus profane de la ville, où les bateleurs jouaient ordinairement leurs farces et apprenaoient aux ruffians à débaucher les honnestes femmes mariées, à tenir le
s bacchanales, à violer les vierges chastes et à crocheter chambres et buffets".

Le comportement du roi de France, en cette occasion, peut étonner ; mais le fait qu'il ait choqué les Ligueurs nous surprend bien davantage. En effet, depuis deux ans, les partisans de M. de Mayenne organisaient, tant à Paris qu'en province, de très curieuses processions, dont le moins qu'on puisse dire est qu'elles manquaient de tenue. Les participants, hommes et femmes, défilaient derrière la croix "dans un état complet de nudité".

Les prêtres, pour se distinguer de leurs paroissiens, portaient bien une guimpe de toile blanche, mais ce léger vêtement n'arrangeait guère les choses, "pour ce qu'il leur arrivait simplement aux hanches."...

Naturellement ces cérémonies avaient un énorme succès, et un chroniqueur du temps nous dit :
"Le peuple estoit tellement eschauffé et enragé, s'il faut parler ainsi, après ces belles dévotions processionnaires, qu'ils se levoyent bien souvent de nuit, de leurs lits, pour aller quérir les curés de leurs paroisses, pour les mener en procession comme ils firent en ces jours au curé de Saint-Eustache, que quelques paroissiens furent quérir la nuit et le contraignirent de se relever. A la vérité ce bon curé, avec deux ou trois autres de la ville de Paris, condamnoit ces processions nocturnes, parce que les hommes et femmes et filles et garçons marchoient pêle-mêle ensemble et tous nuds, et engendroient des fruits aultres que ceux pour la fin desquels elles avoient été instituées. Comme de fait, près de la porte Montmartre, la fille d'une bonnetière en rapporta des fruits au bout de neuf mois ; et un curé qu'on avoit ouy prescher peu auparavant qu'en ces processions les pieds blancs et douillets des femmes estoient fort agréables à Dieu, en plants un autre qui vinst à matuité au bout de terme."

L'époque, il est vrai, n'était pas à l'austérité. En cette France bouleversée par la guerre civile, les désordres les plus regrettables se déroulaient quotidiennement, aussi bien du côté protestant que du côté catholique ; et il est amusant de constater que ces hommes qui se haïssaient avaient tout de même un point commun : l'amour pour les nonnes. Ces saintes femmes, en effet, n'eurent jamais autant de succès qu'en ces temps de guerres religieuses.

Les Huguenots les violaient, avec le sentiment agréable de mécontenter le Pape, et les Ligueurs leur faisaient des enfants pour augmenter le nombre des catholiques.

Les nonnes, d'ailleurs, s'habituèrent assez rapidement à cette existence voluptueuse. Accortes, elles offraient aux soldats de la Sainte Union qui venaient frapper à la porte de leur couvent une hospitalité qui témoignait d'une conception hardie de la charité chrétienne. L'abbesse ou la prieure donnait d'ailleurs l'exemple à ses filles, et
"pourvu qu'elle ne fût pas trop vieille, ni trop laide, elle se mettait avec le chef de la troupe".
color=red]C'étaient alors des banquets, des chansons, des orgies qui duraient "tant que a maison des filles du seigneur abritait une garnison[/size]".

En certains endroits, à Paris notamment, elles allèrent jusqu'à enfreindre leurs voeux et à quitter le régime claustral.

Un chroniqueur nous dit "
t]]"qu'on ne voyoit que genstilshommes et religieuses accouplés, qui se faisoient l'amour et se leschaient le morveau".[/i]

Ces femmes se promenaient sans aucune honte avec leurs amants dans les lieux publics, "aussi vilaines et desbordées en paroles que tout le reste", portant sous le voile qu'elles avaient conservé, comme seul indice de leur état, "vrais habits de putain et courtisane, estant lardées, musquées et pouldrées".

Comparée à ces dérèglements, la gaminerie de Henri IV était, on le voit, bien anodine ...
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MessageSujet: LA REINE MARGOT   LA REINE MARGOT   de la part d'EPHISTO - Page 3 EmptyMer 24 Nov - 19:36

"Après la prise de Chartres, les Conseillers, qui étaient partisans d'une offensive contre Rouen, insistèrent auprès du roi pour que l'arméee se rendît immédiatement en Normandie ; mais Henri, tout à la joie de de pouvoir enfin savourer la belle Gabrielle, fit la sourde oreille et, un beau soir, quitta tout le monde pour suivre sa nouvelle maîtresse à Coeuvres.

Pendant plus d'un mois, il se désintéressa complètement de la situation militaire pour s'abandonner à la douceur de ce qu'on appelait alors "la belle vie"...

Hélas ! les derniers jours de cette lune de miel furent troublés par Antoine d'Estrées qui, brusquement, laissa entendre à sa fille qu'il ne voulait pas jouer plus longtemps les pères complaisants.


Cette attitude était causée par la rancoeur. Au moment où Gabrielle était entrée dans la couche royale, Antoine, seul de la famille, n'avait rien reçu en compensation, et son amertume était considérable.

Un soir, il appela Gabrielle :

- Le roi est marié, lui dit-il, jamais il ne répudiera sa femme. Vous voilà donc engagée dans des liens scandaleux, qu'il vous faut rompre au plus vite. Je vais vous y aider d'ailleurs en vous mariant avec le sire de Liancourt
.

Gabrielle fut épouvantée et rentra dans sa chambre en larmes.

Or qu'on ne se méprenne point : ce n'est pas le roi qu'elle craignait de perdre en se mariant, mais Bellegarde, qu'elle n'avait pas cessé d'aimer et dont elle espérait encore devenir la femme. Il fallait donc, pour rester libre, amadouer Antoine d'Estrées en lui faisant donner au plus vite une charge importante
.

Elle réfléchit et, quelques jours plus tard, demanda à Henri IV d'aller prendre aux Ligueurs la ville de Noyon, située à quinze lieues de Coeuvres.

Le roi s'en étonna.


- Cela me ferait plaisir, dit-elle en souriant.

Immédiatement, il partit rejoindre ses capitaines :

- Messieurs, nous allons demain mettre le siège devant Noyon...

Il y eut un grand silence. Cette décision extravagante, prise au moment où la conquête de la Normandie était de la plus haute importance pour le roi, laissa tout le monde abasourdi. Enfin, les conseiller demandèrent au souverain ce qui le poussait dans cette entreprise. Henri IV leur répondit que cela ne regardait que lui, et l'armée se dirigea vers la Picardie.


Le siège dura quinze jours. Le 17 août les Noyonnais capitulèrent. Aussitôt, Antoine d'Estrées fut nommé gouverneur de la ville, tandis que l'un de ses fils - car il fallait que tout le monde profitât de la bonne fortune échue à Gabrielle - devenait évêque...

Beaucoup plus détendu, le châtelain de Coeuvres sembla se désintéresser dès lors de l'honneur de sa famille

La favorite avait obtenu ce qu'elle voulait. (Tous les historiens du temps sont d'accord pour rendre Gabrielle d'Estrées responsable de cette incompréhensible entreprise militaire contre Noyon qui nous valut une centaine de morts inutiles.)

On pourrait alors penser qu'après avoir fait ainsi la volonté de sa maîtresse, Henri IV se dirigerait sans attendre vers Rouen. Il n'en fit rien, bien que les troupes anglaises, envoyées par Elisabeth, fussent arrivées à Dieppe, prêtes à l'aider dans son entreprise contre la capitale normande.

Ravi de se trouver dans les bras de sa chère Gabrielle, il s'attarda à Noyon.

Elisabeth, un peu étonnée de cette inaction, envoya son ambassadeur Unton pour voir ce qui se passait.
Initiative malheureuse, car le roi se servit de cette visite pour demeurer près de sa maîtresse un peu plus longtemps encore.

- Puisque vous êtes là, monsieur l'ambassadeur, dit-il, nous allons organiser de grandes fêtes...

On s'amusa dès lors beaucoup, on dansa, on badina gaillardement et, le 31 octobre, Unton fort choqué, écrivait à la reine d'Angleterre :


"Madame, le roi a choisi cette ville à cause du grand amour qu'ila pour la fille du gouverneur, qui a tout pouvoir sur lui, et c'est moi qui sers de prétexte à son séjour ic
i."

Enfin, vers la mi-novembre, Henri IV consentit à sortir de cette vie de plaisir et à se mettre en route. Le 3 décembre, il était avec ses armées devant Rouen. Mais les retards apportés à cette expédition avaient été mis à profit par les Rouennais, et le siège se termina par un échec dont la belle Gabrielle peut être tenue pour responsable devant l'Histoire...
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MessageSujet: LA REINE MARGOT   LA REINE MARGOT   de la part d'EPHISTO - Page 3 EmptyMer 24 Nov - 20:07

LE ROI TROUVE BELLEGARDE SOUS LE LIT DE GABRIELLE

"On ne peut dire d'un ménage qu'il est bien fait que lorsque rien ne traîne sous les meubles" - Comtesse de TRAMAR.


Au mois d'août 1592, Henri IV eut une mauvaise surprise. Il apprit que Gabrielle, dont il faisait pourtant tous les caprices, continuait, en cachette, à se faire "visiter le labyrinthe", comme on disait alors, par Roger de Bellegarde.

Dès qu'il regagnait son armée, en effet, la belle retournait sans aucun remords dans la couche de ce jeune homme ardent et spirituel qu'elle espérait toujours épouser, et se livrait avec lui à des joutes exténuantes dont le bruit faisait, paraît-il, plaisir à entendre.

Le roi fut contrarié. Pendant quelques jours, il se désintéressa complètement de la situation militaire pour chercher un moyen d'éliminer Bellegarde définitivement et sans éclat.

Après avoir imaginé quelques statagèmes assez compliqués, il pensa que le plus simple était de marier Gabrielle à un homme complaisant et se souvint alors d'un pétendant agrée par Antoine d'Estrées, le malingre et ridicule Nicolas d'Amerval, sieur de Liancourt, qui réunissait toutes les qualités souhaitées, puisqu'il était pauvre, benêt et nanti de deux filles à élever, fruits d'un premier mariage.


Aussitôt, il fit venir en secret Antoine d'Estrées et lui demanda de marier, sans attendre, Gabrielle au sieur de Liancourt.

Le gouverneur de Noyon fut très étonné. Il pensa que Henri et sa fille s'étaient brouillés et craignit de perdre les nombreux avantages qu'il devait au plaisir royal. Pour gagner du temps, il objecta qu'un mariage coûtait cher et qu'il n'avait pas suffisamment d'argent.

- J'y ai pensé, dit le roi.
Et il lui fit remettre cinquante mille écus soleil.


Gabrielle devint folle de fureur en apprenant qu'on la donnait à ce personnage falot.

Elle protesta et écrivit au roi pour lui demander son aide. Henri IV lui répondit sur un ton doucereux qu'elle ne devait avoir aucune crainte, car il serait là pour empêcher la cérémonie. Rassurée, Gabrielle fit semblant d'accepter le mari qu'on lui destinait.


Naturellement, le 8 juin, jour des noces, le roi ne vint pas et la pauvre fiancée, arpès avoir espéré son intervention jusqu'à la dernière minute, se laissa finalement conduire à l'autel. Comme elle était dans un état de grand abattement, la cérémonie fut terne, et le raps qui suivit extrêmement morne.

Mais la belle croyait encore que le roi serait là avant que Mme de Sourdis, sa tante, ne la conduisit à la chambre nuptiale. A dix heures du soir, elle dut se rendre à l'évidence : le roi l'avait abandonnée
.


"Alors, nous dit Sauval, la nouvelle mariée voyant arriver l'heure fatale où elle devoit être livrée au monstre qu'on lui avoit choisi pour époux, sans que galant parût pour la garantir du péril où elle alloit être esposée, après avoir pesté cent fois contre sa négligence et juré autant de fois qu'elle s'en vengeroit, elle se prépara à soutenir l'attaque avec toute la vigueur dont elle étoit capable. Comme elle vit qu'il ne falloit plus attendre de secours que d'elle-même, elle opposa si bien sa résistance aux empressements de son mari qu'il ne put la faire résoudre à se coucher de toute la nuit."

Cette union ne commençait pas bien pour le pauvre Nicolas de Liancourt.

Elle allait continuer plus mal encore.

Le lendemain soir, il se jeta aux pieds de Gabrielle et la supplia en pleurant de vouloir bien entrer dans le lit avec lui.

Prise de pitié, la belle finit par se coucher. Il se produisit alors un phénomène assez courant pour que M. Kinsey leui ait consacré un long chapitre dans son "Rapport: Nicolas fut saisi, en voyant à ses côtés cette fraîche et jolie fille de dix-neuf ans entièrement nue, d'une émotion qui le priva de tous ses moyens.
Gêné, il se releva et alla vers la ffenêtre ouverte, dans l'espoir que l'air de la nuit agirait bénéfiquement sur son ressort intime. Au bout d'un moment, il eut un frisson et éternua. C'est tout l'effet que la brise nocturne produisit sur lui.
Le peuvre pensa qu'il pourrait se réhabiliter rapidement. Hélas ! il eut la même défaillance le lendemain et tous les jours suivants
."

Incapable de forcer son talent, il finit par se résigner, tandis que Gabrielle, ravie, remerciait le ciel de lui avoir épargné une rude corvée
.
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MARCO

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MessageSujet: Re: LA REINE MARGOT de la part d'EPHISTO   LA REINE MARGOT   de la part d'EPHISTO - Page 3 EmptyJeu 25 Nov - 21:55

Et le viagra qui n'existait pas encore !!
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epistophélès

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MessageSujet: LA REINE MARGOT   LA REINE MARGOT   de la part d'EPHISTO - Page 3 EmptyVen 26 Nov - 0:24

Merci Marco, suis contente de constater que certains me lisent. ...... scratch Very Happy
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JEAN

JEAN


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MessageSujet: Re: LA REINE MARGOT de la part d'EPHISTO   LA REINE MARGOT   de la part d'EPHISTO - Page 3 EmptyVen 26 Nov - 12:11

Je prends toujours beaucoup de plaisir à lire tes tranches d'Histoire Episto .
Merci!
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JeanneMarie

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MessageSujet: Re: LA REINE MARGOT de la part d'EPHISTO   LA REINE MARGOT   de la part d'EPHISTO - Page 3 EmptyVen 26 Nov - 16:28

Sois tranquille , tu as ton fan club ici !!
Et tu peux t'enorgueillir !! Nous sommes en pays musulman et tes histoires sont bien corsées .. Qu'à cela ne tienne , elles plaisent !! Razz
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MessageSujet: LA REINE MARGOT   LA REINE MARGOT   de la part d'EPHISTO - Page 3 EmptyVen 26 Nov - 19:54

"Quelques jours après ce mariage blanc, Gabrielle d'Estrées reçut une nouvelle qui l'attrista et lui permit de s'enfermer de longues heures dans ses appartements sous prétexte de pleurer.

Sa mère, Françoise d'Estrées, avait été tuée à Issoire avec son jeune amant le marquis d'Allègre, gouverneur de la ville. Ce meurtre avait été commis dans des circonstances curieuses. Un soir, une douzaine d'hommes, conduits par deux bouchers, étaient venus attaquer le gouverneur et sa maîtresse auxquels ils reprochaient une luxe scandaleux. Après avoir enfoncé la porte, ils s'étaient rués sur les malheureux et les avaient tués à coups de couteau. Puis ils s'étaient amusé à traîner les cadavres dans la rue et à les exposer entièrement nus, aux regards des passants
.

On avait alors pu constater que l'élégante Françoise se faisait de petites nattes "ornées de rubans" en un endroit tout à fait inattendu de sa personne...

"Ce qui prouve, nous dit un historien du temps, qu'elle était coquette et se voulait parée pour être à tout instant en mesure de plaire, ceci dans le cas où lui serait venu inopinément quelque visiteur..."
On était de bonne race, dans la famille de Gabrielle.


Pendant deux mois, le malheureux Liancourt n'ayant jamais essayé de renouveler ses lamentables essais, les jeunes époux vécurent sans histoire, présentant même toutes les apparences du bonheur conjugal.

L'arrivée du roi allait troubler
cette belle paix.

A la fin du mois d'août, Henri IV vint, en effet, s'installer à proximité du château d'Amerval, bien décidé à remettre Gabrielle dans son lit.

Mais celle-ci n'avait pas pardonné au souverain de l'avoir laissée se marier ; elle lui fit savoir qu'elle ne reprendrait pas son activité de favorite.Le Béarnais avait le secret - et les moyens - d'amadouer les gens : il dicta des lettres patentes qui faisaient Antoine d'Estrées gouverneur de l'Ile-de France et accordaient à Gabrielle d'importants domaines.


Voici le texte d'un de ces actes inspirés par le désir :
Henry, par la grâce de Dieu, roi de France et de Navarre, Savoir faisons que Nous, voulant reconnaître comme notre ami et féal chevalier des Ordres, capitaine de cinquante hommes d'armes de nos ordonnances, le sieur d'Estrées, notre lieutenant général de l'Ile de France, par les grands et recommandables services qu'il a faits à nos prédécesseurs et à Nous en diverses circonstances et voulant par les susdites considérations gratifier notre chère et bien-aimée Gabrielle d'Estrées, sa fille, avons donné et délaissé, donnons et délaissons à ladite dame nos terres et seigneurie d'Assy et ensemble le château de Saint-Lambert, avec les bois, terres, prés, etc., y appartenant.

Quelques jours plus tard, Gabrielle se trouvait, douce et ronronnante, dans le lit du Béarnais.

Nicolas s'aperçut tout de suite de son infortune et fit mine de protester. Aussitôt une charge extrêmement importante vint lui permettre d'élever convenablement ses deux petites filles : il fut nommé Gentilhomme de la Chambre du Roi...
Pourvu de ce titre savoureux, il vécut dès lors en fermant les yeux
...
"
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MessageSujet: LA REINE MARGOT   LA REINE MARGOT   de la part d'EPHISTO - Page 3 EmptyVen 26 Nov - 20:33

r=brown]]"En octobre 1592, la Cour errante du "roi sans capitale" s'installa à Saint-Denis. Gabrielle y vint rejoindre Henri IV qui la remercia publiquement en organisant une grande fête avec des violons.

Pendant quelques jours, le roi oubliant de nouveau son trône, son royaume et son armée qui attendait un peu déconcertée, qu'on lui donnât des ordres, se consacrat entièrement au corps merveilleux de sa favorite.


Cette vie voluptueuse devait être de courte durée. Au début de novembre, le prince de Parme ayant fait son apparition avec des troupes nombreuses à la fontière Nord-Est, le Béarnais dut sortir du lit de Gabrielle, s'habiller à la hâte et se mettre en campagne pour parer à cette nouvelle menace.

Le lendemain, un personnage souriant arrivait à Saint-Denis. C'était Roger de Bellegarde qui voulait profiter de l'absence du roi pour essayer de reprendre sa place en un endroit dont il conservait bon souvenir.
En le voyant paraître, la favorite fut extrêmement émue. Elle n'avait pas cessé d'aimer le Grand Ecuyer et le liu avoua sans détours, dès qu'ils furent seuls.
Le soir, ils étaient au lit, fêtant joliment leurs retrouvailles.

Henri IV aurait sans doute ignoré cette infidélité si le duc de Parme n'était mort subitement. Privée de son chef, l'armée ennemie, en effet, se disloqua aussitôt et le roi, n'ayant, dès lors, plus rien à craindre dans le Nord, revint à Saint-Denis où l'attitude gênée de Bellegarde lui donna quelques soupçons.

Un jour, il faillit bien avoir la preuve de son infortune. Voici ce que nous conte Sauval, dans son style savoureux :
"

Le roi, étant parti fort matin pour exécuter quelque entreprise qu'il avait préméditée, laissa Gabrielle d'Estrées au lit, où elle demeura sous prétexte d'une feinte incommodité, pendant que Bellegarde, pour mieux cacher son jeu, publia qu'il retournait à Mantes ; mais aussitôt que le roi fut parti, Arphure, confident de Mme Gabrielle, qu'on nommait ordinairement la rousse, , introduisit le duc dans un cabinet dont elle seule avait la clef, et l'en retira quand sa maîtresse se fut défaite de toutes les personnes qui lui pourvaient être suspectes. Pendant que ces deux amants ne songeaient qu'à goûter tous les plaisirs qu'une tendre passion peut donner, le roi, qui n'avait pu exécuter son dessein, revint à Saint-Denis. Epouvantée, Gabrielle appela Arphure, qui fit promptement entrer le duc dans le cabinet où il demeura sans bouger."


Il était temps ; déjà le roi poussait la porte de la chambre. Voyant que sa maîtresse était encore au lit, il se recoucha près d'elle, sans se soucier d'un Conseil qui l'attendait, et se montra galant homme.

Mais l'amour a le pouvoir d'ouvrir l'appétit, "aussi, nous dit Sauval, eut-il envie de manger des confitures.
Comme il savait qu'Arphure enfermait celles de sa maîtresse dans le cabinet qui donnait dans la ruelle, il en demanda la clef. Mme Gabrielle répondit que cette fille l'avait emportée, et qu'elle était allée visiter quelque parente qu'elle avait dans la ville. Le roi, que ces refus firent entrer dans quelques soupçons, se mit en devoir d'enfoncer la porte, quoique Mme Gabrielle, pour l'en empêcher, se plaignit que le bruit lui faisait mal à la tête. Le roi, qui voulait absolument s'éclaircir de ce doute, feignit de ne pas entendre et continua toujours de donner des coups de pied dans la porte. Bellegarde, voyant qu'il allait bientôt être forcé dans son asile, crut devoir tout hasarder pour se tirer d'un si mauvais pas et, comme il ne pouvait s'échapper que par la fenêtre, il l'ouvrit et sauta dans le jardin, quoique le saut fût un peu rude à cause de la grande hauteur. La fortune lui fut favorable et il ne se fit point de mal, soit que la terre fût humide, ou que sa disposition eût rendu sa chute moins dangereuse.


Arphure, qui était en sentinelle pour observer ce qu'il deviendrait, ne l'eut pas plus tôt vu sauter qu'elle revint, faisant l'empressée, et dit pour s'excuser qu'elle n'avait pas cru qu'on pût avoir besoin d'elle. Cette adroite confident ouvrit incontinent le cabinet et donna au roi les confitures qu'il demandait.
Ce prince, surpris de 'ny trouver personne, s'imagina que Bellegarde était devenu invisible, et Mme Gabrielle, que son étonnement avait rendue hardie, lui fit mille reproches injurieux. Elle lui dit qu'apparemment son amour commençait à faiblir et qu'il ne cherchait qu'un prétexte pour rompre avec elle, mais qu'elle ne lui donnerait pas le loisir de quitter le premier, étant absolument résolue de se retirer auprès de son mari."


Effrayé par cette menace, le roi se jeta à ses pieds et lui demanda pardon. Après quoi, il se recoucha et fit en sorte qu'elle oubliât l'incident...

Cette aventure donna une confiance exagérée à Bellegarde, qui continua à rendre de fréquentes visites à Gabrielle.



L'une d'elles, la dernière d'ailleurs, se termina de façon burlesque. Le Grand Ecuyer se trouvait dans la chambre de la favorite lorsque le pas vif du roi résonna dans le couloir. Apeuré, il se glissa sous le lit.

Henri IV entra, se dévêtit, se coucha avec Gabrielle et, lui ayant montré son estime, eut faim comme d'habitude. Il appela Arphure et demanda des confitures. Pendant qu'il les mangeait, un petit craquement insolite se fit entendre. C'était le pauvre Bellegarde, à demi ankylosé, qui essayait de changer de position.

Henri IV regarda Gabrielle et vit une lueur d'angoisse dans ses yeux. Comprenant que son rival était là, il emplit une assiette de confitures et la tendit sous le lit :

- Tenez, dit-il, il faut que tout le monde vive ! ...

Puis , laissant Gabrielle interdite et Bellegarde rouge de honte, il s'en alla en riant aux éclats.[/size]"
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MessageSujet: LA REINE MARGOT   LA REINE MARGOT   de la part d'EPHISTO - Page 3 EmptyVen 26 Nov - 20:53

"Le Grand Ecuyer quitta Saint-Denis sur le-champ et le roi s'en crut débarrassé. Mais quelques jours plus tard, il intercpta une lettre que sa maîtresse écrivait à Bellegarde et constata que les sentiments de Gabrielle pour Roger étaient beaucoup plus vis qu'il ne le pensait. Pour la première fois de sa vie, il ddevint jaloux. Se désintéressant de la politique au moment même où la Ligue essayait de faire élire un roi, ce qui l'eût à tout jamais écarté du trône, il s'enferma dans sa chambre et rédigea l'étonnante lettre que voici :

"Il n'y a rien, ma chère maîtresse, qui ne continue plus mmes soupçons, ni qui ne les puisse plus augmenter, que la façon dont vous procédez à mon endroit. Puisqu'il vous plaît me commander de les bannir du tout, je le veux, mais vous ne trouverez mauvais que, à coeur ouvert, je vous en dise les moyens, puique, quelques attaques que je vous aie données assez découvertement, vous avez fait semblant de ne les p oint entendre.
Vous savez combien j'arrivai offensé en votre présence du voyage de mon compétiteur. La force, que vos yeux eurent sur moi, vous sauva la moitié de mes plaintes, vous me satisfîtes de bouche, non de coeur, comme il y parut. Mais si j'eusse su ce que j'ai appris, depuis être à Saint-Denis, dudit voyage, je ne vous eussse vue et eusse rompu tout à plat. Je brûlerais plutôt ma main qu'elle l'écrivît, et couperais plutôt ma langue qu'elle le dit jamais qu'à vous.
Vous me mandez que vous me tiendrez les promesses que vous me fîtes dernièrement. Comme le vieux Testament a été aboli par la venue de Notre-Seigneur, aussi vos promesses l'ont été par la lettre que vous écrivîtes à Compiègne. Il ne faut plus parler de : "Je ferai", il faut dire : "Je fais". Résolvez-vous donc, ma maîtresse, de n'avoir qu'un serviteur. Il est en vous de me changer, il est en vous de m'obliger. Vous me feriez tort si vous croyiez que rien qui soit au monde vous puisse servir avec tant d'amour que moi. Nul ne peut aussi égaler ma fidélité. Si j'ai commis quelque indiscrétion (allusion à la lettre interceptée) quelle folie ne fait pas commettre la jalousie ? Prenez-vous-en donc à vous.
Jamais maîtresse ne m'en avait donné ; c'est pourquoi je ne connaissais rien de si discret que moi. Feuille-Morte (les couleurs pain bis, cuir tanné, feuille-morte étaient à la mode, et Bellegarde était un élégant) a bien fait connaître, en craignant les Ligueurs, qu'il n'était ni amoureux, ni à moi.
J'ai telle envie de vous voir que je voudrais, pour l'abréviation de quatre ans de mon âge, le pouvoir faire aussitôt que cette lettre, que je finis par vous baiser un million de fois les mains."


Cette lettre produisit une telle impression sur Gabrielle qu'elle rompit immédiatement avec Bellegarde ; lequel se consola en deveant l'amant de Marguerite de Guise et de sa mère la belle duchesse de Nevers, veuve du duc de Guise, assassiné à Blois.Ainsi le Grand Ecuyer rendait-il un hommage inattendu à Gabrielle, en lui montrant qu'il fallait deux femmes pour la remplacer...
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MessageSujet: Re: LA REINE MARGOT de la part d'EPHISTO   LA REINE MARGOT   de la part d'EPHISTO - Page 3 EmptyVen 26 Nov - 22:42

Les petites nattes ornées de rubans .. c'était aux sourcils ??
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MessageSujet: LA REINE MARGOT   LA REINE MARGOT   de la part d'EPHISTO - Page 3 EmptySam 27 Nov - 0:32

Pas du tout Jean2, ce sont les poils de son nez qu'elle tressait. ...... geek
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MessageSujet: LA REINE MARGOT   LA REINE MARGOT   de la part d'EPHISTO - Page 3 EmptySam 27 Nov - 2:08

GABRIELLE D'ESTREES POUSSE HENRI IV A ABJURER


Il n'y a aucune révolution dans les empires et dans les familles où les femmes ne soient entrées comme cause, comme objet ou comme moyen. C'est à elles que le Destin a dit : Imperum sine fine dedi. - CONDORDET -

Au début de 1593, le marquis d'O écrivait avec désinvolture à Henri IV :

Sire, il ne faut plus tortignonner, vous avez dans huit jours un roi élu en France, le parti des princes catholiques, le Pape, le roi d'Espagne, l'empereur, le duc de Savoie et tout ce que vous aviez déjà d'ennemis sur le dos. Et il vous faut soutenir tout cela avec vos misérables Huguenots, si vous ne prenez une prompte et galante résolution d'ouïr une messe... Si vous estiez quelque prince dévotieux, je craidrois de vous tenir ce langage. Mais vous vivez trop en bon compagnon, pour que nous vous soupçonnions de faire tout par conscience. Craignez-vous d'offenser les Huguenots qui sont toujours assez contents des rois, quand ils ont liberté de conscience, et qui, quand vous leur feriez du mal, vous mettront en leurs prières ? Avisez de choisir, ou de complaire à vos prophètes de Gascogne et retourner courir le guilledou, en nous faisant jourer à sauve-qui-peut, ou a craindre la Ligue qui ne craint rien de vous tant que vostre conversion, pour estouffer le Tiers-Parti à sa naissance et estre, dans un mois, roi absolu de toute la France, gagnant plus en une heure de messe que vous ne feriez en vingt batailles gagnées et en vingt années de périls et de labeurs.

Le marquis d'O avait raison, la situation était extrêmement critique pour le Béarnais qui, depuis deux ans, avait perdu un trop de temps dans le lit des dames. Mayenne et les Ligueurs venaient de convoquer les Etats Généraux à Paris pour élire un roi et le peuple, fatigué de la guerre civile, semblait disposé à accepter cette solution qui dépossédait Henri IV de sa couronne.

En outre, depuis quelques jours, le roi d'Espagne, Philippe II, qui avait déjà réussi à faire entrer une garnison dans Paris, essayait de faire proclamer reine de France sa fille Isabelle, petite-fille de Henri II par sa mère.

Il n'y avait donc pas de temps à perdre. Pourtant, le roi hésitait.

Alors Sully s'en mêla.


Vous ne parviendrez jamais à l'entière possession et paisible jouissance de vostre royaume, lui écrivit-il, que par deux seuls expédients et moyens : par le premier desquels, qui est la force et les armes, il vous faudra user de fortes résolutions, et vous faudra passer par une milliasse de difficultés, fatigues, peines, ennuis, périls et travaux, avoir continuellement le cul sur la selle, le hallecret sur le dos, le casque en la teste, le pistolet au poing et l'espée en la main, mais, qui plus est dire adieu repos, plaisirs, passe-temps, amours, maîtresses, jeux, chiens, oiseaux et bastiments, car vous ne sortirez de telles affaires que par multiplicité de prises de villes, quantité de combats, signalées victoires et grande effusion de sang, au lieu que par l'autre voie, qui est de vous accommoder touchant la religion, à la volonté du plus grand nombre de vos sujets, vous ne rencontrerez de peines, et difficultés en ce monde, mais pour l'autre, je ne vous en responds pas... De vous conseiller d'aller à la messe, c'est chose que vous ne devez pas attendre de moi, estant de la religion (protestant) : mais bien vous dirai-je que c'est là le plus prompt et le plus facile moyen pour renverser tous les monopoles, et pour faire aller en fumée tous les plus malins projets...


Cette seconde lettre ébranla fort le roi, mais ne parvint pas encore à le décider.

Il éprouvait quelques scrupules à abandonner ses camarades de combat, ses chers Huguenots qui l'avaient suivi partout, et qui s'étaient ruinés pour lui.

C'est alors que Gabrielle intervint
.

Depuis quelque temps, la favorite, qui pensait sérieusement à se faire épouser, savait que seul le Pape pouvait casser le mariage du roi et de Margot. Elle avait donc décidé de pousser Henri IV à devenir catholique. Un soir, alors qu'il l'entretenait de ses soucis, selon son habitude, elle lui parla.

La crainte de ne jamais connaître la vie luxueuse du Louvre, la rendit éloquente et elle trouva des arguments propres à émouvoir son amant. Elle aussi lui fit entrevoir, nous dit Mézeray,

"la misère du peuple et la perspective de passer le reste de ses jours les armes sur le dos, dans les fatigues, dans le tracas, le hasard, les embûches, loin du repos et des douceurs de la vie
".

Puis elle usa de tous les moyens dont dispose une femme aimée, et réussit là où les conseillers, le marquis d'O et même Sully avait échoué.


Le 17 mai, Henri IV fit savoir à son entourage qu'il désirait se convertir.


Sur ce les amis(es), m'en vais dodo, car j'ai yeux qui pianotent. ........ Very Happy

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MessageSujet: Re: LA REINE MARGOT de la part d'EPHISTO   LA REINE MARGOT   de la part d'EPHISTO - Page 3 EmptySam 27 Nov - 9:26

" Paris vaut bien une messe !!"
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MessageSujet: LA REINE MARGOT   LA REINE MARGOT   de la part d'EPHISTO - Page 3 EmptySam 27 Nov - 12:05

"Des négociations furent ouvertes immédiatement entre du Plessis Mornay, représentant du roi, et d'éminents prélats. Elles durèrent deux mois pendant lesquels Henri IV, qui était sincèrement attaché à sa religion vécut desmoments pénibles. Enfin, Gabrielle fut si persuasive, si douce, si caressante, qu'il se rendit à Saint-Denis, d'où il lui écrivit, le 23 juillet, cette lettre célèbre :

J'arrivai arsoir de bonne heure et fut importuné de Dieugards jusques à mon coucher. Nous croyons la trêve et qu'elle se doit conclure ce jourd'hui. Pour moi je suis, à l'endroit des Ligueurs, de l'ordre de Saint-Thomas.
Je commence ce matin à parler aux évêques. Outre ceux que je vous mandai hier pour escorte, je vous envoie cinquante arquebusiers qui valent bien des cuirasses.
L'espérance que j'ai de vous voir demain retient ma main de vous faire plus long discours. Ce sera dimanche que je ferai le saut périlleux. A l'heure que je vous écris, j'ai cent importuns sur les épaules, qui me feront haïr Saint-Denis comme vous faites Mantes (la Cour, toujours errante était alors à Mantes.)
Bonjour, mon coeur, venez demain de bonne heure, car il me semble déjà qu'il y a un an que je ne vous ai vue.
Je baise un million de fois les belles mains de mon ange et la bouche de ma chère maîtresse. Ce 23 juillet
.

L'après-midi eut lieu une conférence très importante au cours de laquelle le roi posa aux théologiens de nombreuses questions sur les dogmes, la Vierge et le purgatoire. Après cinq heures de débats, blême, un peu haletant, il finit par se rendre et déclara qu'il était suffisamment instruit pour devenir catholique :
- Je mets aujourd'huii mon âme entre vos mains, dit-il, extrêmement ému, je vous prie, prenez-y-garde, car là où vous me faites entrer, je n'en sortirai que par la mort, et cela, je vous le jure et proteste
.

"Et ce disant, ajoute, L'Estoile qui rapporte ces propos, les larmes lui sortaient des yeux."

Nous voilà loin du fameux :"Paris vaut bien une messe" si souvent reproché à Henri IV.

Or ce mot a bien été prononcé, mais par Sully. Nous en trouvons la preuve dans un recueil satirique publié en 1623, intitulé les Caquets de l'Accouchée : "Il est vray, dit une commère, la hart sent toujours le fagot ; et comme disoit un jour le duc de Rosny (Sully) au roi Henry le Grand, que Dieu absolve, lorsqu'il demandoit pourquoy il n'alloit pas à la messe : "Sire, sire, la couronne vaut bien une messe."

En apprenant la décision du roi, des centaines de Parisiens vinrent à Saint-Denis pour le féliciter et l'acclamer. Mais il ne reçut personne, et demeura enfermé dans une chambre avec Gabrielle qui venait d'arriver...

La cérémonie d'abjuration eut lieu le dimanche 25 juillet. Dès l'aube, le peuple de Paris encombrait les rues tendues de tapisseries et jonchées de fleurs.


Vers huit heures, précédé d'un régiment de Suisses et de douze trompettes, Henri IV parut, vêtu de satin blanc. Il portait un chapeau noir.

Alors un grand cri retentit, u n cri qui détruisait tous les espoirs des Ligueurs, des Espagnols et des Lorrains
:

- Vive le roi !

Sur le seuil de l'église, l'archevêque de Bourges attendait Henri IV

- Qui êtes vous ? demanda-t-il
- Je sui le roi !
- Que demandez-vous ?
- Je demande à être reçu au giron de l'Eglise catholique, apostolique et romaine.
- Le voulez-vous sincèrement .
- Oui, je le veux et le désire.


Sur les marches de l'église, les gens se pressaient.

Au premier rang, le roi aperçut Gabrielle et lui sourit tendrement. Puis il s'agenouilla et fit sa profession de foi en ces termes :


"Je proteste et jure devant la face du Tout-Puissant de vivre et mourir en la Religion Catholique, Apostolique et Romaine, de la protéger et défendre envers tous au péril de mon sang et de ma vie, renonçant à toute hérésie contraire à icelle."Après quoi, il fut autorisé à entrer dans l'église, où il se confessa et entendit la messe.

A la sortie, le peuple au comble de l'enthousiasme l'acclama et lui jeta des fleurs. En échange, il voulut qu'on lançât à ces braves gens le contenu d'une énorme bourse d'argent.

Il y eut alors une ruée dont il profita pour regagner son logis avec Gabrielle. Celle-ci, heureuse d'avoir réussi se montra câline, caressante, un p eu perverse selon son habitude, et le roi acheva la journée dans ses bras.


Les Ligueurs, dont la mauvaise humeur était compréhensible, s'en offusquèrent naturellement. Le soir même, le moine Jean Boucher insultait le roi, en chaire de Saint-Merri, et se déchaînat "contre l'impertinence de faire coucher une femme de la réputation que l'on sait dans le monastère de Saint-Denis, chose défendue par les secrets Conciles, avec laquelle femme le roi commet publiquement et au su de tout le monde un ordinaire et double adultère, lui marié et elle mariée
."
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MessageSujet: LA REINE MARGOT   LA REINE MARGOT   de la part d'EPHISTO - Page 3 EmptySam 27 Nov - 16:59

r=green]]"Mais Henri IV pouvait s'attarder dans les bras de Gabrielle et en savourer la douceur sans remords.

En donnant à sa favorite la plus grande des preuves d'amour, il venait de sauver la France de la tutelle espagnole !...

En apprenant la conversion du roi, les Parisiens furent boulerversés.

Ils se rendirent en foule à Saint-Denis, au point, nous dit Sully, "qu'on ne pouvait quasi tourner par les rues" et que les étudiants profitèrent de cette cohue pour se livrer "à de grosses obscénités à l'égard des jeunes filles, dont plusieurs rentrèrent chez elles avec le corbillon garni"...


Ces braves gens voulaient naturellement voir le roi de près, et leur curiosité causait bien des embarras. Un soir, une centaine de Parisiens se trouvaient massés contre la porte de la maison où dînait Henri IV. Tout le monde poussait, espérant l'apercevoir par une petite fenêtre, quand, soudain, le vantail céda. Perdant l'équilibre, le groupe entier déferla dans la pièce comme une grosse vague et renversa la table avec toutes les victuailles.Henri IV, en voyant ses gentils sujets à plat ventre dans les compotes, les sauces et les tartelettes, éclata de rire, bien qu'il eût reçu, nous dit-on "un plat de petits pruneaux sur son pourpoint".

De tels incidents étaient d'ailleurs loin de lui déplaire car il était très "accostable", selon le mot des auteurs de la Satire Menippée, et avait un sens aigu de la publicité.

On en aura une preuve par cette anecdote que nous raconte L'Estoile :

"Le roi, jouant à la paume dans Saint-Denis, ayant avisé tout plein de femmes de Paris sous la galerie, qui avoient envie de le voir et ne ppouvoient à cause de ses archers, commanda aux dits archers de se retirer pour leur faire place, afin qu'elles le pussent voir à leur aise..."


Les propos que tinrent alors ces femmes sont d'ailleurs extrêmement savoureux. Les voici tels que nous les rapporte le chroniqueur.

"L'une d'elles commença à dire à une voisine :
- Ma commère, est-ce là le roi dont on parle tant et qu'on veut nous bailler ?
- Oui, dit l'autre, c'est le roi - il est bien plus beau que le nostre de Paris - ajouta la première. Il a le nez bien plus grand."
On voit à quoi tiennent parfois les sentiments politiques de certaines femmes...


Cet enthousiasme populaire était naturellement combattu par les Ligueurs qui, ne pouvant plus attaquer le roi sur le chapitre de la religion, se déchaînaient contre Gabrielle et faisaient courir des pamphlets dans lesquels ils reprochaient à la favorite de conduire le Béarnais à sa perte par une luxure effrénée.
On aura une idée de cette littérature par le quatrain suivant :


Gabriel vint jadis à la Vierge annoncer
Que le Sauveur du monde aurait naissance d'elle,
Mais aujourd'hui le roi, par une Gabrielle,
A son propre salut à voulu renoncer.


Pour couper court à ces attaques, Henri IV, qui voulait profiter du mouvement d'opinion créé par sa conversion, se sépara momentanément de Gabrielle.
Il l'installa à l'abbaye de Montmartre où elle fut reçue avec beaucoup d'amitié par la jeune abbesse, sa cousine. Le soir, après le souper, les deux femmes se retrouvaient dans le jardin qui dominait la capitale, et, tout en faisant des bouquets pour la chapelle de la Vierge, s'entretenaient longuement du roi. Ce sujet leur était cher à toutes deux, puisque l'abbesse, qui s'appelait Claude de Beauvillier, avait été, trois ans auparavant, on s'en souvient, la maîtresse de Henri IV.


De temps en temps, le Béarnais venait à Montmartre et restait quelques heures avec Gabrielle dans le pavillon particulier qui avait été mis à sa disposition. Après lui avoir prouvé sur le lit ses sentiments distingués, il la mettait au courant des évènements politiques, annonçant à chaque fois la reddition de plusieurs villes et la soumission de nombreux Ligueurs.

Pourtant, Paris, dont ils voyaient les mille clochetons scintiller à leurs pieds dans la lumière douce de l'été 1593, Paris tenu en main par M de Mayenne lui-même, refusait de se rendre, et Gabrielle s'en désolait. Un soir, elle dit :

- Et si vous ameniez le gouverneur de Paris à trahir la Ligue ?

Le roi, qui ne pensait qu'aux moyens militaires de prendre la capitale, demeura muet. La favorite reprit :

- Croyez-moi, tout ne se fait pas avec des canons et des cavaliers. Comment ne le savez-vous pas, vous qui avez vécu avec tant de femme ?

Elle ajouta en riant :

- Et puis, il faut bien que les ambitieux et les cupides servent à quelque chose...


Henri IV, séduit par cette idée, promit d'envoyer quelques agents secrets à M. de Belin, gouverneur de Paris, avec des propositions alléchantes ; puis il se rendit à Saint-Denis pour prendre immédiatement toutes les dispositions nécessaires.

Quant il fut parti, Gabrielle alla s'accouder à la fenêtre et, longtemps, dans le soir tiède, rêva, les yeux fixés sur [/size]le Louvre.
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MessageSujet: LA REINE MARGOT   LA REINE MARGOT   de la part d'EPHISTO - Page 3 EmptySam 27 Nov - 17:09

"Les pourparlers avec M. de Belin furent rapides. Le gouverneur, tenté par ce que lui offrait Henri IV, accepta sans discuter de livrer la ville en faisant ouvrir nuitamment certaines protes.
Le roi mit au point avec ses conseillers - et avec Gabrielle, qu'il voyait presque tous les jours - un projet hardi : il s'agissait de faire sortir l'armée de Mayenne sur l'ordre de Belin et d'entrer quelques heures plus tard dans la capitale en toute sécurité
.

En attendant qu'une occasion permit de réaliser ce plan, le Béarnais et ses amis cessèrent à peu près toute activité. Naïfs, les Ligueurs crurent avoir gagné la partie et, dans leur enthousiasme, se laissèrent aller aux plaisirs vulgaires de l'insulte. Le roi et la favorite furent traités de "démons lubriques" et de "bêtes chaudes"...

Or ces appellations qui n'émouvaient plus personne troublèrent un Orléanais illuminé et pudibond qui se nommait Pierre Barrière. Fort dévot, il s'imagina que le ciel l'avait désigné pour débarrasser la France de ce roi qui entendait la messe et commettait l'adultère. Il acheta un grand couteau et se dirigea vers la capitale provisoire de la France. En traversant Paris, il eut soudain quelques doutes sur le bien-fondé de sa mission. Voulant en avoir le coeur net, il alla trouver le curé de Saint-André-des-Arts et lui dévoila son projet :

- Qu'est-ce que vous en pensez ?

Le curé était Ligueur, il applaudit :

- C'est une très bonne idée, mon petit. Ce roi se conduit fort mal avec une femme mariée. Il faut le tuer
.

L'âme en apix, Barrière partit pour Saint-Denis
.
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MessageSujet: LA REINE MARGOT   LA REINE MARGOT   de la part d'EPHISTO - Page 3 EmptySam 27 Nov - 17:30

"Là, il chercha un complice qui, bien entendu, le dénonca, et il fut arrêté. Le lendemain, les juges le condamnaient à avoir "le poing brûlé, les bras et les jambes rompus, puis à être mis sur la roue et étranglé".
Il n'en demandait pas tant
.

Gabrielle eut froid dans le dos en apprenant cette histoire et se montra plus pressée que jamais d'entrer dans Paris avec son amant. Hélas ! de nouveaux obstacles empêchaient constamment la réalisation du plan projeté par le roi et l'entreprise était, jour après jours reportée. Cinq mois d'attente énervante passèrent ainsi.

- Laissez venir l'hiver, disait-on. A ce moment, l'action sera facile.

L'hiver apporta une catastrophe. A la fin de janvier 1594, alors qu'on préparait l'attaque, Mayenne, pour des raisons mystérieuses, remplaça Belin par le comte de Brissac.


Tout était à recommencer...

Poussé par sa maîtresse, Henri IV se mit immédiatement en rapport avec le nouveau gouverneur de Paris et lui offrit, s'il acceptait de trahir ses chefs, le titre de maréchal de France.
Brissac promit son concours.


Il reprit le projet mis au point par son prédécesseur et, pour que les Ligueurs ne se méfiassent pas de lui, imagina de jouer les niais. Tous les amis de Mayenne furent dupes de cette manoeuvre et le duc de Féria écrivit au légat :

"Mesmes, pour vous monstrer quel grand homme d'affaires c'est, une fois que nous tenions le Conseil Céans, au lieu de songer à ce qu'on disoit, il s'amusoit à prendre des mouches contre la muraille."

Pendant que Brissac endormait ainsi la méfiance de la Ligue, le roi se faisait sacrer à Chârtres. Cette nouvelle atterra les Ligueurs,. Le duc de Mayenne, craignant pour sa sécurité, allégua la nécessité d'aller en Picardie rejoindre l'armée espagnole et quitta précipitamment Paris le 6 mars, après avoir donné la garde de la ville à M. de Brissac. Le 21, le gouverneur envoya sous un vague prétexte les meilleures compagnies de la garnison à Pontoise afin d'être tranquille, et Henri IV, aussitôt prévenu, vint masser ses troupes dans le faubourg Saint-Honoré. Enfin, le 22, à quatre heures du matin, M; de Brissac, trahissant ainsi qu'il l'avait promis, ouvrit lui-même la Porte-Neuve, et l'armée royale entra dans la capitale...

Contrairement à la légende popularisée par le célèbre tableau de Gérard, les Parisiens ne montrèrent qu'un enthousiasme modéré en voyant Henri IV dans leurs murs. Des coups de feu furent même tirés sur lui et une trentaine de gêneurs, qui ne semblaient pas suffisamment contents (ils criaient - "Nous sommes vendus !"), furent jetés à l'eau par les gardes du roi.

Sans se soucier de ces trublions, Henri IV alla entendre la messe à Notre-Dame, chant un Te Deum et se rendit au Louvre, où deux heures plus tard, descendue à la hâte des hauteurs de Montmartre, Gabrielle d'Estrées venait le retrouver, ivre de joie..."
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MessageSujet: LA REINE MARGOT   LA REINE MARGOT   de la part d'EPHISTO - Page 3 EmptySam 27 Nov - 20:37

"Vers la fin du mois de mars, le bruit courut dans Paris que la favorite était enceinte. Tout le monde devina que le rein du bon roi Henri n'était pas étranger à l'affaire et les esprits chagrins se scandalisèrent.

Les gens de bon sens, au contraire, se réjouirent, disant que depuis vingt-deux ans aucun roi de France n'avait donné une telle preuve de virilité (depuis Charles IX, qui avait donné, en 1572, à une fille à Elisabeth d'Autriche.) et que c'était un heureux énénemant qui faisait bien augurer de l'avenir ; mais ceux-là constituaient, comme d'habitude, le petit nombre.


Finalement, devant l'hostilité des Parisiens, la favorite dut quitter le roi et se réfugier, de nouveau, à l'abbaye de Montmartre.

Maître de Paris, mais fortement critiqué pour sa liaison avec Gabrielle, Henri IV avait encore beaucoup à faire pour asseoir son autorité. D'ailleurs de nombreuses villes refusaient de le reconnaître et il en souffrait.


Au mois d'avril, résolu à montrer sa force, il alla mettre le siège devant la place de Laon, tenue par la Ligue. Les opérations furent longues, car les Laonnais avaient des armes en quantité et des caves pleines de provisions.

Au bout d'un mois, Gabrielle vint, malgré un état de grossesse avancé, rejoindre son amant. Elle eût voulu partager son destin et coucher sous la tente avec lui, mais le roi le lui interdit, disant que "la vie de camp n'étoit point bonne pour une femme qui avoit un enfant au ventre".

Elle alla donc s'installer au château de Coucy. C'est là qu'elle accoucha le 7 juin d'un gros garçon qu'on nomma César. Le choix du prénom causa, dit-on quelques soucis au roi. Il aurait voulu l'appeler Alexandre, mais l'ombre de son ex-rival, le premier amour de Gabrielle, le fit hésiter. "Il eut peur, nous explique Tallemant des Réaux, qu'on ne dise Alexandre le Grand ; car on appelait M. de Bellegarde : M. Le Grand (Il était Grand Ecuyer), et, apparemment, il avait passé le premier.

Ce petit nuage étant écarté, Henri IV montra une joie sans bornes et revint devant les murs de Laon avec une force déccuplée. Le 21 juillet, la ville capitulait...
Peu après, Poitiers, Amiens, Beauvais, Cambrai, Concarneau, Quimper, Doullens, Saint-Malo, Péronne se rendaient également
.

A l'annonce de chaque reddition, le Béarnais sautait de joie et courait voir Gabrielle qui avait regagné l'abbaye de Montmartre où César faisait la joie des petites nonnes.

- Ce fils me porte bonheur, disait-il tendrement.


Bientôt, la Provence fut délivrée du joug d'Epernon et le royaume presque entièrement soustrait au clan hispano-lorrain. Alors Henri IV pensa que le moment était venu de faire son entrée officielle dans Paris. Il en fixa la date au 15 décembre pour que Gabrielle, qu'il voulait associer à la royauté et à son triomphe, fût à même d'y participer.

Le 14, ils allèrent tous deux passer la nuit à Saint-Germain-en-Laye, et le lendemain, vers sept heures du soir, alors que la nuit commençait à estomper la couleur des choses, le roi entra dans sa capitale à la lueur des flambeaux et accompagné d'une suite magnifique.

Tous les Parisiens étaient venus acclamer leur souverain qui portait, pour l'occasion, un chapeau gris orné de son légendaire panache blanc...

A quelques pas devant lui roulait une somptueuse litière, encadrée d'une compagnie d'archers. On y pouvait voir Gabrielle, souriante et éblouissante dans une robe de satin noir semée de broderies de jais, la jupe "toute huppée de blanc et chargée de tant de perles et de pierreries si reluisantes qu'elles offusquaient la lueur des flambeaux", raconte Pierre de l'Estoile.


Elle était alors dans tout l'épanouissement de sa beauté.

"Son visage était lisse et transparent comme une perle dont il avait la finesse et l'eau, nous dit Mlle de Guise, qui pourtant ne l'aimait guère. Le satin blanc de sa robe paraissait noir à comparaison de la neige de son beau sein. Ses lèvres étaient couleur de rubis et ses yeux d'un bleu céleste, si luisants qu'on eût pu difficilement juger s'ils empruntaient au soleil leur vive lumière ou si ce bel astre leur était redevable de sa clarté..."

En la voyant passer, si belle, les Parisiens, émerveillés hochaient la tête :

- C'est la putain du roi, disaient-ils.

Mais il y avait maintenant dans leur ton une nuance de respect.

Au milieu de cette foule joyeuse, une femme triste regardait, elle aussi, la belle Gabrielle. C'était Corisande...

Mme de Gramont, en effet, se trouvait à Paris depuis quelque temps avec son amie Catherine de Bourbon, soeur du roi, et le destin, toujours facétieux, la faisait assister au triomphe de sa remplaçante... (Mme de Gramont demeura quelque temps à Paris, mais le roi lui fit tant d'affronts qu'elle retourna à Hagetmau, où elle eut à plusieurs reprises la magnanimité de rendre de grands services à la couronne. Elle mourut en février 1621.)


Le soir, lorsque les cérémonies furent achevées,Henri IV rentra au Louvre et la favorite prit le chemin de l'hôtel du Bouchage qui devait être, désormais sa demeur officielle."
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MessageSujet: LA REINE MARGOT   LA REINE MARGOT   de la part d'EPHISTO - Page 3 EmptyLun 29 Nov - 20:52

"Le roi mena, pendant quelque temps, une vie tout à fait familiale, partageant son temps entre Gabrielle, qu'il voyait la nuit, et César, qu'il contemplait le jour. Or bientôt, une idée l'obséda : ce fils qu'il adorait était légalement l'enfant de Nicolas d'Amerval...

Il lui parut en conséquence urgent d'entamer la procédure nécessaire pour rendre libre sa maïtresse.


Le divorce fut donc résolu et Gabrielle, sur la prière du roi, envoya à l'évêque d'Amiens cette curieuse supplique :Vous démontre dame Gabrielle d'Estrées qu'étant âgée seulement de dix-huit ans elle aurait par force et contrainte été mariée par son père avec M. Nicolas d'Amerval, seigneur de Liancourt. Toutefois, pendant et depuis le temps de deux ans, elle n'aurait vécu ni conversé avec son mari comme ont accoutumé de faire personnes vraiment capables en légitime mariage, encore que ledit sire d'Amerval, dissimulant son impuissance, se serait approché d'elle plusieurs fois sans aucun effet à rendre le devoir conjugal, ce que ladit suppliante aurait tu et dissimulé jusques ici sans faire aucune plainte. S'étant enfin déclarée à ses tantes et soeurs, avait été conseillée de s'adresser à vous comme juge ordinaire pour lui être pourvue de remèdes convenables.

Convoqué par l'évêque, Nicolas d'Amerval répondit qu'il avait eu quatre enfants de sa première femme et que son impuissance, le soir de ses noces, était due à une chute de cheval.

- Par la suite, avoua-t-il, j'ai plusieurs fois voulu hanter mon épouse ; mais malgré mes efforts, je n'ai pu avoir sa compagnie charnelle.

Entendue à son tour, Gabrielle se prétendit lésée "pour n'avoir point reçu son dû conjugal"...


Naturellement, ce procès qui dura trois mois amusa beaucoup le gentil peuple, ravi de voir étaler au grand jour toute la sordide intimité des grands. Et l'on riait d'autant plus que la plupart des gens ne voyaient dans l'impuissance du sieur de Liancourt qu'un bon prétexte trouvé par le roi pour faire rompre le mariage de Gabrielle.

Fin novembre, le bruit courut que Nicolas, rendu momentanément défaillant par sa chute de cheval, avait retrouvé toute sa vigueur et tout son entrain.
Cette nouvelle réjouit les amateurs d'histoires lestes.

- Le sieur de Liancourt demandera sans doute l'épreuve du Congrès, disaient-ils en se pouléchant à l'avance.


Qu'était-ce que le Congrès ? Un bien curieux procédé d'expertise qui était utilisé depuis le XIV è siècle dansles demandes de divorce pour impuissance.

Le mari accusé de n'avoir pu se montrer galant compagnon, demandait à être convoqué par une assemblée de médecins. On le faisait se mettre au lit avec son épouse et, au signal donné, il devait tirer les rideaux et s'efforcer d'être agréable à la dame.

Deux heures étaient accordées pour l'épreuve à laquelle assistaient, outre les médecins, quelques matrones. A tout moment, le mari dont l'honneur était en jeu pouvait appeler les témoins "pour leur montrer sa belle tenue ou leur faire constater sa victoire"

La plupart du temps, le pauvre, impressionné par la présence des médecins chargé de juger son "oeuvre" demeurait dans un affligeant marasme.

Au bout de deux heures, les experts venaient écarter les rideaux, relevaient les draps et faisaient toutes les constatations utiles. Après quoi, ils rédigeaient leur rapport et le portaient au juge qui attendait dans une pièce voisine.

Cette épreuve eût pu être demandée par le sieur de Liancourt qui avait alors retrouvé toute sa virilité : mais le mari de Gabrielle eut peur du roi (et peut-être aussi du ridicule). Il se contenta de rédiger son testament et d'écrire pour la postérité :


"...Et parce que pour obéyr au roi et de crainte de perdre la vie, je suis sur le point de consentir à la dissolution du mariage de moy et de ladite d'Estrées, suivant la poursuit qui s'en fait devant l'Official d'Amiens, je déclare et proteste devant Dieu et devant les hommes, je jure et affirme que si la dissolution se fait et ordonne, c'est contre ma volonté et par force, pour le respect du roy, n'estant véritable l'affirmation, confession et inhabile pour la copulation charnelle et génération
..."

Et, le 24 décembre 1594, le mariage de Gabrielle et de Nicolas fut déclaré nul par l'Official d'Amiens...

Trois jours plus tard, le 27 décembre, vers cinq heures du soir, le roi rentrait à Paris entouré par un groupe de cavaliers qui tenaient des torches et des flambeaux.
Le vent glacé qui sifflait dans la rue Saint-Honoré pliait les flammes, et Henri IV, emmitouflé dans une cape, avait du givre sur la barbe. Malgré le froid, le menu peuple se pressait sur la chaussée, jobard et gouailleur, comme à l'ordinaire
."
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MessageSujet: LA REINE MARGOT   LA REINE MARGOT   de la part d'EPHISTO - Page 3 EmptyMar 30 Nov - 1:57

"Au coin de la rue de l'Autruche, un jeune homme "vestu de noir honnestement" demanda à l'un de ses voisins "lequel estoit le roi ; sur quoi l'autre lui en montra un qui avoit des gants fourrés, lequel lui dit estre le roi". L'inconnu se mêla alors au cortège et suivit Henri IV jusqu'à l'hôtel du Bouchage où habitait Gabrielle. Là, comme tout le monde - cavaliers, gentilshommes, gardes, et même "infinies personnes inconnues" - entrait sur les pas du souverain, il pénétra à son tour sans difficulté et parvint avec la foule jusqu'à la chambre de la favorite.

Sans se faire reparquer, ce qui était facile parmi ces gens qui ne se connaissaient pas pour la plupart, il réussit à se glisser auprès du roi. A ce moment toute l'assistance avait les yeux fixés sur deux nouveaux venus à la Cour, les sieurs de Ragny et de Montigny, qui s'inclinaient devant Henri IV. Comme celui-ci se baissait pour les relever, le jeune homme sortit brusquement un couteau de sa poche et lui en porta un coup violent au visage. On entendi alors "un bruit comme si l'on avoit donné un soufflet à quelqu'un".

- Au diable soit la folle, s'écria le roi. Je crois qu'elle m'a blessé.
- C'est faux répliqua aussitôt la bouffonne qui vivait à la Cour, ce n'est pas moi !


Personne n'avait compris ce qui s'était passé ; aussi, quand Henri IV retira une dent de sa bouche et la montra à l'assistance, y eut-il quelques cris de surprise et un léger affolement. Enfin, Montigny reparqua l'inconnu qui demeurait immobile au mileu du désordre, les mains tremblantes.

- C'est vous ou moi qui avons blessé le roi, dit-il.

L'autre devint livide et les gardes se jetèrent sur lui.
A ses pieds, on trouva le couteau sanglant dont il s'était débarrassé. Arrêté sur-le-champ, il déclara s'appeler Jean Chastel, et reconnut qu'il avait voulu tuer le roi.

- J'ai frappé trop haut, dit-il, l'air ennuyé. Je visais le cou.


Mené au Fort-l'Evêque, le jeune homme y fut interrogé et les juges, qui croyaient avoir affaire à un attenta politique, comprirent avec stupeur qu'il s'agissait de tout autre chose.

Jean Chastel avait des vices contre nature qui auraient pu faire sa fortune sous Henri III, mais qui le gênaient sous Henri IV. Il était venu trop tard dans un monde trop pieux. Or, à plusieurs reprises, il avait dissimulé dans ses confessions, les péchés honteux quxquels ses goûts anormaux l'avaient poussé. Sachant que Saint-Thomas s'était violemment élevé ontre la sodomie, il avait fini par penser qu'il ne pourrait jamais obtenir l'absolution et qu'il mourrait en état de péché mortel. Le malheureux avait donc imaginé de tuer le roi pour avoir, au moment de son exécution, l'assistance d'un prêtre forcé de l'absoudre.

Son rêve se réalisa deux jours plus tard : après s'être confessé, il fut écartelé.

Naturellement, les juges ne publièrent pas les véritables mobiles de Jean Chaster - qui nous sont connus grâce à Jacques de Thou, l'historien ami de Henri IV. Ils préférèrent laisser croire à un attentat politique et comme le jeune tourmenté avait été élevé par les Jésuites, Ligueurs acharnés, ils accusèrent ceux-ci d'être à l'origine du complot.
Le procès fut rapide. Poussé par le roi qui voyait là une occasion de se débarrasser de ses ennemis, le Parlement de Paris bannit, par arrêté, tous les Jésuites du royaume.
Ils partirent, insultés grossièrement, comme il se doit, par le menu peuple qui, neuf mois plus tôt, ne voulait pas de Henri IV
..."
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MessageSujet: LA REINE MARGOT   LA REINE MARGOT   de la part d'EPHISTO - Page 3 EmptyMar 30 Nov - 20:42

lor=red]]"Dès qu'il fut remis de ses émotions, le roi se préoccupa de nouveau du petit César. Maintenant que Gabrielle était libre, il pouvait légitimer le fruit de leurs amours : c'est ce qu'il fit par lettres patentes détées de janvier 1595. Le texte de cet acte peu connu et rédigé probablement par les conseillers intimes de Gabrielle est fort curieux. Le roi semble honteux de l'action qu'il accomplit, et cherche à la justifier en invoquant l'intérêt du pays. Après avoir rappelé dans quel état il a reçu le royaume "proche d'une quasi inévitable ruine", il ajoute :

"On a vu que nous l'avons relevé et par la grâce de Dieu tantôt rétabli en son ancienne force et dignité, n'ayant à ce épargné non seulement notre labeur, mais notre sang et notre vie."

Puis il en vient au sujet même de ses préoccupations et précise qu'il espère que son courage et sa force seront héréditaires chez ceux qui proviendront de lui et "

puisque Dieu n'a pas encore permis que nous en ayons en légitime mariage, pour être la reine, notre épouse, depuis dix ans, séparée de nous, nous avons voulu en attendant qu'il veuille nous donner des enfants, qui puissent légitimement succéder à cette couronne, rechercher d'en avoir ailleurs en quelque lieu digne et honorable, qui soient obligés d'y servir, comme il s'en est vu d'autres de cette qualité (de la qualité des batards) qui ont bien mérité de cet état et y ont fait de grands et notables services. Pour cette occasion, ayant reconnu les grandes grâces et perfections, tant de l'esprit que du corps, qui se trouvent en la personne de notre chère et bien-aimée la dame Gabrielle d'Estrées, nous l'avons depuis quelques années recherchée à cet effet, comme le sujet que nous avons connu le plus digne de notre amitié. Ce que nous avons estimé pouvoir faire avec moins de scrupules et charges de conscience, que nous savons que le mariage qu'elle a contracté avec le sieur de Liancourt était nul et sans avoir jamais eu aucun effet, comme il s'est justifié par la séparation et la nullité dudit mariage qui s'en est depuis ensuivi.
Et ss'atatn ladite dame après nos longues poursuites et ce que nous avons apporté de notre autorité, condescendue à nous obéir et complaire, un fils est né, qui a porté jusqu'à présent le nom de César Monsieur. Ses vertus précoces nous décident, en l'avouant et reconnaissant notre fils naturel, de lui accorder nos lettres de légitimation."

Le roi dit encore :

"J'accorde ces terres à César parce que le défaut de sa progéniture l'excluant de toute prétention à la succession de cette couronne et de ce qui en dépend, mais aussi de celle de notre royaume de Navarre, et de tous nos autres biens et revenus de notre autre patrimoine, il demeurera en très mauvaise condition, s'il n'était par ladite légitimation rendu capable de recevoir tous les dons et bienfaits qui lui seront faits tant par nous que par atures. Pour ces causes, nous le déclarons légitime par les présentes, aux fins q'uil puisse acquérir, tester, recevoir donation et tenir telles charges, dignités, offices, tant de Nous que des rois nos successeurs..."

Le Parlement de Paris enregistra ces lettres sans protester.

La joie de Gabrielle, devenant ainsi favorite officielle, fut immense, on s'en doute. Pourtant, la jeune femme ambitionnait un autre titre. Elle rêvait d'être reine de France...


Depuis quelque temps, déjà, elle poussait le roi à répudier Margot qui vivait toujours en exil et n'avait de reine que le nom. Elle renouvela ses prières, déploya tout son charme, se fit tendre et voluptueuse...

Finalement, Henri IV envoya à Usson, M Erard, maître des requêtes, auprès de son épouse. Qu'offrait-il à Marguerite en échange d'une couronne ? Une somme de deux cent cinquante mille écus pour payer les dettes que la pauvre avait dû faire depuis dix ans, une rente viagère et une place de sûreté. Il demandait en échange à la reine qu'elle donnât une procuration en blanc, et qu'elle déclarât devant l'Officiel "que son mariage ayant été contracté sans dispense, à un degré de parenté prohibé et sans libre consentement", elle en désirait l'annulation.


M. Erard arriva à Usson après une semaine de voyage. Il devait avoir en arrivant un curieux spectacle. Margo, qui aimait toujours autant le jeu d'amour, avait, en effet, pris l'habitude de se coucher nue sur un lit en laissant la fenêtre ouverte "pour donner aux passants qui jetoient un regard l'envie de venir lui beliner le joyau"

C'est ainsi que le maître des requêtes, austère et digne homme s'il en fût, revit pour la première fois sa souveraine...

L'idée d'un divorce ne déplaisait pas à la reine Margot dont le seul espoir était de sortir d'Usson, et qui savait bien que jamais Henri IV ne la rappellerait auprès de lui. Mais, en femme rouée, elle voulut profiter de la situation, montra des exigences et, pour bien affirmer son indépendance, fit traîner les pourparlers.


Son attitude était pourtant pleine de respect. Elle évitait, en effet, de manifester une amertume qui eût risqué d'agacer le roi. D'ailleur, était-elle amère ?

Elle avait bien sûr quarante ans et sa vie s'était trouvée gâchée par un mariage imposé ; mais grâce à une époque troublée, elle avait eu tous les amants q'une femme bien douée physiquement fût souhaiter avoir dans son lit : des petits, des grands, des gros, des maigres, des vieux, des jeunes, des ouvriers, des intellectuels et même un chanoine de Notre-Dame de Paris, le vigoureux Choissin, dont on disait "qu'il lui avait souvent parfumé son devant de thorax"..
.

Et puis sa vie n'était pas fine, et elle espérait bien continuer à "faire l'androgyne", comme on disait alors par manière de plaisanterie. Une seule chose lui importait donc : quitter le château d'Usson et rentrer à Paris, où des jeunes gens boutonneux seraient heureux de profiter de son expérience.

La couronne, les biens, la richesse ? Elle s'en moquait, pourvu qu'elle eût de quoi nourrir ceux qui lui donnaient le seul plaisir qu'elle aimât..
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